Périple miniature

Slimena

Cette œuvre a été écrite suite à un défi avec une amie ; Uneasy. Le mot du thème n'a pas été cité dans le texte, peut-être le trouverez vous.

La camarade face à moi s'arrêta sans crier gare avant de se tourner et de me regarder de ses petits yeux noirs rapprochés. Je m'étais cognée à elle, m'écrasant la face contre son bouclier noir luisant qui était sur son dos. J'entrepris néanmoins de ne pas montrer mon mécontentement et de comprendre l'étrange sentiment de paix qui semblait l'envahir alors que son comportement démontrait une panique naissante ; ses bras tremblaient et son corps était parcouru de légers soubresauts. C'était toujours comme cela avec cette sœur-ci, elle ne savait pas exprimer correctement ses sentiments, m'induisant ainsi la plupart du temps en erreur. Elle hocha gravement la tête avant de me désigner de son fin bras foncé une montagne d'écorce et de bois pourrie. Ce dominant floral-ci terminait tranquillement sa vie nu alors que ses congénères étaient resplendissants, rejetant leurs branches bourrées de feuilles d'un vert majestueux qui respiraient l'été. L'arbre désigné n'avait plus de verdure et était noirci par l'age. Par delà sa tête, masse d'amas cotonneux se trouvèrent à défiler d'un air menaçant en travers de cette aquarelle de bleu paisible, bloquant la lumière de l'astre flamboyant par leur couleur noirâtre.

Je me tournais vers ma sœur qui s'était figée et cette fois pour la première, compris ce qu'elle essayait de me dire. Elle me passa devant le nez en courant presque aussi rapidement qu'une araignée et se faufila sous une racine à moitié déterrée du vieux magistral. À ce moment là, ce fût chacun pour soi. Notre compagnie si soudée dans le travail ployait sans résistance sous la menace des catastrophes. Cela avait toujours été et cela sera. Si cette sœur n'avait pas été face à moi à ce moment là, peut être que comme beaucoup d'autre, mère nature m'aurait engloutie sans ménagement.

Apercevant un énorme rocher soutenu par un reste de pomme et sans un regard pour ma fratrie toujours en fil indienne, je détalais en direction de cette grotte qui me maintiendrait en vie.

Lorsque l'apocalypse commença, je ne pus qu'observer avec horreur mes sœurs disparaître dans les ombres transparentes et démoniaques qui tombaient du ciel, les assommants pour certaines définitivement.

Le déluge ravageur avait duré une éternité et des premiers rayons timides éclairaient l'horrible scène qui s'offrait à nous. Quelques unes de mes sœurs, malchanceuses de ne pas avoir trouvé d'abri à temps se relevaient difficilement, ne se souciant pas des corps immobiles qui eux, ne se relèveraient plus. Notre compagnie comptait de lourdes pertes mais les survivantes recommençaient déjà à ramasser graines et feuilles, miettes et écorces, oubliant déjà le carnage qui venait de se produire. Non-loin de ma petite grotte, un scintillement me sortit de la contemplation du spectacle dans lequel j'étais plongée. Je m'extirpais rapidement de sous le rocher -j'étais indemne- et m'approchais de la cause du reflet qui s'agissait d'une jolie sphère transparente posée délicatement sur une feuille absolument verte qui s'échouait sur le sol. La goutte démoniaque qui avait contribué à l'assassinat de plusieurs de mes sœurs était attirante. Ma gorge s'asséchant, je décidais d'engloutir cette sphère. L'image que me renvoyait celle-ci me montrait deux antennes foncées incruster sur une tête plate noir et huileuse aux petits yeux noirs rapprochés. Je n'attendis pas la suite et enfonçais mes deux mandibules tout aussi sombre dans la sphère pour engloutir le liquide qu'elle contenait. Une fois cette tache finie, je me saisis d'une feuille et retournais auprès de ma voisine de sœur pour me remettre en marche, effectuant la dernière étape du voyage de retour pour retrouver notre nid ; réfléchissant déjà à notre prochaine excursion.

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