Les études de médecine

divina-bonitas

Chronique - colère

On manque de médecins dans les hôpitaux et les campagnes, il faut des mois parfois pourvoir un dermato, un ophtalmo, un gynéco...mais le numérus très clos ne se déverrouille chaque année dans chaque fac que de places se comptant sur  les doigts d'une main.


L'année de PACES relève du sacerdoce pour des jeunes devenus soldats-étudiants à la vie monacale, ascétique: 12 heures minimum de travail 7 jours sur 7, la tête dans des pavés blancs surlignés au marker fluo épais comme des bottins de banlieue parisienne, les yeux rougis à force de déchiffrer les pages écrites en police minuscule, le toute à grands renforts de caféine, vitamines, sandwichs, pizzas, barres céréalières chocolatées...drogues parfois pour certains qui ne tiennent plus debout, dans un marche ou crève souvent très inhumain. Conclusion: certains(es) prennent 15 kilos en 10 mois que d'autres perdent dans le même temps. Le stress récurrent, ça fait gonfler ou fondre.


Il faut tenir et se lever encore, les cernes noirâtres sous les yeux, l'adrénaline faisant le yoyo dans les genoux les jours de colles, puis les jours de résultats de colles et de concours, l'œil rivé sur une liste où les étudiants ne sont que des numéros.


Pas question de vocation..de quoi? - c'est quoi ce mot de vocation?... en PACES. La sélection se fait au mental, à la capacité à déjouer les pièges des QCM, au mieux adapté au système, aux maths, aux chiffres, à celui qui a les canines les plus acérées, longues et hargneuses. Le vainqueur est celui qui résiste à ce bourrage de crâne en règle.


Et ensuite? Que se passe-t-il ensuite?


Il faut quand même savoir qu'un nombre important d'étudiants ayant passé ce cap décrochent ensuite...ensuite quand il faut être au contact de malades, de malades incontinents ou vomissant, de gens qui puent, gueulent et bavent, réclament de l'attention et questionnent, qui se répandent en fluides divers en étant branchés à des poches d'autres liquides, le tout dans des odeurs mixtes de bouffe d'hosto et de désinfectant, de sueur et de peur, d'urine et de sang. Là alors, le super bon en chiffres et en QCM manquant de vocation fuit à toutes jambes un métier pour lequel il se rend compte qu'il n'est pas fait, qui le rebute, le dégoute, lui met le cœur au bord des lèvres...


Augmente-t'on pour autant le numérus closus en année de Paces afin de compenser ces défections tardives? Que nenni! Il n'y a que les doyens pour se plaindre quand il n'est plus l'heure de gémir.


Et je ne parle même pas du nombre de jeunes que je récupère dans mon cabinet complètement déprimés, désorientés, cuits psychologiquement et physiquement, lessivés par cette année ou un redoublement inefficace, lequel a achevé de leur faire perdre le peu de confiance en eux qu'ils avaient conservée. Un grand nombre met au moins un an à s'en remettre, errant en eux-mêmes, persuadés d'être des nuls, des bons à rien, des moins que rien, des zéros, des "merdes", des ratés, des débiles, brillants enfants transformés en zombies égarés par un mode de sélection abscons, que les parents ne savent plus comment réconforter ni réorienter.


Certains qui obtiennent le fameux sésame pour la seconde année...se tirent. Trop pompés pour poursuivre.


D'autres partent à l'étranger, espérant avoir plus de chances de réussites là-bas.


D'autres encore décrochent au moment du concours de l'internant, usés, pompés jusqu'à la moelle par ces études qui n'en finissent pas de se finir, par des gardes harassantes payées à coups de lance-pierres. Ils n'ont plus de jus, le peu de vocation qu'ils avaient s'est tarie.


Les mots de manquent tant ma colère gronde.


Et personne ne fait ni de dit rien. Combien de temps cela va durer encore?


