Nuées optiques

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A J.

Non loin de la frontière florale, le cadre d'un prochain tableau : ta fenêtre. Tu demeures à contre-jour.       Caché. Je ne te vois pas. Je dois, encore, t'imaginer pour t'imager et te donner un corps.

Tu crois sûrement que l'oiseau s'est envolé librement jusque dans ton antre. Oh, non…

L'oiseau est chant de violon. La mélodie est messager à la lyre. Et ce piaf a l'hymne amoureux et la lyre qui le démange. Il t'apporte un modeste présent : le fruit d'interrogations passionnées…

 ***

Mon âme à demi, à quoi ressembles-tu ?

Es-tu rejeton de la Terre ? du Soleil ? de la Lune ?

Qu'importe, tu te situes très certainement ailleurs… Comment pourrait-il en être autrement, petit désir cristallisé ?

Si loin de mon chevalet et de mes doigts qu'il me semble ne pouvoir avoir accès à ta tour d'ivoire que par cet escalier aux marches de vapeur. Vertige amoureux. Une brise grincheuse au bonnet gris grogne fort. Tout s'envole. Grogne encore. Les rideaux jaunis se croisent, s'emmêlent, divisent ta silhouette obscure. Visage double. Chambre double. Qui es-tu ?


***


La lyre du rouge-gorge hurle et gémit en échos.

Je me projette en opinions fantasmagoriques. Le dos tourné, trois pas, les tubes de peinture à la ceinture – la balle du revolver-passion est dans mon camp. Les sifflements violonistes font le décompte. Tu ne bouges plus. Tu attends. Non, tu poses ? Parfait… J'y suis presque. Plus que… une âme en mémoire. Une tâche noire sur la toile. Qu'est-ce que c'est ? Un papillon ? Un épouvantail ? Echec. L'âme est la condition première de ma peinture. Perte. Manque. Frustration.

 

Comment puis-je boire à ta bouche brumeuse l'or liquide de ton calice ? Ah ! J'enrage…

Prête-moi tes yeux pour que je puisse te lire, prête-les-moi juste un peu, pour que je puisse te comprendre.

 

***


Vision double, comme chez Paul, les vers, sous ma plume, sont de coton ou de laine, tantôt doux et sensibles, tantôt transpirants et vieillis.
Vision double, comme chez Paul, les rimes, dans ma tête, sont féminines comme Mathilde, masculines comme Arthur.

 

Regard perdu, témoin quelque peu censuré par l'effet de sourdine et la discrétion d'une identité sexuelle troublée et à rechercher ? Oh non !

En déplaise à Sigmund et ses comparses prétendus, simple reflet d'une identification trouble des sentiments qui ne s'apaise que dans la multiplicité expressive. Car, oui, le "je" est ici - espace relatif du texte - une construction par effets lyriques et par interprétations du lectorat. Car, oui, le "je" est fictif bien que lié dans un (Le) premier temps à la réalité de l'auteur - à l'origine d'une démarche de création textuelle quelle qu'elle soit - et à sa vie affective dans une certaine mesure. Quoi de plus savoureux que de cuisiner avec ironie, recul et bienveillance une théâtralité des affects, un jeu de piste, une histoire au sens premier d'enquête ?

Tout relève du pacte de lecture. Et pourtant, rien n'est moins authentique ou sincère que la démarche. On ne méprise pas. On ne triche pas. On ne ment pas. Vous nous croyez. Ou plutôt vous interprétez en télescopant les rideaux de scène et les diverses opinions.


Alors, je vous en prie. Après vous, vous pouvez signer. Vous savez dans quoi vous vous engagez. Dans Fantasia, mon monde des possibles.

Un monde où tout le monde peut penser, ce mythe androgyne, ou bien autre chose.

Un monde dans lequel il m'est permis de te peindre en point rouge du levant imprimé en reflets si cela me plaît – bien que la formule soit longue et peut-être un peu lourde - et par lequel je peux dire :  « j'aimerais tellement que le mot "tolérance" n'ait plus à exister ».

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