Solitaires Ch 3

rainette

Vous trouverez le début de ce Roman ici http://welovewords.com/documents/solitaires Luca Valentini mène une existence bien réglée avec sa fille, mais la vie n'est pas un long fleuve tranquille.


CH3



Isaline quitta la propriété familiale en début d'après-midi, à l'arrière de la voiture conduite par Malik, le garde du corps de service. Elle se cala dans la voiture et sortit un petit miroir de son sac à main. Elle vérifia sa coiffure et son maquillage, esquissa un sourire, puis se tira la langue. Tout à coup elle jeta un œil, gênée, vers Malik qui conduisait, impassible. Elle regarda dans le rétroviseur pour savoir s'il l'avait vue mais elle ne perçut rien, il restait de marbre. Elle prit quelques secondes pour détailler son visage, puis sa silhouette, et en conclut qu'il n'était pas son type. Il ne suffit pas d'être garde du corps pour être séduisant, et Johnny avait bien plus que ça.

Arrivés devant les bureaux de la société événementielle qui s'occuperait de la soirée d'anniversaire, Isaline descendit de la voiture et entra. Elle y resta plus d'une heure, afin de mettre au point les détails de la fête. Elle était très emballée, le décor qu'elle avait imaginé était sur un thème type Bollywood, en moins chargé, avec des tons rose, violet et or soutenus de blanc. Des panneaux viendraient entourer la pièce pour donner le ton, la table serait dressée avec des verres à thé et des plateaux sur pieds, sur des nappes blanches, pour garder un côté sophistiqué. Des éléphants, des coussins, des bougies.... Elle était ravie. La personne chargée de concrétiser ses idées était très sympathique et consciencieuse. Elles s'entendaient bien et avaient trouvé des idées et des compromis sans jamais un mot plus haut que l'autre. Les derniers détails étaient longs à passer en revue, et elles finirent par boire une tasse de thé, comme épuisées par un combat.

- Je suis certaine que ce sera formidable, mais je ne peux m'empêcher d'avoir peur que cela ne plaise pas, lança Isaline

-Je ne pense pas que vous ayez à craindre quoique ce soit. Vous avez un goût sûr et nous avons évité la surcharge que peut apporter ce genre de thème, cela donne un vrai style, lui assura la jeune femme qui lui faisait face

-Je vous fais confiance. Je suis vraiment impatiente ! Mais surtout je vous suis très reconnaissante de votre implication et de votre écoute.

-Je vous remercie, c'est mon travail, mais j'ai beaucoup aimé le faire avec vous. J'espère que le résultat final vous plaira, ajouta l'organisatrice en désignant une table sur laquelle était placé quelques unes des pièces qui figureraient le samedi suivant sur les tables d'Isaline, devant une des tentures.

- C'est impeccable ! 

Isaline prit congé et se dirigea vers la sortie, ou Malik l'attendait pour la guider vers la voiture garée plus loin. Elle se fit conduire chez le traiteur où elle vérifia sa commande et donna un planning ainsi que les formulaires pour pouvoir entrer dans la propriété. Le repas concocté comprenait un apéritif avec des canapés, des verrines et des bouchées aux accents exotiques, un poulet Biryani pour rester dans le thème de la décoration. Pour le dessert par contre, elle tranchait avec un sublime gâteau Forêt Noire et Blanche auquel elle avait déjà goûté avec ravissement. Tout cela était bien entendu accompagné de vins, de corbeilles de fruits et de douceurs à picorer pendant la soirée.

Après un dernier saut dans une boutique d'arts pour des crayons lui servant à dessiner, elle s'installa à l'arrière de la voiture avec un soupir. Elle demanda à Malik d'attendre quelques instants et téléphona à son amie Annabelle.

- Salut Anna, j'ai terminé en ville, tu es toujours OK, je peux venir ?

Ah ma pauvre, je suis désolée dit une voix d'outre tombe, je suis affreusement malade, j'ai les yeux explosés, le nez en fontaine, c'est atroce ! La gorge me pique, je tousse, je suis crevée, vraiment c'est pas mon jour.

