Petit Monstre

Scythe Crow

Il se cachait sous les meubles, étrange rampant de nuit.
Il ne se déplaçait pas à la légère. Il devait avoir une bonne raison pour cela. Les lumières éteintes et les habitants endormis. En particulier les enfants, petites teignes turbulentes trop curieuses. Personne ne devait le voir, oh non, jamais.


Non pas par honte de qui il était. L'idée même d'être surpris provoquait en lui une angoisse irraisonnée.
Et si un de ces petits êtres piqué par un vilain hasard, décidait de farfouiller, les yeux gourmands de nouveautés et le nez en trompette irrité par trop de doigts malpropres insérées, les sols marqués par son empreinte sale et poisseuse.


Son dégoût ne faiblissait pas. Il trouvait ces personnages répugnants. Ce teint rose grotesque et ses petits doigts boudinés. Cette tête ahurie qui lui semblait vide. Sa condition lui paraissait enviable comparé à " ça ".
Tout à coup, il vit des pieds se balancer. Les voir si près, trop près lui donnait la nausée. Il ne pouvait supporter l'odeur des gamins crasseux pourissant la maison. Il était ici chez lui, au même titre qu'eux. On lui devait le respect, même à un être aussi discret que lui.
Sa frustration dépassa bientôt sa peur et son aversion et se mua en rage. Il attrapa les odieux mollets et tira d'un coup sec.

Le jeune garçon ne comprit pas cette chute. Il n'eut pas le temps d'y réfléchir, déjà emporté sous son lit par des tenailles qui s'accrochèrent douloureusement à sa peau. Elles s'enfoncèrent encore un peu, provoquant les hurlements de l'infortuné. Malgré la panique et la douleur, il voulu tourner la tête et voir l'origine de son calvaire.

Il s'exécuta. A cet instant précis, il perdit la vue. Désorienté, il tenta de repousser la créature de ses mains. Il se rendit compte qu'il ne pouvait plus en faire usage. Il criait, en larme, désespéré. Mais il n'arrivait pas à entendre ses propres cries ou l'arrivée providentielle de ses parents. Tout était muet. Bientôt, ses forces manquèrent, sa voix se brisa et son corps désormais non agité fut entraîné.


La satisfaction du rampant fut grande cette nuit là.
La quiétude du foyer retrouvée par son action salvatrice.

Il devra supporter les sanglots qui succèderont aux rires (tré)passés. Un détail qui n'entravait aucunement sa joie.
Il était fier de lui. Au fond, en était-il convaincu, on le remercierait d'avoir agit ainsi. Et le calme pourra de nouveau pénétrer les lieux.
Il avait hâte que la famille découvre la bonne nouvelle.



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