Rendez-lui Jean-Marc, sinon Magali va couler.

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Jean-Marc. Son sourire. Ses yeux. Sa peau. Une fois. Rien qu’une seule autre fois. Pour se souvenir vraiment, il faudrait une autre fois. Un truc violent, intense, fou. Comme cette seule fois-là. Merde, mon rapport. C’est pour ce soir et je n‘avance pas.

Magali s’y remet, crée ses graphiques, écrit un commentaire, insère une autre page. Sa collègue lui pose une question. Pendant qu’elle répond, Magali ouvre un email avec la photo de Jean-Marc. Juste comme ça, trois secondes. Pour se souvenir. Elle l’a dans la peau, elle le veut dans ses yeux.

Jean-Marc. Son sourire. Je me demande bien ce qu’il est en train de faire. Je parie qu’il n‘est pas seul. Une Colombienne. Elles sont redoutables, ces filles. Beaucoup trop belles. Son sourire. Ses yeux. Sa peau. Si je l’appelais, juste pour voir? Et un texto? Si j’envoyais un texto? Allez, un petit. Le dernier date de quand déjà? Vingt minutes. Ca va, c‘est correct. Juste un petit. « Je te veux, je t’aurai. ». Sobre, simple, efficace. Il va aimer.

Le téléphone sonne.

Merde, laissez-moi rêver.

Magali décroche. Oui, il est presque prêt. Dans une heure. Promis. Je peaufine. Oui, je vous rappelle. C’est ça. Je vous en prie. Au revoir.

Jean-Marc. Ses yeux. Ne pas y penser, il faut finir ce document. Après je serai libre de me consacrer entièrement à lui. En musique. Junebug, Robert Francis, notre chanson. Quand on a fait l’amour. Cette seule fois. C’était bon. Fou, dingue, bon. Il faudrait une autre fois. Pour sentir son corps à nouveau. Si beau. Merde, mon rapport.

Encore quelques histogrammes à finir et trouver une idée. Magali se lève, va chercher un café, réfléchit à ses conclusions. Etre géniale dans les dix minutes. Concentration extrême dans le couloir. A un bureau, un portable sonne. Magali court.

C’était le mien, ça, non? C’est lui. Il m’a répondu. Qu’est-ce qu’il m’a dit? Est-ce qu’il m’embrasse ? Ce serait un signe, hein?

Rien. Pas de message. Pas de mail, pas d’appel, pas de texto.

Sa collègue lui parle. Magali lève les yeux.

Quoi, encore?

Une autre question. Magali a Jean-Marc sur le cœur, sur les lèvres et un peu partout sur le corps. Un torrent d’amour sur le point de déborder et de tout emporter. Ne rien dire à personne.

C'est notre secret.

Et pourtant. Elle aimerait hurler à quel point leur passion est puissante. Regardez-nous comme on s’aime. C’est fort, tellement fort. Violent. Fou.

Jean-Marc. Sa peau. Il n’a pas répondu. Peut-être qu’il n’a pas reçu mon dernier message. Et si je le renvoyais? Pour être sûre.

Le standard. Magali est demandée à l’accueil.

Merde, je n’ai pas que ça à faire. Mais c’est peut-être une surprise. Des fleurs. Jean-Marc m’a envoyé des fleurs. Si ça se trouve. Il ne peut pas être en bas, ce serait trop beau. Non, il est en Colombie. Des fleurs. De sa part. Ce serait tellement romantique. En attendant notre prochaine fois. Dans le couloir. Un truc violent, intense, fou.

Magali prend son badge et son portable (on ne sait jamais, s’il appelle).

Deux policiers l’attendent.

« Mademoiselle Boulon, veuillez nous suivre. C’est au sujet d’une plainte. Pour harcèlement. ».

Jean-Marc.

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