Oh laaaaa, ça n'a pas l'air en effet. Tu as besoin de quelque chose ?

Non merci, dormir.... je suis désolée mais il vaudrait mieux que tu ne viennes pas. Je m'en veux, mais je risque de ne pas être de bonne compagnie, et contagieuse par la même occasion.

Oui, je comprends, quel dommage quand même, j'avais des tas de choses à te raconter, dit Isaline, déçue

Oh ma Lili, ça m'ennuie aussi. Mais il vaut mieux que ce soit aujourd'hui que samedi prochain, non ?

Oui c'est clair ! répondit Isaline en riant, sinon je te fais trucider !

C'est bien ce qui me semblait ! se plaignit sa camarade avant de partir dans une quinte de toux interminable.

Et bien je crois que je vais te laisser et rentrer chez moi. Je vais me refaire une soirée télé !

Pense à moi, je ne peux même pas regarder un écran sans pleurer.... Je t'embrasse... de loin.

Moi aussi, à plus tard !  Isaline raccrocha et jeta à l'attention de son chauffeur : Bon, et bien à la maison s'il vous plaît. Changement de programme. »


Luca se préparait devant son dressing. Il opta pour un pantalon et une veste beiges ainsi qu'une chemise bleu pastel. Il essaya plusieurs cravates avant de se décider pour une cravate bleue marine qui tranchait avec le reste de la tenue. Il passa une main dans ses cheveux sombres qui se décoiffèrent aussitôt, lui conférant un air décontracté et terriblement sexy dont il n'avait pas conscience. Pourtant, Luca Valentini savait qu'il plaisait aux femmes,et il en usait parfois, les conquêtes lui étaient faciles, peut-être trop même. Il s'arrêta devant le miroir et se trouva satisfait de sa tenue. Retouchant ses cheveux et sa cravate, « Vai nel mio ragazzo pista »1 dit -il, et il quitta la pièce. Il descendit les escaliers tranquillement et attendit dans le hall. Arnaud, un autre des gardes du corps vint ouvrir la porte d'entrée et le salua. Luca lui fit un signe de tête et le suivi dans la voiture stationnée devant le perron.

Ils arrivèrent à la galerie alors qu'elle était déjà remplie de divers visiteurs qui formaient une foule aussi dense qu'hétéroclite. Des personnes en costumes sombres et tirés à quatre épingles côtoyaient des jeunes aux cheveux désordonnés et aux tenues originales ou bigarrées. Des hommes, des femmes, des styles différents défilaient devant les œuvres exposées, donnant leur avis en s'agglutinant par groupes. Les exposants étaient des stagiaires d'une école artistique qui avaient crée un projet collectif autour de la nature, chacun avec ses compétences. Sculptures représentant un arbre, tableaux végétaux, graphs, tags, peintures, objets divers et variés se succédaient dans les salles au blanc laqué.

Luca se plongea dans l'examen de quelques pièces qui lui paraissaient plus intéressantes que les autres. Il salua quelques têtes et finit par se trouver en face du Maire. Ne pouvant l'ignorer, il alla le saluer.

- Monsieur Valentini ! s'exclama ce dernier, je suis très flatté de vous voir ici ! Ne trouvez-vous pas que ces jeunes sont prometteurs ?

Tout à fait, Monsieur, il y a de beaux esprits créatifs à l'œuvre !

Exactement ! Vous venez prendre un verre, c'est l'heure du verre de l'amitié. J'ai quelques idées à vous soumette par la même occasion.

