Les mémoires plus ou moins vrais de Maitre Scarabée le plus grand des faussaires, ou le sucide par la justice. 17eme Partie
Remi Campana
17. LA NOYADE
Mon Dieu, Nous étions tous effrayés, et ne savions où il était passé. Le nain Malouin s’était-il perdu ? Nous le cherchions partout sur ce bateau de dix mètres de long, ou tout laissait entrevoir qu’il était impossible de se cacher. La conclusion fut vite trouvée : il avait dû passer par dessus bord. Et l’autre qui n’arrêtait pas de gémir, les pieds lestés de béton, ne pouvait-il pas avoir un minimum de convenance à respecter notre chagrin ? Surtout, quand on va crever, on évite de se faire remarquer. Nous-mêmes, nous étions un peu déstabilisés au milieu de la Méditerranée. Comment allions-nous faire pour conduire une telle galère ? Seul notre petit « rabouté » avait de tels diplômes pour le manœuvrer. Après la besogne, on se voyait déjà crier en chœur « Sortez les canots de sauvetage, en dérive !!! »
Quand, miracle des miracles, un « au secours ! » semi-spectral arriva à nos oreilles. Nous avions beau nous précipiter chacun dans un coin, en nous contorsionnant dans tous les sens pour voir où il se cachait, il nous fut impossible de repérer sa trace. Il faut dire que dans ce caramentran, notre ami, plus petit que minuscule, se confrontait à un ennemi de taille qu’on appelle l’immensité… A ce moment-là, grommelant comme un Charretier, je ne pus m’empêcher de lâcher un juron propre aux gens de ma race :
- Caracamougno, qué lou diable t’empougno.
Lucifer dut bien aimer, car très vite, il nous permit de le retrouver. Le nigaud était tombé dans un trou si petit que, malgré son gabarit, nous nous demandâmes comment il avait pu faire pour passer au travers. En le remontant, nous l’entendions gueuler de douleur pour une guibolle de cassée, pourtant il n’avait pas à se plaindre. Que de chichinettes il faisait là, en lui brisant la deuxième, et en tirant sur les deux pour les mettre à égale hauteur, il gagnait vingt centimètres. Malgré toutes ces frayeurs, nous étions heureux de le retrouver ; et nous le lui prouvâmes en buvant un verre à sa santé. La tête enfin reposée, nous pouvions dorénavant nous consacrer à ce qui nous tourmentait, Mourad Ben Sala.
Il avait perdu toute sa prestance, ce cochon-là (et pour un musulman, ce n’est pas peu dire). Menotté et garrotté, il gesticulait dans tous les sens. Scarabée le regardait droit dans les yeux, et tout en éprouvant de la pitié, il ne pouvait rien oublier :
-Vous voyez, mon ami, comme vous me l’avez dit un jour, nous nous somme retrouvés. Certainement pas comme vous le désiriez, mais une retrouvaille tout de même reste une retrouvaille. Donc vous aimiez trop ma tête, pour avoir le besoin de vous la payer. Pourtant j’ai tenu mes engagements, il y a quelques années ? Et toi qu’as-tu fais ? Malgré ta réussite, tu n’as pu t’empêcher de garder tes mauvais travers, et continuer tes brigandages. Oh, ça ne m’aurait pas dérangé, tant que tu ne touchais pas à mes oignons. Tu n’aurais jamais dû remettre la petite Lada sur le Turpin, et quand je t’ai demandé de me la restituer, qu’as-tu fait ? Tu t’es insurgé, et auprès de qui ?… De notre bon roi des brigands, pour qu’il te laisse me trouer la paillasse. Tu as bien réussi et, aujourd’hui, je dois fuir la région ; mais juste avant, j’ai décidé de payer ma dette, les bons cons ne font-ils pas les bon amis ?
Dupa Grave regardait et suppliait du regard son compère d’arrêter ses folies. Malheureusement, Scarabée avait trop de rancœur pour se laisser fléchir. Sur l’horizon, le soleil commençait à pointer son nez, il était temps.
