Paraphraser

Paraphraser un texte jusqu'à le plagier, non ce n'est pas ce qu'on nous demandait, il fallait expliquer, prendre du recul y avait tout un processus à suivre, pourquoi j'écris ça, envie d'écrire mon propre texte, avec sa musique et tout et tout, un texte à la Thiéfaine, "La ruelle des morts", "les dingues et les paumés", encore et encore, j'y arriverai pas, pas assez de recul, ou peut-être pas de talent pour les écorchures et les "fêlures". Reprendre une chanson à l'heure où les lycéens tout de noir vêtus déambulent en direction de la boîte à bac, ou à souffrance, portable en poche ou en main, ils voient défiler leur vie sur leur écran, en numérique, pas assez de folie ou trop justement, avec leurs copains et leurs copines, face souriante parfois hilare, ils écrasent leur stress et leurs angoisses d'un coup de "Nike air" sur le bitume de leurs seize ans. Insultes et pacotilles sur les réseaux sociaux, peut-être un lieu commun, un sang froid coule dans leur veine, pas assez de compassion, beaucoup de solitude face à la vie en virtuel.

Non décidément je n'ai pas assez de talent, manquent la musique, la frénésie des réseaux sociaux, pourquoi j'ai une boule froide dans le ventre, des stéréotypes tout abîmés sur la vie, les jeunes, je suis ce que je vois ai-je lu aux beaux-arts, un peu de philo ça ne fait pas de mal, je connais un ado qui aime ça la philo, non les ados ne sont pas tous pareils, certains ont dans le coeur, ce petit rien qui les rend spéciaux, pas pareils que les autres, ils s'intéressent à tout, posent des questions, cherchent à savoir le pourquoi des choses, de la vie. Non mon texte n'est pas un écorché vif sur la branche, il déploie ses petites ailes sur un monde qu'il croit posséder, souhaite survoler les océans, mais y a qu'une mare aux canards sur le chemin de l'école.

GPS et géolocalisation, tristes mots froids qui résonnent dans leur drôle de cerveau pas comme les autres, ils se souviennent à peine de ce qu'ils ont fait la veille, tant d'heures passées sur leur portable ou leur tablette, sont-ce encore des stéréotypes froids et ridicules? "Tomber du ciel" chante Higelin, il a écrit des trésors, des pépites qu'on compte sur les doigts d'une main, enfin c'est ce que je pense, mais ce que je pense, je le tisse sur un écran blanc neige, et j'imagine ces paysages d'hiver en montagne ou à la campagne, et ça me fait rêver. A quoi rêvent les jeunes, les gens debout, à genoux, ceux qui avancent à plat ventre comme au champ de guerre. Je suis obligée d'arrêter là ce texte, de peur que mon ordi froid comme le sang d'un boa ne s'arrête brusquement, brusquement.