Même la mort...
arkhaam
Je n'ai pas vu de tunnel, pas de lumière blanche, apaisante, aucune main amicale et tendue censée m'aider à me relever, tout ça n'est qu'un vulgaire et pathétique ramassis de conneries, d'ailleurs je ne pensais vraiment pas ressentir quoi que soit. En réalité, il fait sombre, très sombre, l'air est froid, glacé et j'ai mal, il y a cette terrible douleur qui me parcoure le corps, sans répit. Je tente de me repérer, le sol est lisse, on dirait du marbre, aussi dur, aussi froid, je tend l'oreille, d'étranges murmures traversent les lieux, des plaintes lugubres. Il y a aussi ce courant d'air, un souffle malsain, désagréable qui s'amuse à rebondir sur moi, qui tente de glisser sous ma peau. Des sons malheureux, des pleurs étranges, enfantins s'engouffrent dans ma tête, j'ai mal, c'est terrible.Je pense à elle, je regrette, je n'aurais jamais du sauter, elle me manque même dans la mort, j'ai le sentiment de crever encore et encore, que c'est devenu un cercle vicieux et que je n'ai plus qu'à me battre contre ces images qui me poursuivent, qui ne veulent que ma peine et ma souffrance. Je cherche à comprendre où je suis, si je peux sentir, penser, ce n'est pas pour rien, si la mort s'amuse avec moi, il faudra bien qu'elle se montre, à un moment ou un autre. Je n'ai pas peur, je suis prêt à me battre, je suis près à tout pour retrouver celle que j'aime et c'est drôle car je réalise à quel point j'étais sérieux lorsque je lui avouais que je l'aimerais jusque dans la mort. Mes sentiments pour elle restent mon essence, mon bien, ma force ultime, son image est plus présente que jamais et si elle est en moi avec une telle intensité, alors il ne peut rien m'arriver, je dois sortir, me tirer, je dois faire face et montrer à la salope qui me tient enfermé ici qu'elle risque d'avoir du mal à me garder, à m'abattre, je suis plus fort, plus malin. J'ai beau faire tous les efforts du monde, je n'y vois rien, il n'y a que ses sons répugnants qui tentent de me faire mal, de s'enfoncer dans mon crâne, je crois bien entendre les cris de toutes les âmes qui sont coincées ici, qui n'ont pu s'en sortir, elles pleurent, m'implorent, me supplient de les aider. Mais moi je n'ai que ma fée merveilleuse à l'esprit, elle est mon guide, mon combat, si je perds son image je ne m'en sortirais pas, ô mon amour, ne m'abandonne pas. La douleur est trop forte, je me suis couché sur le sol et un frisson mortel me traverse tout entier, j'ai l'impression de me noyer dans un lac de glace. Je croyais que l'enfer était brûlant, je n'arrive plus à réfléchir, je ne dois pas, je ne peux pas abandonner. Ca fait un mal de chien mais j'arrive, péniblement, à me relever, d'abord sur les genoux, ma main sur la poitrine sert mon coeur, je dois lui rendre sa force, alors je serre, fort, plus fort et je hurle, de douleur, de rage ou de folie, je crie son nom, je crie comme je l'aime, comme je suis prêt à crever le premier qui se mettra sur ma route. Je suis debout, je retiens mes larmes, la douleur semble s'estomper et l'obscurité également. Ce que je découvre, peu à peu me stupéfie, on dirait bien que je suis au pied de l'immeuble d'où j'ai sauté, je n'ai pas bougé et j'ai pourtant le sentiment de vivre ce cauchemar depuis des heures, je ne comprends rien, ne devrais-je pas être aux portes de l'enfer? Mais peut-être est-ce là mon enfer, devoir vivre, revivre éternellement mon erreur, devoir subir ma propre honte, celle d'avoir sauter, d'avoir abandonner mon unique amour? A cet instant une terrible douleur me ravage le corps, me disloque le crâne, je crie, je hurle et cette fois mes yeux pissent des larmes de sang, de mes oreilles, de mon nez aussi coule un épais liquide rougeâtre, ma bouche est pleine d'un goût de rouille, je crache, je tousse, j'essaie de faire disparaître cette terrible sensation, je passe mes mains sur mon visage, comme si je devais faire fuir une armée d'insectes et la peur remplace, soudain, la douleur. Quand j'ouvre enfin les yeux, il n'y a plus rien, plus de sang, plus de douleur, juste cette peur intense qui fait battre mon coeur à une vitesse impossible, oui mon coeur, je peux le sentir, il résonne dans tout mon corps. Je réalise soudain que je suis sur le toit de l'immeuble, un épais brouillard s'est levé, les voix se sont tues, je ne ressens plus de douleur. Je regarde autour de moi, je lève les yeux au ciel et puis plus rien, le néant? La mort, enfin? J'ouvre les yeux, je suis allongé dans un lit, ma princesse est assise sur le bord et me regarde, ses larmes envahissent son sourire et ce dernier prend le dessus. Elle est là, elle m'explique par quel miracle j'ai survécu à la chute, comment après avoir rebondi j'ai brisé une vitre quelques étages plus bas pour me retrouver à l'intérieur d'un appartement. Un appartement innocupé, grand, vide et froid avec du marbre au sol dans la pièce principale. J'ai envie de rire mais ça me fait mal et puis j'ai envie de pleurer tant je suis heureux de sentir sa main dans la mienne. Une chose est sûre, personne ne m'enlèvera à ma bien aimée, personne, pas même la mort.
la vie est trop précieuse pour se foutre en l'air. les plaies sont faites pour être recousues.
· Il y a plus de 11 ans ·pas facile à croire quand on est en sang, et pourtant.
Karine Géhin
Vous me tentez?? Des plaies j'en ai à plus savoir qu'en foutre, si le coeur vous en dit...
· Il y a environ 12 ans ·arkhaam
Trop tard : j'avais tout épongé. Je déteste le bordel sur le trottoir. De plus, les amas gélatineux sont glissants, quelqu'un aurait pu se péter une jambe !
· Il y a environ 12 ans ·Même sans cervelle, vous avez posté une prose vibrante, touchante, émouvante. En espérant que votre princesse ne lâchera plus votre main, cette fois-ci. Autrement, faites-moi signe : je panserai vos plaies. Ah, j'oubliais : bienvenue chez les morts-vivants !
simul-acre
Avec l'espoir que Simul Acre me refoutra ma cervelle dans le crâne...
· Il y a environ 12 ans ·arkhaam