Lettre imaginaire (suite)

marivaudelle

Or donc, Monsieur, j'aurais senti que vous refusiez ces excuses,
Préférant attendre, voire espérer, qu'une fois encore de vous je m'amuse.
J'aurais eu l'audace et le courage et l'indécence de vous écrire l'intensité de ma ferveur.
Je n'aurais pas hésité, Monsieur, à répéter doucement, irrévocablement, la joie de mon cœur.
Je sais bien que vous n'auriez pas pu voir à quel point je rougissais, nue devant le miroir de vos yeux.
Ma jouissance, c'eût été d'être entre tes bras 
Pour te faire l'amour et pour nous aimer ici-bas.
Oui, Monsieur, je vous tutoie dans mes pensées
Tout comme je rêve que tu me tutoies sur tes genoux.

J'attendais que tes doigts parcourent mon corps 
Ma peau en frissonnait d'avance et ma rose d'or 
Eût été assoiffée comme au premier jour, de ton lys 
Un va et viens que j'attendais avec délice 

Entre mes doigts, tu aurais bandé à n'en plus finir 
Pendant que tu aurais bu amoureusement mon élixir 
Oui ! Dans un parfait soixante-neuf, nous partions 
En osmose comme le plus beau des dons.
 
Non, Monsieur, je ne vous tiens pas vraiment rigueur de m'avoir insufflé cette envie
De savourer et boire votre sperme en écoutant votre cœur battre comme un tambour.
Mais je suis colère que tu te joues de mes folles envies, celles que tu m'as inséminées.
Je suis colère d'être sevrée de tes mots, de tes désirs, tu en joues
Et c'est pourquoi, Monsieur, me brûle les paumes l'envie de vous fesser.
Et de franchir toutes les portes fermées.
Et de vous faire alors languir à votre tour.
C'est pourquoi je me tais.
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