Les femmes laides

Joelle Cambonie

A ceux souffrant de ce que les femmes peuvent parfois porter de laideur...

Du plus loin que je m'en souvienne, elles mentaient, jouaient, trichaient et posaient dans leur espace des filets invisibles pour que les autres s'y prennent les pieds. Face à leur belle assurance, une façon péremptoire d'indiquer le bien et le mal, d'arguer le vrai et le faux, d'ordonner le juste et l'injuste, nous n'en menions pas large. Qui, nous ? Celles et ceux qui ne s'étaient pas laissés enserrés par les fils de l'araignée de la haine et de la rancœur et qui avaient - en toute simplicité - choisi de vivre leur vie.

Telles des mantes religieuses elles émasculaient leurs conjoints, puis les humiliaient ou les jetaient faute d'adversaire à leur hauteur.

Mais quel combat ont elles gagné au cours de ces ans ? La laideur de leur sentiment s'est emparée de chacune d'elle, les déformant, les rendant malade et leur ôtant le souffle vital.

Des mortes vivantes sous anxiolytique et antidépresseurs, de singulières sorcières sans couleur, des conquérantes au ventre rond, assouvies et boiteuses : telles sont devenues ces donneuses de leçon.

Il est bon de les laisser dans leur milieu malodorant, afin que le terreau issu de leur corps obèse ne propage leur toxicité.

Il en est assez du mal qu'elles ont de leur vivant diffusé : la dernière vient de sombrer.

Enfin bâillonnées, ces diseuses de mauvaises aventures, ces fées tordues ne nous nuiront plus.

La paix, un souffle d'air pur, un sourire sur tes lèvres : revoilà la vie et ses petits bonheurs. Je pense à toi qui m'attends, cœur léger, innocence, amour en devenir, humour et joie. Je te rejoins, le pas hardi mais l'âme encore timide.

Oser vivre, voici ce qui aura été ma faute, et mon bien le plus précieux.

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