L'oie blanche

hecate_xiii

On lui donnerait le bon Dieu sans confession,
Un ange pur, l'innocence incarnée.
A l'inverse on me fait passer pour un démon,
Avec blondeur, candeur, fragilité.

C'est un serpent déguisé en oie blanche,
De jolies plumes masquant les écailles.
Elle l'hypnotise en roulant habilement des hanches.
C'est un varan dont la langue est fatale.

C'est une image d'Épinal,
Le sourire enjôleur plaqué sur le visage.
Les dents dissimulées luisent, se plantent et font mal,
À mes souvenirs, à notre amitié d'un vieil âge.

Je l'ai moi seule introduite dans ma bergerie,
Je la lui ai amenée sur un plateau d'argent.
Je l'avais pressentie et même espérée pour lui.
Elle a pris ma tête, lui a servie ornée d'une pomme entre les dents.

C'est un animal blessé,
La meilleure défense est donc l'attaque.
Elle pense l'étendue de son territoire menacé,
Alors elle crache, elle pare et attaque.

C'est une fleur bleue vénéneuse.
L'insecte fut séduit et en bois le venin.
C'est un élixir toxique de tubéreuse,
L'esprit, embrumé, se croit libre et serein.

C'est une gondolière qui a habilement mené sa barque,
Sur les flots tumultueux de mon sang versé.
C'est une fossoyeuse qui règne en énarque.
Elle danse secrètement sur ma tombe sur laquelle elle a déjà craché.

C'est une fabricante de bicyclettes.
De petits vélos bien montés,
Qu'elle a installé insidieusement dans Sa tête.
Elle le laisse pédaler, gravir des sommets de crédulité.

C'est un vampire qui a planté ses crocs empoisonnés,
Elle l'a enivré d'endorphines, l'a purgé de sa loyauté.
Elle a dissipé notre complice fraternité.
Avancé à la barre la présomption de culpabilité.
C'est une marionnettiste habile pour un jeu malsain.
Il croit mener sa vie, devient quelqu'un de bien.
Le ventriloque au phrasé assassin,
Un fil dans chaque main active le pantin.

C'est une illusionniste.
Faire coller la réalité à l'image souhaitée.
Se débarrasser des témoins d'un passé fautif.
Faire disparaître les preuves qui pourrait l'accabler.

Je me suis donc retirée pour panser la plaie béante dans mon coeur.
Je conserverais au moins l'équilibre puisque le combat est vain.
Je n'ai pas les armes, c'est perdu d'avance pour l'heure.
Alors j'attends, à l'ombre, qu'oeuvre le destin.


Hécate XIII. Le 11 juillet 2014.

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