Luca suivi l'homme trapu, aux tempes grisonnantes qui semblait là aussi à l'aise que devant une assemblée de citoyen en colère. Jamais Luca ne l'avait vu se départir de son dynamisme tranquille. Après une présentation de l'exposition et quelques élocutions, dont celle de la municipalité, le buffet fut ouvert. Luca se détachait de la foule par sa haute taille et son allure princière. Il vit revenir à lui le Maire qui lui fit part d'un contact qui cherchait un concepteur de logiciel et ils échangèrent un long moment sur le sujet. Luca commençait à avoir mal à la tête dans cette ambiance surchauffée et bruyante. Lorsqu'ils convinrent de se revoir ultérieurement, Luca se plaça à l'écart, réfléchissant à l'opportunité de s'éclipser aussi vite. Il fit quelques pas vers la sortie et s'arrêta en apercevant une salle qu'il n'avait pas remarquée lors de sa visite. Il s'avança et découvrit un grand mur blanc sur lequel se détachaient les mots « BE HAPPY » en vert. S'approchant, il s'aperçut que les lettres étaient en relief, probablement effectuées avec de l'herbe ou des petites feuilles... vraies ou fausses, il ne sut vraiment. L'effet était assez agréable à regarder. Faut-il arroser ? Cela donnerait un air frais et écolo à mon bureau se dit-il.

« Sacrément fort, n'est-ce pas ? Murmura une voix féminine derrière lui.

Luca sursauta et se retourna pour se trouver devant une femme brune aux cheveux enserrés dans un chignon lâche, qui le regardait avec attention.

Certainement ! C'est votre œuvre ?

Grands dieux non ! S'exclama-t-elle j'en suis bien incapable . Charlène Duronsier, journaliste à l'Écho de la Méditerranée, se présenta-t-elle

Enchanté, répondit Luca en détaillant un peu plus son interlocutrice. Luca Valentini.

Je sais qui vous êtes Monsieur Valentini sourit-elle »

Il remarqua sa taille fine, ses ongles rouges impeccables et son regard brun. Elle portait un tailleur rouge et un chemisier beige qui laissait voir un brillant à la naissance de sa poitrine. Son maquillage élégant faisait ressortir sa bouche ou flottait une légère moue. Il la trouva fort attirante et lui décocha un sourire ravageur.

 - Et à quoi dois-je cet honneur ?

La revue économique, c'est davantage mon domaine, affirma-t-elle avec un large geste désignant la galerie

Ah oui ? Et vous êtes là par curiosité ou bien est-ce autre chose ?

Elle soupira d'un air désespéré.

Mon chef a eu la bonne idée de nous envoyer sur des sujets sortant de nos spécialités habituelles. Et me voilà ! Alors, je trouve ça extrêmement intéressant de venir ici, j'ai vraiment fait une expérience sympathique... mais de là à écrire un article, franchement, je sèche.

Luca se mit à rire. Il la trouvait fort agréable, très jolie, et elle semblait avoir un peu de plomb dans la cervelle. Il pensa qu'il serait agréable de passer un peu de temps en sa compagnie. Depuis sa dernière liaison cet hiver, il n'avait pas beaucoup eu l'occasion de voir du monde ou de faire des rencontres.

- Et pourquoi pas « ces jeunes talents ont su élever la nature au rang qui lui convient, celui d'œuvre d'art »....  suggéra-t-il au hasard

Pas mal pour un requin des affaires, lui accorda-telle.

Elle s'avança vers lui et se posa à sa droite pour regarder le mur calligraphié en herbe fraîche.

-Il me faudra des heures pour continuer après une telle phrase.

Vous trouverez à tête reposée assura-t-il.

Charlène Duronsier le jaugea rapidement, et posa une main sur le bras de son voisin en susurrant :

« A moins que vous ne m'aidiez encore un peu ? ». Elle lui lança un regard chargé de sous entendus que Luca ne put ignorer. Il hésita sur la conduite à tenir. Cela valait-il la peine de se lancer dans une liaison qu'il finirait par abréger ? Il ne savait rien de cette jolie brune, mais elle était journaliste et semblait avoir un tempérament audacieux, ce qui pouvait lui créer des ennuis. Il savait que cela ne mènerait nulle part. Cela n'allait jamais nulle part. Dès que les choses commençaient à pouvoir devenir sérieuses, il se sentait mal et rompait. D'un autre côté, cette Charlène semblait avoir autre chose à offrir que sa jolie plastique. Ce n'était pas une de ces bimbos d'apparat qui s'accrochaient parfois à son cou, sans pouvoir tenir une conversation un tant soit peu cultivée. Luca cependant, avait souvent les sens emballés par ces jeunes beautés qui ne demandaient pas grand chose que de se faire remarquer. En était-il autrement ce soir ? Il repensa que sa fille ne serait pas à la maison en rentrant, il se dit qu'il avait besoin de faire autre chose que travailler et s'occuper chez lui et il s'inclina légèrement vers la journaliste pour lui proposer :

- Que diriez-vous d'aller boire un verre dans un endroit plus calme ? 

