Offre-moi tes larmes

Quoi de plus beau qu'une larme qui coule,

à la manière d'une perle vite emportée par la houle?

Si douce est la vision d'un être qui laisse,

s'exprimer tant d'amour dans un seul geste!

Qu'est-ce, une larme, si ce n'est un ultime serment,

à celui qui fut tout, avant d'être cueillit par le néant?

Une larme, c'est une promesse inscrite en lettres d'or,

une marque encrée, laissée par les morts,

c'est le langage muet et secret des plus forts,

un présent d'une douceur de rosée à l'aurore.

C'est lorsque le rire écrase le chagrin et longe avec tendresse ton visage,

c'est lorsqu'au cœur de la nuit de tes jours, la rage se change en orage,

c'est un geste éternel, mais si fragile, si furtif!

Quelque chose de si déchirant, si bouleversant, si inoffensif,

c'est l'âme qui, alourdie par une infinie détresse,

lâche tes cils comme un naufragé lâche son radeau,

pour épouser les contours de ton regard et laisse,

en disparaissant, une trace scintillante d'étoiles sur ta peau.

Pleure, pleure pour éclairer ma route, que ma chute

soit plus douce que ma vie d'interminables luttes!

Pleure, et que tes larmes soient des soleils

illuminant mon âme. Eblouie pour moi l'ange de la mort,

afin qu'elle et tous ses esprits défunts s'émerveillent

dans un éclair luisant de ce que tu m'offre encore,

une dernière fois, car cette eau de vie qui m'enivre,

seras mon dernier, et ô combien sacré vivre,

avant mon voyage où la faucheuse viendras m'étreindre

sans pouvoir jamais tes lumineuses larmes atteindre.