Lettre à l'enfant que j'étais

fionavanessa

Ecrire une lettre à l’enfant qu’on était

 automne 2006

 

Il y a des jours et des lunes que j'étais toi

Pour te retrouver

Je vais vers le plus léger

Réentendre ton pas leste.

Tu n'es pas mon avenir mais mon fondement,

Tu es le do de ma gamme

L'invisible au fond de moi

Car qui soupçonnerait que c'est toi

qui parles à travers moi

qui décides pour moi avec tes désirs inassouvis

Tu m'as tenu la main quand j'étais malade,

Heureux celui qui trouve un enfant à son chevet,

fût-ce l'ombre de celui qu'il fut…

Enfant timide ne t'effarouche pas de ce que je suis devenue

On ne peut pas se contenter de rêver la vie

mais la vivre aussi

avec ses petites morts ses désaveux ses abandons

Je ne sais plus comment tu fais

Pour croire aux fées

mais je m'évertue à permettre ce zeste d'aérien

dans mon devenir

Devenir

légère

de plus en plus

m'élever

voilà

mon souhait

jusqu'à

m'évaporer

comme neige

au soleil.

Pour vivre de l'air du temps,

se détacher du passé !

Sentir le vent sur ma joue, l'entendre dans les branches.

Voilà où tu te caches aujourd'hui

Dans ces petits plaisirs qui remontent à l'enfance

Dans ces bulles à merveilles,

ces poches d'air frais.

Enfant guide enfant chaperon

Aussi sûrement que le soleil se lève

Tu célèbres à chaque heure tes noces avec l'éternité

Tu sais humer la forêt aux senteurs d'écorce et de mousse

Tu sais voir les mûres tapies au creux du sentier

Et les sourires dans les yeux

Parfois je te fais défaut et pour me hausser

à ton niveau de danseur de corde raide

Je dois me conditionner me mobiliser

Sans grâce

sans âme

Pleine de cette gravité nullissime

Qui me cloue au plancher des vaches

Toi tu es l'histoire dont je suis le brouillon

Car en toi tout est possible où je tranche et flanche

Petit serpentin vivace

Avec quelle arrogance je parviens à t'oublier

Pour des sottises sérieuses

Mais l'essentiel est que tu te tiennes là,

droite comme un i,

à chacun de mes carrefours

Ma luciole du crépuscule

Crie chante danse vole d'arbre en arbre

Pour me rappeler à l'ordre

Et si d'aventure il te venait l'envie

d'étudier mes traits

d'écouter mon récit de vie

Tu devinerais, cachée sous les plis de chair,

Ton ancienne désinvolture,

ta dérision sous les rides…

 

Fiona

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