Le sourire de Charlène s'élargit et ses yeux s'étrécirent légèrement. Elle se retint de sautiller de joie.

Avec la plus grande joie très cher.

Suivez-moi, lui dit Luca, je crois qu'il y a une brasserie agréable pas très loin.


Ils récupérèrent leurs manteaux et sortirent dans la rue, savourant la fraîcheur du soir et le calme relatif de la rue. L'étouffante ambiance de la galerie d'art se dissipait peu à peu, et ils marchèrent quelques instants dans les rues avoisinantes jusqu'à la petite brasserie proche. Luca repéra une table libre, légèrement à l'écart, dans un coin de la salle et guida la jeune femme vers cet endroit discret et l'aida à s'asseoir. Il se plaça face à elle et l'observa un instant. Il aimait les femmes brunes. Il aimait les femmes qui prenaient soin d'elles, qui étaient belles et sexy parce-qu'elles le voulaient, parce-qu'elles se mettaient en valeur. Elle était brune, elle était jolie, elle était élégante, et son regard devint beaucoup plus aguicheur lorsqu'il lui sourit avant de lui demander ce qu'elle souhaitait boire.

 -Un mojito, ça me plairait bien.

Vous avez faim ? Souhaitez vous manger quelque-chose ?

Oh non, merci, j'ai déjà bien assez mangé au buffet

Lucas fit signe au serveur et passa la commande.

-Quels genre d'articles écrivez-vous donc habituellement ?

Le genre rubrique « «vie des entreprises locales ». Les mouvements sociaux, les alliances, les rachats, les faillites...

Je vois. Vous avez déjà un avis bien assis sur ma société et moi-même.

Assez oui.

M'en direz-vous davantage ? demanda-t-il tout bas en se penchant vers elle.

Et bien..... - elle laissa le serveur déposer leurs consommations sur leur table- je pense que vous êtes un chef d'entreprise avec une poigne de fer, qui est intransigeant mais jamais désobligeant. Vous êtes respecté, craint, mais aussi reconnu de manière positive.

Très bien, cela me convient, mais cela n'englobe que la partie « affaires ». Rien d'autre ne s'ajoute à cela ? J'en serais étonné.

Pas vraiment. Vous vivez seul avec votre fille, vous apparaissez parfois avec une femme, rarement la même, vous avez un bateau.... il n'y pas de potins sulfureux qui couvent. 

Elle avait prononcé ces mots dans une sorte de regret presque chuchoté. Luca la regarda dans les yeux et la provoqua volontairement en se plaçant à quelques centimètre de son beau visage qui semblait tendu par l'attente.

Pas encore peut-être...

Je pourrais vous aider....

Éventuellement...  mais j'étais sensé vous aider pour votre article.

Oubliez !

Si vous y tenez.

Oui ! »

Il la sentait totalement suspendu à ses lèvres, et il choisit de porter le coup décisif. Il approcha sa main de son visage et replaça une mèche folle derrière son oreille. Lorsqu'elle ferma les yeux un bref instant, il s'inclina pour l'embrasser. Elle céda sans surprise au baiser de Luca. « Trop facile », se dit-il, mais il ne bouda pas son plaisir. Il se séparèrent et il commença à reparler de l'exposition, de ce qu'on pouvait en penser. Elle l'écoutait fascinée par son aisance avec les mots et charmée par sa voix, avec quelques accents éraillés qu'on attribuait aux italiens. Il faisait durer le moment, le moment avant la suite que tout couple qui se rencontre peut espérer. Ils finirent leur verre et Luca en proposa un autre qu'elle refusa. Il lui offrit alors de la raccompagner. Elle accepta.

