Mort d'un lapin rose.

Simon Raket

Je ne sais pas pourquoi, mais ma femme a toujours attaché une importance particulière à son heure de naissance. Elle a toujours considéré que son anniversaire, c’était le 19 novembre à 00h42.

Précise, ma femme.

Pas 43 où 41, non.

42.


À minuit moins dix, en rentrant du boulot, tout le monde était déjà là.

Moi je suis rentré par le garage, histoire qu’on ne me voie pas, et j’ai monté l’escalier.

Par la porte entrebâillée du salon, j’ai vu un Superman que j’ai pas reconnu, qui discutait avec une statue de la liberté grassouillette qui semblait être Sylvie. Peut-être Monique.

Indeep, à fond. Last night a DJ saves my life.

J’ai profité du fait qu’ils me tournent le dos pour traverser le couloir en tapinois, mon costume à la main, et je suis entré dans la salle de bain.

Ridicule, le costume.

C’est bien parce que c’est son anniversaire.

Prendre une douche, en vitesse.

Freak out ! Le freak, c’est Chic, derrière la porte.

Me sécher, passer un slip, puis enfiler ce truc.

Je vais crever de chaud, là dedans.

Et là, la savonnette.

Mes pieds qui glissent sur le carrelage,

poc !

Ma nuque sur le bidet, et puis cette flaque épaisse, sombre et collante comme du sirop d’érable.

J’ai l’air d’un con dans mon costume de lapin rose.

Surtout que j’ai pas eu le temps d’enfiler le bas.

Je suis en train de mourir comme un con.

Sur le carrelage, si froid, j’entends Jean-Claude qui raconte une blague sur les blondes.

Et SugarHill Gang.

Rappers Delight.

Je me demande combien de temps il leur faudra pour me trouver.

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