SI L'AMOUR NE DURAIT QU'UNE NUIT

Edgar Fabar

Poésie de minuit, folie matuvue

Et si l'amour ne durait qu'une nuit
Serais-je ce garçon si peu hardi ?
Si n'étaient ces filets où les rêves s'emmêlent
Je serais une daurade merveilleuse
Si n'étaient les contours invisibles de la cage, je gommerais les barreaux qui éloignent les nuages
Si n'était la peur de la fin, je prendrais le chemin que l' intelligence nomme impasse
Si n'était le destin d'un coeur trop serré, je ferais ce que l'enfance m'a appris 
Si n'étaient le cumul des instants et le calcul des autres, je ne subirais pas le manque de l'encore plus
Si n'était le désarroi de la vérité, je me laisserais porter par mes sentiments si mal coiffés
Si n'était l'impossibilité d'être tout mais sans vous, je serais heureux d'être cette pièce de puzzle un peu seule
Si n'étaient ces sexes silex sur lesquels je me rape, où ma baudruche en cuir se crève, je pourrais t'aimer sans te planter, sans me flinguer,

Si n'étaient les humains à la chaine et les vies en série, je serais un être extravisionnaire
Si n'était la guerre du sens, les idoles névrotiques, je pourrais divaguer sans que mes neurones pleurent Babylone, je saurais être alone dans la faune
Si n'étaient les mathématiques et leur musique policière, je léviterais désarticulé et sans rage
Si n'était la théorie, la probabilité que ce qui est va arriver est en route, je serai souple avec le temps, trente quatre, trente treize puis une pomme de bohème qui remonte la falaise
Si n'était l'argent comptant, la vanité du laser qui répare, je règnerais sur l'a peu près, le gribouillage et l'inégalité
Si n'était ma passion de la symétrie, je verrais mon coeur cet abstrait, je saurais que c'est loin des troupeaux tristes, figuratifs et parfaits que les amochés créent le vertige
Si n'étaient la bonne santé, la bonne année et la peur des cheveux qui meurent, je pousserais la machine jusqu'à l'accident pour voir mes tripes sous le vent,
Si n'était ma bite, soldat sans classe, tyran élastique, je pourrais parler à une femme sans vouloir la léser, 
Si n'était la maladie du compromis, mon athéisme relationnel, je te dirais ce que tu ne veux pas entendre et je te ferais souffrir sans frémir,
Si n'était l'obsession du pouvoir, je te respecterais sans violence.
Si n'était l'importance de la naissance, je marcherais pieds nus et sans but vers la première forêt venu

Je suis perdu
Prenons-nous dans les bras 
Pour ne pas se cogner
À nos doutes, au mur des miracles
Aux pavés de la marre
J'ai envie de vivre nu sous ton corps 
Ce qui me tue, c'est moi et ma volonté d'être à toi,
Car je ne sais plus vivre après toi,
Je veux voir les planètes de toutes les autres nuits
Je veux des voisins qui ne soient pas humains
Je me fous de ces gens qui vivent en apnée
Je veux gommer ce monde atterré, sophistiqué
Je veux la grâce des étoiles qui s'étiolent
Poème, chanson, horizon et rayures sur la carte
Il me suffit de peu pour toucher ce qui brule
A toi, à moi et à chaque bout de ce monde
Les énergies et les ondes les plus rousses.

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