Ils sortirent de l'établissement, et marchèrent pour rejoindre la voiture de Luca. Il passa les bras autour de la taille de Charlène et l'attira à lui. Ils s'embrassèrent à nouveau et rapidement, leur désir monta en intensité. Luca commença à la caresser et elle se serra contre lui. Il s'écarta légèrement.

-Je peux vous raccompagner, ou je peux vous inviter dans une suite pour invités dont je dispose dans un hôtel proche, lui proposa-t-il.

-Un hôtel ?

Oui, pratique, simple, tranquille, neutre

Vous me faites une proposition quelque peu malhonnête Monsieur Valentini !

On peut voir ça comme ça, dit-il en jouant de caresses sur ses épaules

Bon, allons pour une visite de la neutralité dans ce cas. Je suis un peu fâchée avec le rangement. »


Charlène entra dans une somptueuse suite qui comprenait un salon décoré de vert pâle et de gris, une chambre coordonnée et une salle de bain ou trônait une superbe baignoire à jets bouillonnants.

Luca expliqua que cette suite lui servait à loger certains clients ou lorsqu'il rentrait tard. Seul un placard contenant quelques effets personnel était fermé à tous.

Le canapé de bois clair au tissus vert, trônait au milieu de la pièce, flanqué d'un fauteuil assorti et d'une table basse. Derrière, près de la fenêtre, une table et des chaises de même tons pouvaient permettre de s'installer pour travailler. Elle se tenait debout et détaillait la pièce sans avoir l'air de savoir ce qu'elle devait faire. Luca lui proposa de faire monter un plateau des cuisines mais elle n'avait pas faim. Il relança le sujet de son article, mais elle ne sembla guère motivée à poursuivre sur ce terrain. Il se dirigea alors vers le mini bar et pris une petite bouteille de Sauvignon qu'il ouvrit élégamment. Il leur servi deux verres, posa la bouteille sur la table basse, et, les gardant à la main, l'invita à le rejoindre. Lorsqu'elle saisit le verre qu'il lui tendait, leurs doigts se touchèrent, et Luca sentit son désir se rappeler à lui. Ils s'assirent côte à côte. Charlène le dévorait des yeux, et Luca ne lutta pas longtemps. Il lui prit le verre des mains et l'embrassa, la caressa puis la fit basculer sous son poids. Charlène lui rendit sa passion et bientôt, il ne fut plus question d'exposition, d'article ni de revue économique.



Il était 18H00, Johnny Cooper était dans son salon. Il déposa son arme de service sur le petit bureau qui jouxtait la porte de la cuisine et alla se servir un scotch. Il se laissa choir dans le canapé et ferma les yeux. Aussitôt lui apparu la frêle silhouette de la fille de son patron. Ses jolis yeux maquillés de brun et blanc lui revenaient en surimpression. Il se mit à rêvasser quelques instants, il se voyait lui enserrant la taille, lui caressant les cheveux.... Il sursauta. « Dude, you are losing it!"2 »

Il alla s'asseoir devant son ordinateur et ouvrit sa boite mail. Il parcouru rapidement les messages et chercha parmi ceux de la veille, il s'arrêta sur celui de l'ami qui lui proposait une soirée billard. Il demandait si Johnny voulait participer à un tournois entre copains. Il réfléchit encore quelques instants et répondit par quelques mots qu'il viendrait. Il aimait particulièrement le billard et était très doué. Il avait passé d'innombrables heures à jouer pendant une période un peu houleuse de son passé. Il s'avérait être un adversaire redoutable. Ça allait le détendre de jouer, c'était certain. Il se recula dans sa chaise de bureau et réfléchit. Il fallait absolument qu'il lutte contre ces sentiments qui l'assaillaient. Il pensait de plus en plus souvent à Isaline, et cela n'augurait rien de bon. Elle était la fille de son patron, elle était jeune, elle n'était pas pour lui. Il allait commencer par se changer les idées. Il y avait toujours une ribambelle de jolies filles au pub où il allait rejoindre ses amis. Il savait qu'il avait des facilités à les séduire, et bien qu'il n'en abusa pas, Johnny espérait que ce soir il oublierait un peu la maîtresse des lieux au bras d'une belle conquête.

