Nature noire

Ce sentiment étrange qui somnole au large de mon esprit.
Cette partie de ma tête, ce défaut, cette surface vallonnée.
Savoir que l'on n'est qu'un morceau de chair parmi tant d'autres.
Voir son squelette qui marche et l'épaisseur des peaux qui fusionnent, s'entortillent et explosent, en lambeaux.
Je suis dans la rue et me dis que les personnes croisées ont mille histoires dans le ventre, mille préoccupations, mille défauts.
Et le tout ne forme plus qu'un tas.
Tous ces flux de pensées ne sont que des illusions qui tanguent en cadence sous la peau. Toutes les peaux.
Me vient alors l'atroce vérité, qu'un jour le monde s'éteindra dans l'ombre, et que les flux s'évaporeront. La chair elle-même ne sera pas épargnée.
On oubliera comme on oublie la consistance d'une pierre, d'une plante, d'une naissance.
Jetez par terre toutes les pensées d'un homme et voyez-le d'en dessous. Moi je suis un serpent qui zigzague dans ses intestins.
Je lui tords les os. Vous entendez les bruits ? Ces craquements.
Naturellement.
Et le corps de votre proche qui perd soudainement vie et s'écroule par terre, devant vous.
C'est vous qui portez les os.
Et cette milliseconde qui oppose l'avant à l'après.