Mon âme-soeur

audreyaufildespages

Participation au concours "Le Logement Parfait"

Lorsque les gens pénètrent chez moi pour la première fois, ils ont toujours la même réaction: leurs yeux s'écarquillent de surprise, puis un sourire s'étale sur leurs visages. "C'est tout à fait toi ici!" ne manquent-ils pas d'ajouter. Et c'est l'incroyable vérité: je suis le contenu, mon logis est le contenant et tous les deux, nous nous fondons comme un tout harmonieux et indissociable. Nous nous sommes cherchés longtemps, chacun de notre côté, espérant au gré des rencontres, formulant le souhait à chaque échec de "bien tomber" la prochaine fois. Mais il faut se rendre à l'évidence: trouver LA maison de sa vie – ou l'Habitant de sa vie – cela fonctionne comme une histoire d'amour et il n'y a jamais vraiment de hasard, juste deux histoires qui se croisent lorsque les protagonistes sont arrivés au terme de leur apprentissage et possèdent en eux tout le recul nécessaire pour apprécier et reconnaître ce que l'autre a à leur offrir.

Cette rencontre nous la devons à un agent immobilier un peu particulier. J'ai découvert son établissement par hasard en me promenant dans la vieille ville. Il faut dire que j'ai un goût prononcé pour les petites ruelles, les recoins, les impasses, j'adore m'y enfiler et imaginer y trouver quelque chose d'extraordinaire. Quoi je ne sais pas, mais c'est là tout l'intérêt de la surprise. Et ce jour là, j'ai trouvé... une agence immobilière. Positionnée comme elle l'était, elle ne devait pas attirer la foule. D'autant qu'aucune annonce ne s'affichait sur la vitrine. Une simple enseigne en bois annonçait à qui nous avions affaire: Agence immobilière Cupidon. Un nom d'agence matrimoniale plutôt. Amusée, je suis entrée. A l'intérieur un homme sans âge et débonnaire m'a reçu. Comme si nous avions rendez-vous, il m'a fait m'asseoir, m'a posé quelques questions et sans m'en rendre compte, je lui ai tout dit de moi: mon amour des livres et des chats, ma situation personnelle, seule mais heureuse ainsi, mes passions, mes aspirations, tout y est passé. Au bout d'une demi-heure, il a sorti une carte de visite de son tiroir, y a noté une adresse et me la tendue en disant "à demain".

Le lendemain, intriguée et excitée par ce qui ressemblait à une mystérieuse aventure, je me suis rendue à l'adresse indiquée. Devant moi, un muret, un carré d'herbe soyeux et une petite maison en pierre dont une belle porte peinte en bleue avec une poignée dorée en son centre marquait l'entrée de ce havre de paix. Mon cœur rata un battement puis se mit à battre frénétiquement. Je franchis le portillon et m'avançai vers la maison. Un jeu de clé m'attendais, posé sur le paillasson. A ce stade, je compris que plus rien ne devais me surprendre. La porte s'ouvrit doucement et je découvris l'intérieur: Une entrée étroite agrémentée de trois patères et un petit banc en bois menait à la pièce principale baignée de lumière. Le sol était recouvert de lames de parquet en bois clair et les murs étaient peint en blanc sauf le pan de gauche sur lequel courait sur toute sa longueur une bibliothèque chargée de livres. Une échelle à roulettes permettait d'atteindre les volumes les plus haut. Un magnifique bow-window avait été aménagé avec des coussins aux coloris clairs et de beaux rideaux. Un soupir d'extase m'échappa. Je m'imaginais déjà, installée là, alternant la lecture d'un roman passionnant et de temps en temps, laissant mes pensées s'évader vers le paysage que m'offrait l'extérieur. A droite, une cuisine minuscule mais fonctionnelle, flanquée d'une table, de ses chaises et d'une enfilade, achevaient la composition de la seule et unique pièce du rez-de-chaussée. Un escalier discret en colimaçon menait à l'étage qui était composé d'un WC, une salle de bains dans les tons gris et rose joliment désuète avec sa baignoire à pattes de lion et une toute petite chambre contenant en tout et pour tout un lit recouvert d'un épais édredon invitant au farniente, une table de chevet surmonté d'une lampe un brin baroque et une belle armoire ancienne avec sa serrure en fer forgé. Le claquement d'une porte me ramena à la réalité. Un peu confuse d'avoir mené la visite seule, je me précipitai pour venir à la rencontre de l'agent immobilier. Cependant, personne ne se trouvait en bas. A la place, je découvris sur la table un stylo, une feuille de papier qui s'avéra être un contrat de bail et un petit mot : "Vous êtes fait l'un pour l'autre, signez ! ". Obéissant à l'injonction avec un sourire lumineux, j'apposai ma signature en bas de la page.

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