Il se doucha rapidement, passa un jean et avala un plat qu'Alberta lui avait donné à réchauffer. Il jeta la vaisselle dans un petit lave-vaisselle et attrapa une chemise blanche décorée de motifs géométriques noirs tout le long des boutons. Il enfila son holster et y plaça une arme légère, puis une veste souple pour le dissimuler. Enfin, il revêtit un blouson et attrapa son casque de moto noir zébré de jaune et pris la direction du garage.


Isaline traversa le couloir pour aller jeter ses affaires dans sa chambre. De pièce en pièce, elle parcouru la maison à la recherche de son père mais il était déjà sorti, et elle termina son parcours en s'écroulant sur un fauteuil près de la baie vitrée. Elle sortit son smartphone et pianota quelques instants sur Facebook. Les nouvelles étaient sans importance, elle rit à quelques plaisanteries et afficha sur son mur sa tristesse de passer une soirée en solitaire. Elle rangea l'appareil et soupira à fendre le cœur. Sa tête allait exploser, elle retournait dans tous les sens les diverses émotions qu'elle ressentait depuis quelques mois. Elle n'arrivait plus du tout à penser à autre chose, elle n'arrivait plus à se sortir de ce tourbillon, elle revivait en boucle tous les moments où elle avait ressenti quelque chose de différent d'auparavant. C'était une véritable obsession. « Tu vas devenir folle ! » se dit-elle, aussi elle décida d'aller se vider l'esprit en faisant du sport au rez-de-chaussée, il fallait que cela cesse.

Elle se retourna vers sa chambre pour se changer et croisa Alberta qui fut surprise de la voir là.

 Mais Mademoiselle Isaline, je vous croyais chez votre amie, je ne vous ai rien préparé pour ce soir ! S'exclama-t-elle.

Ce n'est rien Alberta, il y a eu un changement de dernière minute, lui sourit la jeune fille.

Mais que désirez-vous pour le dîner alors ?

Pas grand chose répondit Isaline, soudainement lasse.

Oh, c'est bien tristounet ça ma petite.... que diriez-vous d'un plateau télé ? Avec des bonnes choses à picorer en zappant, hein ?

Ce sera parfait !

Et bien je m'y atèle.

Je vais faire un peu de sport, prenez votre temps.

Bonne soirée mademoiselle.

Bonne soirée Alberta .

Isaline se changea pour un pantalon de gymnastique gris et une brassière rouge qui convenaient mieux à la situation, elle enfila des chaussettes et des baskets, s'attacha rapidement les cheveux en faux chignon et descendit.

Au rez-de-chaussée, se trouvait la salle de sport, mais aussi les appartements du personnel. Le large hall d'entrée comprenait deux escaliers imposants se rejoignant sur une mezzanine par laquelle on accédait soit à la maison, soit aux locaux de l'entreprise. En bas, il y avait plusieurs portes, dont une qui permettait de rejoindre le vestibule ou se trouvaient les accès aux appartements de Johnny Cooper, Alberta, et deux autres mis à disposition en cas de besoin, mais aussi à la salle de sport. Tout cela donnait sous l'immense terrasse de la maison. Les appartements de Johnny et Alberta possédaient un petit jardin privatif, délimité par une haute haie qui les isolaient du reste de la propriété. La Salle de sport ne comportait que des petits hublots en hauteur, Isaline entra et alluma la lumière. Apparurent alors les différents appareils de musculation, le vélo de salle, les sacs de frappe, les barres, les altères, le tapis de course. Elle se dirigea vers ce dernier, vissa ses écouteurs dans les oreilles et alluma la machine. Elle régla sa course et monta le volume sur son téléphone portable qu'elle fixa à son bras grâce à un brassard spécial. Elle se mit à courir doucement, puis accéléra la cadence jusqu'à ce qu'elle eût à se concentrer sa respiration. Elle fixa son attention sur ses inspirations et ses expirations pour tenir la cadence, tout en déroulant au maximum sa foulée. Son rythme cardiaque s'éleva et se stabilisa, elle se centra sur l'effort. Elle réussit enfin à ne plus penser, à n'écouter que son corps, à regarder les mètres, puis les kilomètres défiler sur le compteur. Elle se libéra enfin de ce qui la poursuivait depuis des semaines.

