Les femmes, la cerveza et l'espoir

Une nuit d'été. Une milònga. Un jupon qui virevolte et dévoile des jambes dorées par le soleil. Une paire d'escarpins à talons rouges rythme la cadence. Ils suivent amoureusement une paire de chaussures noires pour homme. Ils ne font qu'un. Une odeur de transpiration se mêle à celle des dulce con queso. Des couples de tous âges enlacés. Dans la misère teintée d'une douce mélancolie, les habitants dansent la vie. Un vin rouge puissant et fruité coule dans leurs veines. Il a accompagné le fameux asado du dîner, une grillade de différents morceaux de viande allant du chorizo aux abats. Une viande avalée très cuite, pour ne pas dire cramée, avec des lentilles et des haricots rouges. Des vêtements qui sentent encore la fumée. Et l'herbe, et les vaches. Et l'essence aussi.

Une crèche toute simple trône dans un coin de la salle de bal, en l'honneur de la Difunta Correa de San Juan. Saints populaires aimés du peuple, le culte des santos a cours partout dans le pays. On peut tout leur demander, leurs actions sont miraculeuses.

Il y a tout ça dans l'album "Mi noche triste". L'Argentine pauvre et joyeuse. L'Argentine lente et généreuse. Un monde en soi. Et Carlos Gardel qui pleure "Almagro" de sa voix suave et vibrante. L'écouter pour rire, pour pleurer, pour voyager, pour danser, pour penser et aussi pour rien. Parce que c'est le plus grand musicien français de tango de tous les temps.

(10/10)