Petite caille et vieille baderne

Laurence Delépine

Drôle de couple? Allons, ne soyez pas bégueule!

Viens là, ma petite caille, que je passe les doigts dans tes cheveux blondis. Ils ont poussé et doublé de volume depuis la dernière fois, quelle crinière! Approche la pulpe de tes lèvres gonflées, tu as la bouche dont rêvent les hommes, douce et brillante. De près, je vois mieux les longs cils qui doublent les tiens, ma poupée, et te font la pupille veloutée. Tu as bien fait d'affiner ton nez, son bout retroussé te donne un air mutin qui m'excite, n'en joue pas trop, ma jolie. J'aime ton front lisse et tes joues rebondies, mon bébé. Laisse-moi malaxer le silicone de tes seins pointés, qui me narguent dans toutes les positions et débordent ma main. N'ôte pas la ceinture qui te gaine la taille, ma guêpe, et par contraste fait ressortir tes fesses remodelées. Il est doué ton magicien, qu'attendent les autres pour se faire le même petit cul rond ? Ton sexe est glabre, et, ô merveille, parfumé et poudré, pour masquer l'affreux effluve iodé qui me dégoûte tant, si tu savais. Je ne reconnais pas tes lèvres, ah, tu les as raccourcies? Laisse-moi regarder, oui, c'est joli, c'est très joli, comme les ongles de bakélite qui allongent tes petons dorés. Tu es la pièce maîtresse de ma collection, mon Jeff Koons à moi.

Approche, mon barbon, que je flaire ton musc de vieux bouc. Laisse-moi caresser ton crâne lisse étoilé de ces jolies taches de cimetière, passer le doigt dans les sillons qui creusent ton beau visage de vieille bête. Oh, comme j'aime les plis de la chair molle de ton menton, l'arrondi flasque de ton ventre, tes couilles distendues! Serre-moi dans tes bras rugueux à la peau fripée, oui, comme ça, à m'étouffer. En empoignant tes fesses plates, j'écoute ton souffle rauque. Tout beau, tout beau, vieille baderne. Tes mollets m'enserrent, comme ils sont poilus! Etranges sculptures abstraites, j'admire tes pieds déformés, tes ongles jaunes et dédoublés. En toi, je sens la puissance du temps à l'œuvre. Tu es mon dinosaure.

 

            Je t'aime, petite caille. Ne me délaisse pas pour un ignare incapable d'apprécier tes grisants artifices.

 

            Je t'aime, vieille baderne. Laisse la nature lentement faire ses excitants ravages.

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