Mais, au dernier moment, cette mort par noyade lui sembla trop ordinaire, voire inhumaine, pour le laisser partir de cette manière. Heureusement, il avait remarqué, cachée dans un coin, une bouteille de plongée. Voila une bonne idée ! Et cela avait quand même plus de classe de trépasser asphyxié en prenant le temps de voir passer les poissons.
Croyez-vous qu’il me remercia, moi qui faisais dans l’humanitaire, exprès pour lui ? Quelle ingratitude ! C’est qu’il ne l’entendait pas de cette oreille, l’animal ; se débattant comme un démon, il refusait qu’on lui passe le masque, avant de le jeter à la flotte. Mais au bout d’un bon quart d’heure, nous avons eu gain de cause ; et plouf, un homme a la mer.
«Capelado », un prédateur pour femmes et enfants, de moins.
J’aurais dû recevoir une médaille pour mon initiative mais, protégé comme il l’était par des juges, politiciens et autres vermines, qu’auriez-vous voulu que je fisse, comme dit le proverbe, «qui se ressemble s’assemble », je n’avais donc plus rien à espérer. Notre nuit se fatiguait, et une dernière fois, tous ensemble, nous sablions le champagne. Dupa Grave, mon ami de tous les jours, pour m’avoir aidé, devait lui aussi en payer le prix et quitter cette terre qui était la nôtre.
« A-diéu-sias adessias », notre chère patrie. Ce dernier porta son choix sur les colonies d’Espagne de l’autre coté géographique de l’Océan Atlantique. Geronimo et Theodore, quant à eux, avaient décidé de s’associer. Malheureusement, alcool et affaires font rarement bon ménage. On les retrouva, un beau matin dans une chambre d’hôtel, morts dans leur sang, leur butin à coté d’eux, ils s’étaient mutuellement entretués. Le seul vrai rescapé de cette histoire fut le « nain » Malouin ; avec l’argent que lui avait rapporté cette affaire, il se maria au pays en épousant une grosse iroquoise. Avec elle, il eut trois beaux enfants, et récupéra ses deux précédents, terminant en patriarche à la barbe blanche, il vécut heureux jusqu'à cent-quatre ans, auprès de sa descendance.
Quant à Mourad Ben Sala, la police le rechercha sans conviction un petit moment mais, comme de toute façon peu de personnes étaient intéressées à ce que la vérité remontât à la surface, la morale de l’histoire c’est qu’on condamna sans preuve sa veuve à dix-huit ans de prison pour assassinat « présumé ». Que voulez-vous quand on épouse un « vermillon » pour son argent, on ne doit pas avoir peur d’en payer le prix, et puis avec une bonne conduite et quelques remises de peines elle en prendra juste pour huit ans, le temps d’apprendre a aimée les femmes.
Quant à moi, quelques heures plus tard, muni d’une nouvelle identité, je partis pour le cul du monde, dans une ville oubliée de tous, qu’on appelle « Le Havre ». En m’accompagnant sur le quai de la gare, Dupa me fit le plus beau des cadeaux en m’offrant ce à quoi il tenait le plus, sa petite chatte noire « mimine ». Et pour la dernière fois que nous nous vîmes, il me donna l’accolade. Quelques années plus tard, j’appris qu’il avait terminé sa triste carrière dans les Amériques, garroté et jeté dans la fournaise d’un volcan pour une arnaque qui avait mal tourné, « c’était également cela, les risques du métier » !
(A la semaine prochaine)
bonsoir, le havre n'est pas de paix, bon sang de bonsoir !!!
· Il y a plus de 14 ans ·gun-giant
Une fin classieuse a la Empédocle pour Dupa...
· Il y a plus de 14 ans ·gandalf989
MERCI A VOUS TOUS POUR VOS COMMENTAIRES
· Il y a plus de 14 ans ·Remi Campana
toujours aussi spécial loufoque et écriture haute en couleur, merci
· Il y a plus de 14 ans ·claudep
Sadique génial =:)
· Il y a plus de 14 ans ·lepoete-pouet-pouet
Bonsoir désolé pour le petit problème voici la fin de la page 4: le temps d’apprendre a aimée les femmes. Surtout un grand merci pour vos textes, bien a vous: R.C.
· Il y a plus de 14 ans ·Remi Campana
Bye bye Dupa!
· Il y a plus de 14 ans ·juecrivain