Répertoire

cianel

Je me lève péniblement de mon lit dans ma chambre aux tons orangés. Je regarde ma tête dans le miroir de ma salle d’eau aux couleurs pastel, vert d’eau. J’allume la lumière, il fait sombre ce matin. J’y vois un type d’1m74, qui a presque 30 ans mais qui en fait ce matin 40 avec ses cheveux châtains épais en broussailles, des grands yeux marrons en amande qui sont à peine ouverts, un visage très pâle, des épaules robustes mais tombantes, un gros nez en forme de patate rougi par un vilain bouton. Je me passe de l’eau sur le visage pour réveiller la bête. Je gagne ma cuisine d’un blanc immaculé en shootant au passage dans les chaussettes portées la veille et qui gisent au pied de mon lit. Ce geste m’étourdit et je manque de me tordre la cheville. Il ne faut pas trop que je fasse d’efforts ce matin. Je prends mon bol, je m’assoie à table et verse dans mon récipient des pétales de céréales, puis le lait après un temps d’absence. J’ai un mal fou à enchaîner les mouvements anodins ce matin. Je n’aurais pas dû proposer à Gabriel et à sa nouvelle proie mon eau de vie de Pologne et surtout les accompagner. A chaque fois cette liqueur me contraint à rester dans un demi-sommeil. Il y a une écharpe blanche qui me tient compagnie ce matin. Elle est posée sur la chaise qui me fait face. Elle ne m’appartient pas. Elle est à la fille qui était là hier soir. Comment s’appelle-t-elle déjà ? Je ne sais plus…Pourtant j’ai enregistré son numéro de téléphone dans le répertoire de mon portable durant la soirée et je ne me rappelle plus de son nom ! Ah ! J’ai dû trop forcer sur la boisson. Je me sens minable ce matin. Je n’aime pas ça. Bon, j’interromps mon petit déjeuner (je n’ai pas très faim, je peine à avaler quoi que ce soit) et je m’assoie au pied de mon portable vert-pomme posé sur le canapé. Je vais la prévenir. Je vais bien retrouver son nom. Je passe un à un les noms qui s’affichent sur l’écran de la machine. 

Adrien.

Adrien a 36 ans, est grand, blond et carré. Il a le visage rond et a une tête de môme. Il est mon copain de boulot. Il est directeur des Ressources Humaines. Il passe la moitié de son temps à faire passer des entretiens d’embauche et l’autre moitié à chercher la femme de ma vie dans les cv spontanés qu’il reçoit.

 Casimir.

Casimir est mon grand frère. Il a 35 ans. Il est grand, blond, tout maigre avec des cheveux longs. Il est artiste-peintre comme il dit. Il cherche toujours sa voie dans la déglingue disparate de ses œuvres contemporaines.

 Cathy.

Cathy est une copine qui a 26 ans. Elle est petite, brune aux cheveux courts, ronde, pas très jolie. Elle a de gros yeux ronds qui semblent vouloir assimiler chaque élément de l’environnement qu’elle perçoit. Un soir elle m’a invité chez elle. Elle m’a dit entre « tu aimes ma tartiflette ? » et « tu veux du dessert ? » qu’elle m’aimait ! Il est vrai que lorsque je suis arrivé chez elle dans son deux-pièces, j’ai été surpris par la décoration impeccable, inhabituelle. Cela ressemblait à un appartement témoin. Il y avait les lumières tamisées et Norah Jones en fond sonore. J’ai alors senti qu’il y avait baleine sous la pierrade et j’aurais dû partir en courant. Son aveu nous a coupé l’appétit. J’ai dû bafouiller des banalités affligeantes du style : « t’es une bonne copine, je t’aime bien ». Depuis elle continue à espérer et m’appelle un peu trop souvent à mon goût pour que ce soit raisonnable.

 Célia.

Célia est ma meilleure amie. Elle a 29 ans. Elle est grande, belle, élancée, a les cheveux roux et longs, des yeux bleu foncé, des pommettes hautes. Mais elle est une femme fatale surtout par son tempérament. Une séductrice dans l’âme. Eternelle célibataire. Elle se lasse très vite des hommes. Elle est comme j’aime lui rappeler, constamment inconstante.

 Delphine.

Delphine est une amie qui vit à Rome avec Luccio, son italien. Elle a 29 ans. Elle mesure 1m65, a les cheveux châtains mi-longs, des yeux verts et un sourire enjôleurs. Je suis amoureux d’elle  à peu près de manière ininterrompue depuis mes 10 ans. Elle ne l’a jamais su. Je sais que lui avouer ne la ferait pas tomber dans mes bras. Elle demeure une amie des plus proches et des plus agréables. Elle est à Rome depuis 4 ans, c’est très bien ainsi. 

 Emeric.

Emeric est, avec Mathias, mon meilleur ami. Il a mon âge. Il est petit, tout maigre, blond, a des lunettes. Il travaille dans une bibliothèque, adore lire. On se connaît depuis le collège. Il passe la majeure partie de ses temps libres à écrire des poèmes que je trouve barbants.

 Florence.

Florence est mon ex. Elle a 27 ans. Elle est grande (presque de ma taille), mince (limite maigre), a des cheveux épais et châtains, des yeux marrons. Il y a six mois, nous nous sommes séparés après quatre ans de vie commune. D’un commun accord. Usure régulière et irréversible. Nous avons signé le constat sans trop de sinistres, de dommages corporels, psychologiques et collatéraux (nous n’étions pas assez mûrs face à la question d’avoir des enfants). Nous nous appelons parfois pour nous dire que l’un d’entre nous a retrouvé une chaussette de l’autre sous le lit ou une culotte dans le tiroir à caleçons, ou encore parce que nous sommes encore liés aux yeux de la lente administration : et une facture par-ci, et des impôts par-là à se partager.  Je suis célibataire depuis. Je vis sur une planète sans femmes où le ciel est parfois traversé par la comète Delphine au gré de nos appels téléphoniques et de nos échanges de courriels.

 Mathias.

mon meilleur ami avec Emeric. Il est grand, brun, carré, sportif et grande gueule. Il est commercial dans une entreprise qui gère la collecte des déchets. Si Gwen est conservatrice, Mathias est clairement vert et rouge. Je le connais depuis le lycée.

 Père Noël.

Qu’est-ce que c’est que cette connerie ? Qui est venu farfouiller dans mon répertoire ? Certainement un coup de Mathias. Je regarde le numéro du père Noël pour en avoir le cœur net :  gagné ! C’est le sien ! Qu’il est bête ! Passons.

  Victoire.

La voilà ! C’était la dernière du répertoire. Elle a 23 ans. Elle est petite, a les cheveux châtains clairs, de bonnes joues, de petits seins et elle parle fort avec emphase. J’aurais dû commencer par la fin. Bon je l’appelle !

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