Et mon troisième qui veut être pédiatre depuis qu'il sait parler, mon petit bonhomme volontaire et intelligent, doux et compatissant, brillant et courageux, que je récupère harassé, maigre et blême quelques heures par semaine, il y a des jours où je ne sais plus quoi dire pour le soutenir et l'encourager.


Alors je prie pour lui donner de l'énergie, en confiant son sort à des instances supérieures, là-haut, souhaitant qu'elles m'entendent. Que faire d'autre?


La seule solution que j'entrevois serait de monter une association de parents prenant la défense de ces jeunes et secouant le cocotier des instances ministérielles!


  • Je me doutais de l'extrême difficulté des études de médecine, mais je n'avais pas conscience des multiples bâtons dans les roues que doivent affronter les étudiants.
    Les instances ministérielles ? Elles pensent "rentabilité".

    Pas d'illusions: Les Instances qui songent à détricoter la Sécu Sociale de 1946, pour privatiser la Maladie sont au travail souterrain.

    · Il y a plus de 7 ans ·
    Oiseau... 300

    astrov

    • Ah Astrov! Si vous saviez! Et je n'ai même pas parlé du coût pour les parents, celui en particulier des boites à colles qui se gavent, ni de l'affectation des étudiants dans telle ou telle fac selon des critères plus que curieux, engendrant d'autres coûts de logement pour certains étudiants, ni de la médecine universitaire de ces facs qui ne tient jamais compte des troubles "dys" des jeunes. Aucun tiers temps pour les dyslexiques par exemple, au mieux quelques minutes pour une poignée qui ne font jamais un tiers temps. "C'est un concours" dit la dame, sous entendu qui n'admet pas les "handicapés". Il ne faut aucune "faiblesse" aux jeunes! Seule l'élite doit réussir! La seule notion d'élite me fait dresser les cheveux sur la tête! Les enfants qui n'ont pas 10 de moyenne ne peuvent même pas prétendre à entrer en 2° année de biologie à la Fac et n'ont aucune équivalence pour rien. Je viens encore de recevoir une jeune fille qui a arrêté la fac tant elle était désespérée et se retrouve à bosser au mac do...

      · Il y a plus de 7 ans ·
      Img 1518

      divina-bonitas

  • Très nécessaire coup de gueule. Mais les Français sont des veaux. Ils manifestent pour leur petit confort personnel, sont comme nos honteux politiques qui ne voient que l'ultra court terme et ne savent pas se mobiliser pour l'avenir de nos enfants, leurs enfants.
    Et quand on se paie un ministre de l'Educ Nat comme la bimbo actuelle, un ministre de la Santé comme la millionnaire aux gros yeux, rien n'est près de changer

    · Il y a plus de 7 ans ·
    Cavalier

    menestrel75

    • Ah ? Elle est riche, cette ministre ?

      · Il y a plus de 7 ans ·
      Oiseau... 300

      astrov

    • Ah oui, difficile de se mobiliser pour les bonnes causes, en particulier tout ce qui concerne l'éducation. En revanche, très curieux de voir qu'une épreuve avec coeff 4 a été rajoutée en 1ère année de droit: projet professionnel personnel, ce qui consiste à faire passer aux gosses des tests débiles pour savoir s'ils font les bonnes études. Mon fils et un de ses copains se sont ainsi retrouvés avec des tests leur suggérant de faire cuisinier ou pâtissier! Moi dont le métier est d'orienter les jeunes, sait bien que mon gamin a choisi la bonne voie pour devenir commissaire de police. Et la prof de dire que ces tests n'étaient pas fiables pour 30% des gamins! Et dire qu'on a dû payer cher pour monter cette nouvelle matière, qui se passe essentiellement sur pc. Désespérant, aucun bon sens...Et le droit constitutionnel n'est que coeff 2!!!
      On n'est pas sorti de l'auberge avec ce genre d'innovation!!!
      Quant au ministre de la santé, je préfère me taire.
      Si elle est riche, de quoi l'est-elle?

      · Il y a plus de 7 ans ·
      Img 1518

      divina-bonitas

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