Mémorable

Encore une soirée trop alcoolisée. Tous les deux on rigolait bien. Tu m'as pris dans tes bras pour me faire danser et je me suis laissée emporter. Sous les lumières colorées et aux yeux de tout le monde, nous nous sommes embrassés. En fermant les miens je les ai tous oubliés pour ne plus sentir que tes mains, ta langue, ton front contre le mien et nos pas hésitants. Nous avons plongés dans une faille temporelle et j'aurais aimé qu'elle soit éternelle. Mais la séparation était inévitable. Et il était difficile de retrouver cette complicité. Parce que notre moment privilégié était terminé. 

Un garçon ce même soir m'a dit que les gens sont des moutons qui se déplacent en groupe pour boire, danser, et profiter de quelque chose qui est forcément éphémère. On n'assume pas mais on le fait quand même, parce qu'au final, c'est une des seules occasions qui nous permet de toucher le bonheur du bout des doigts, même si c'est d'une manière aussi factice. Les sorties comme celle-ci n'ont pas d'intérêt parce que le lendemain on ne se souvient plus de rien. 

J'étais d'accord avec lui, mais cette dernière phrase est fausse; je me souviens très bien de toi, je ne pense même plus qu'à ça. Quand je te reverrais, tu auras sans doute oublié. Ou alors tu n'y accorderas pas d'importance. C'était l'histoire d'un soir, voilà tout. Les autres pensent cela aussi. Mais je ne suis qu'une pauvre sentimentale qui croit que lorsqu'on entre dans l'intimité d'une personne, c'est parce qu'il y a un minimum de sens derrière. Mon esprit a toujours besoin de vagabonder et d'imaginer plus, sans que je puisse le brider. La conséquence d'une solitude insidieuse ? Même quand je suis censée n'en avoir rien à faire et passer à autre chose, je ne peux pas. Car je me soucie de trop de choses, même les plus insignifiantes, tout le temps.