Monsieur
Louise Moia
Monsieur, j'ai bien reçu votre bouquet de roses charmant,
et ce petit chien curieux qui vient, dites-vous, de l'île de Man,
Je vous en remercie vivement, mais Monsieur, Votre comportement !
Comment vous le dire, en peu de mots, et en ménageant votre peine,
Tout nous oppose Monsieur, Tout ! et vos attentes seront vaines.
Monsieur, je reste encore toute abasourdie de vos projets grivois,
Nous ne nous sommes rencontrés qu'une seule fois,
A ce bal trop masqué où mes yeux céruléens disiez -vous, firent votre émoi,
Votre désir de voyage est-il né de ma gorge profonde ?
Est-ce à dire que la seule vue de mes appâts rendent votre âme vagabonde ?
Monsieur Le Corsaire, vous me promettez du bleu multicolore,
un horizon infini sans rivage, et l'odeur de l'océan pour seul décor,
vous ne voulez plus pour monde que mon lit rehaussé de linge d'or,
Et pour servir nos ébats, la houle lente du large, douce et câline,
Et m'offrir sans partage les quatre vents et les amours clandestines.
Monsieur, vous ne m'enlèverez jamais à mes salons et à ma position,
Vous ne ferez jamais de moi une sauvage oubliée des Iles de Bourbon,
Devenir la figure de poupe de votre cabine n'est pas dans ma condition,
Souffrez ! Monsieur, que je vous le dise, votre esprit a le mal de mer,
Souffrez ! Monsieur, que je vous le dise, votre cervelle est à l'envers !
Ah ! Monsieur ! Je crépite encore sous les assauts de vos railleries,
Alors si vous en avez encore le courage, mon ami,
Venez donc dans mon boudoir à cinq heure et demie, la femme de chambre est sortie.
Il me plairait de me frotter à vos arguments si plein de déraison,
Et de sentir toute proche la dureté de votre motivation.