Métaphysique

Hervé Lénervé

D’où parlons-nous, nous ?

« Je me faisait chié. » Oui, je sais, j'aurais pu écrire tout simplement je me morfondais en ce matin morose ou bien être plus cru, comme je le fus.  Le fait est, que me morfondant, j'exprimais à haute voix, ma langueur en regardant tomber la pluie en cascade sur les vitres de ma véranda, comme si j'étais dans une cabine de douche dont un plombier fallacieux aurait raccordé l'alimentation en eau à l'extérieur. « Quel temps de chien »… soupiré-je de lassitude.

-         Je ne vois pas en quoi on peut nous comparer à un temps de merde

-         Pardon ?

-       Oui ! Qu'avons-nous de comparable à un temps maussade ?

-         Je regardais mon chien qui me regardait.

-         Tu parles, toi, maintenant ?

-         J'en ai le droit, si l'envie m'en prend.

-         Mais les chiens ne parlent pas, c'est ainsi !

-         Ça, c'est bien vous, les êtres humains, vous décidez des choses comme cela. Comme cela, vous arrange et après vous en faites des lois.

-         Mais pas du tout, c'est simplement basé sur une observation empirique des choses, les chiens de tout temps n'ont jamais parlé.

-         De tout temps, peut-être, mais par temps de pluie, on parle.

-         Et que dites-vous, alors ?

-         On dit qu'on se fait chier, mais sans faute d'orthographe, car sans vouloir me montrer cavalier, on est  très à cheval, sur ce principe.

Le pire était que je discutais avec Zébulon, c'est son nom, sans que cela ne me surprenne plus que cela. C'était dingue qu'un chien parle et plus  dingue encore de converser avec lui, le plus naturellement du monde, comme si tout cela n'était que banalité quotidiennes. Nous sommes si étranges, nous, les hommes, qu'il n'était, peut-être, pas tant que cela, finalement, que les chiens parlent. J'étais donc ainsi dans mes réflexions intimes, quand un intrus s'invita chez moi… en moi… dans ma tête.

 « Ne l'écoute pas Hervé, il ne dit que des inepties. »

C'était la voix de mon chat. Je n'avais jamais entendu mon chat parler, encore moins penser, pourtant je le reconnus sans aucune hésitation. Il était entré dans mon esprit et il en profitait.

« Ne t'inquiète pas Zébulon est si bête, qu'il ne peut nous entendre penser. A se demander s'il pense, seulement…»

« Il parle, donc il pense ! Pas de langage sans pensée conceptuelle. »

« Je dirais plus à l'instar de Roland Barthes : il ne parle pas, ça parle et d'où parle-t-il, ce cabot ? Surement pas de lui, il n'en a pas les compétences. Il se retrouve doté d'une performance qui le dépasse. Il n'est pas maître de sa parole. »

« Je te trouve dur avec lui, la petite conversation qu'il m'a tenue me paraissait sensée et cohérente. »

« Ne te laisse pas manipuler ! Ce n'est qu'un vernis, comme un perroquet, il répète sottement des phonèmes appris par cœur, il imite le langage, les intonations du langage, mais ce n'est pas du langage, car le sens, lui échappe totalement. C'est un simulateur-imitateur, te dis-je ! »

« Et toi, tu ne discutes jamais avec lui ? »

« Je n'ai pas de temps à perdre avec un abruti. »

«  Je suis déçu, je croyais que vous entendiez bien. »

« Comment pourrait-on s'entendre avec  une bestiole qui confond Nietzsche avec un éternuement. »

«  Tu as lu, Nietzsche ? »

« Evidement ! Et Kant et Heidegger et… »

« D'accord, d'accord ! Tu es un érudit, en quelque sorte, c'est ça ! »

«  On peut le dire ainsi, oui ! Je suis un intellectuel. »

«  Ne faut-il pas avoir écrit une  théorie quelconque, pour être considéré comme un intellectuel ? »

« Le Christ n'a jamais rien écrit et n'a-t-il pas produit une rupture épistémologique qui allait bouleverser le monde de la pensée et le Monde en son entier ?»

«  Les religions sont à part, ce sont des principes moraux de vie, pas une philosophie. »

«  Mon Pauvre ami, tu n'es qu'au balbutiement de la réflexion métaphysique. Aurais-je assez de sept vies pour te dégrossir. »

« Ne sois pas présomptueux, condescendant et pédant ! Tu n'es que mon chat ! »

«  La pédanterie est une notion spécifiquement humaine, je suis bien au-delà de tout cela, je suis la Sagesse incarnée. »

«  Comme un ongle, alors ! C'est cela, ouiiii ! »

«  L'ironie ne me touche pas, elle ne touche que les sots. »

***

J'aurais aimé continuer cet échange instructif avec mes bestioles, malheureusement tous les sédatifs qu'on m'injecta, me privèrent de toutes réflexions. Je dus me rabattre à écouter le plafonnier de ma chambre d'isolement capitonnée.

« Ecoute-moi, Hervé ! Je serai ton seul soleil pour marquer la circonvolution des astres, à présent, je serai ton jour, ta nuit pour le restant de ta vie. »

Il commençai tous à me fère chié in max, les éléments élémentères en ce putain de jour deplie !

  • je ne dirai qu'un mot "ouaf"

    · Il y a plus de 6 ans ·
    A2028be258fa09b6ca3502cf9ed7c645

    Mabelschronics

  • Chez moi il fait un peu frisquet mais le soleil brille alors je cherche à traduire une poésie arabe pour la chanter ce n'est pas gagné !

    · Il y a plus de 6 ans ·
    1338191980

    unrienlabime

    • Pour la chanter dans quelle langue, canine ou féline ?

      · Il y a plus de 6 ans ·
      Photo rv livre

      Hervé Lénervé

    • Celle des cigales!!!

      · Il y a plus de 6 ans ·
      1338191980

      unrienlabime

    • Sérieux je chante dans les 2 langues.

      · Il y a plus de 6 ans ·
      1338191980

      unrienlabime

    • Bravo l’ami ! Moi je suis une fourmi, je ne chante pas, je bosse, ne vous déplaise. C’est faux of course, je suis guitariste des dimanches, mais je ne chante malheureusement qu’en français et en anglais et la plus part du temps je ne chante pas, je joue.

      · Il y a plus de 6 ans ·
      Photo rv livre

      Hervé Lénervé

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