Pigalle, tu est née (1)
Eva Léonne
Tu lui as donné la vie et elle l’a prise.
Elle t’appartient, elle est ton unique
Celle, que tu caches au creux de ton antre.
Du haut de ton nord-ouest, vu sur ta butte, tu la fais briller.
Paris tu nous as donné,
Pigalle, nous avons décelée :
Petite, déjà coquine,
Elle savait s’y prendre, telle une orchidée rose.
Belle demoiselle, elle est devenue
Pétillante et vivante elle est restée.
De ses formes, elle a aguiché
De ses nuits, elle a fleuri, mais on la cueillit …
Trop tôt, messieurs…
Son regard de velours, n’est plus.
Elle est devenue Femme, de celle qui se laisse prendre.
Elle ne porte plus ses jupons longs qui laissent deviner.
Sa dentelle fine n’est plus, hélas.
Ses culottes volent et volent.
Son Moulin rouge elle gardera, peut-être…
Joséphine, Toulouse, vous n’êtes plus,
Au numéro 66 et Bricktop's s’en est tu.
Bien heureux celui qui connait le Baudet…
Pigalle, je t’ai goutée,
Tant d’audace vous cachez, mais vulgaire vous restez.
Quelque fois sensible, quelque fois sensuelle,
Mais trop peu, à mon goût.
Chaude et humide, vous resterez,
Dans ma bouche, je sens ta langue
Pigalle, tu m’as pénétrée.
De ta folie, je me suis abandonnée,
Et moi aussi, je me suis effeuillée.
De ses mains maladroites, qui m’ont empoignée,
J’ai pleuré.
De ses mains délicates… Il restera dans mon souvenir.
Je rêve de John Keats…
Tant pis,
Je ne veux pas vous changer.