Prison de glace

eden-paragallo

Sybille entra dans la cage de métal, non satisfaite de sa posture.
La porte se referma sur son âme prisonnière et torturée. Le froid se posa peu à peu sur la petite vitre face à elle. Le givre s'installa, lui aussi, dans la cage toute entière. Le souffle de la jeune femme se faisait fumée d'hiver. Elle pouvait sentir le froid envahir ses membres, sa chair, et tous les moindres recoins de son corps. Sa respiration commençait à devenir haletante puis manquante.
Son cerveau se paralysait de glace. La douleur frappa sans prévenir.  D'abord dans sa tête puis dans son cou, son torse, ses bras et ses jambes. Elle allait jusque dans ses orteils.
Sybille se tordait dans tous les sens, porta machinalement ses mains sur temps, espérant mettre fin à cette torture. Elle voulait crier mais aucun son ne sortit de sa gorge.
Quand elle fermait les yeux, c'était pour être hantée par de sombres souvenirs. Des images de flammes immenses dans la nuit, des flashs de griffes et de crocs acérés, de grognements et de cris d'enfants. Des souvenirs de nuits enfiévrées par des cauchemars incessants qui s'immisçaient dans le flot d'images. Ils tourbillonnaient dans son esprit comme le Monstre antique des eaux grecques.
Sybille se perdait de plus en plus loin dans son âme. Désormais, plus personne ne pouvait l'atteindre. Elle entendait des voix qui criaient son nom. Elles ressemblaient à des murmures ou à de lointains échos oubliés auxquels la jeune femme était incapable de répondre.
Sa conscience s'évanouissait aussi vite que les minutes passaient. Le poids de ses jambes devenait insupportable. La jeune adulte céda sous ce fardeau.
Des larmes glacées coulèrent sur ses joues. Elle se sentait perdue. Elle savait qu'aucun de ceux qu'elle connaissait ne serait en mesure de la sauver alors elle se laissa aller vers inconscience la plus totale tandis que le temps s'écoulait.

La porte métallique s'ouvrit lentement. Sybille ne sursauta même pas tellement le froid l'avait engourdi. Un vent de chaleur s'engouffra après l'ouverture, ce qui lui permit de revenir à elle.
Un homme jeune et bien bâti se tenait debout devant elle. Elle qui était recroquevillée comme un animal vaincu.
Ses larmes avaient séché. Plus aucune once de tristesse ou de désespoir se lisait dans ses yeux.
Elle sentit son corps qui se réveillait.
"Je vais enfin pouvoir reprendre le contrôle." pensa- t- elle.
Elle se leva sans la moindre difficulté. C'était, pourtant, comme si elle était hypnotisée par l'étranger face à elle. Leurs yeux se fixaient. L'un, au regard aussi rouge que le feu du pouvoir; l'autre, au regard glacial.
Il murmura, à Sybille, des paroles enivrantes mais aussi fermes que les ordres d'un général de guerre.
Mais notre métamorphe n'était pas dupe!
"Personne ne te soumettra." souffla sa petite voix intérieure.
Elle empoigna la gorge de son interlocuteur d'une main surhumaine.
"Si tu crois que tu peux me manipuler comme bon te semble sous prétexte de ton rang dans la meute, tu fais erreur." lança- t- elle d'une voix sombre et rauque.
Elle sentait le Pouvoir grandir en elle, l'adrénaline qui coulait dans ses veines. Mais l'heure n'était pas à la bêtise.
"Attends le bon moment pour éliminer cette vermine." lui conseilla sa raison.
Elle relâcha sa prise et quitta la pièce.
Elle repensa à ce qu'elle avait ressenti dans la cage. Finalement, ce n'était pas elle qui avait besoin d'être sauvée.
"Peut- être est- il temps pour moi d'intervenir." se méprit- elle à énoncer tout haut, avec une violente détermination.
Son ami se trouvait toujours sur un lit d'hôpital à tenter de guérir ses blessures. Trois ans. Déjà trois ans que ses yeux azur étaient clos. Personne, jusque là, n'avait réussi à atteindre sa conscience. Depuis ce soir- là, de jours en jours, Peter sombrait dans une folie inébranlable.

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