Au bout d' une heure environ, elle visualisa 10,6 km au compteur et ralentit. La sueur lui coulait sur les yeux, son pantalon lui collait aux jambes, elle était essoufflée et rouge. Elle éteignit la machine, la musique et reprit sa respiration, avant de faire quelques étirements. Elle était totalement épuisée et s'assit sur un tabouret pour récupérer quelques instants avant de remonter. Elle s'essuya le visage et les bras et s'enveloppa dans la serviette pour remonter. Le hall restait toujours un peu frais.

Elle remonta lentement les escaliers et se jeta sous la douche. Le jet d'eau chaude lui apporta un bonheur extraordinaire, atténuant les douleurs de ses muscles qui n'avaient pas été autant sollicités depuis longtemps. Elle prit le temps de se laver consciencieusement les cheveux et d'appliquer un après shampoing. Lorsqu'elle sortit de sa salle de bain, elle se sentait terriblement mieux, délassée, détendue et apaisée. Elle passa rapidement un jean noir et une tunique vert pâle brodée de fils dorés et enfila de petites ballerines noires qu'elle avait elle même brodées de fils scintillants et de perles. Sentant la faim lui tirailler l'estomac, elle décida d'aller voir ce qu'Alberta lui avait préparé. Elle chercha son téléphone mais ne le trouva pas, ni sur le lit ou le bureau, ni dans la salle de bain. Elle ne trouva pas non plus le brassard. « Zut, j'ai dû le laisser en bas ».

Les cheveux encore humides, elle s'élança dans les escaliers qui menaient au grand hall. Elle dévalait les marches en regardant ses ballerines briller sous la lumière. Lorsqu'elle releva la tête, elle le vit. Il était là, en bas, vêtu d'un blouson de cuir noir, d'un jean noir. Il tenait à la main son casque,visière ouverte et des gants noirs et rouges. Il la regardait fixement. Elle s'arrêta net, le cœur battant, la bouche entrouverte. Ses mains se mirent à trembler. Elle perdit la moitié de son quotient intellectuel en un clin d'œil et ne sut que dire pendant un temps qui lui parut une éternité. Elle articula enfin un timide et laborieux :

-  Bonsoir Johnny

Bonsoir mademoiselle répondit-il de sa voix ferme.

Isaline descendit les quelques marches qui restaient, son cerveau fonctionnait à 200% : « Trouve quelque-chose à dire, trouve un truc, parle bon sang, il va partir !!!!!! dit quelque-chose !  N'importe quoi». Elle tenta de gagner du temps.

-  Heu.... Johnny, je.....

-Mademoiselle ? 

Isaline senti le sol devenir meuble, elle allait défaillir, mourir de honte, ses tempes battaient très fort, elle devait avoir l'air stupide, cherchant désespérément quelque-chose de cohérent à formuler, puis les mots s'échappèrent presque :

Johnny, je me demandais si vous seriez là pour ma soirée d'anniversaire.

« Bravo ma belle ! Se sermonna-t-elle, tu ne pouvais pas trouver plus débile! » . Cependant, le jeune lui répondit, avec une légère hésitation :

Et bien, Mademoiselle, je suis de service en effet.

Ah, oui..... enfin non, je me posais la question, de votre présence, quand je soufflerais mes bougies....

Elle pesta contre cette demande inouïe qu'elle sortait d'elle ne savait où , sans savoir comment s'en dépêtrer. Johnny la fixa étrangement.

Vous voyez, poursuivit-elle, vous êtes à mes côtés depuis longtemps maintenant, votre présence me serait chère finit-elle dans un souffle.

Il resta quelques instants à l'observer. Rien ne paraissait sur son visage. Il finit par répondre calmement :

Je ne sais pas si cela est possible, je serais au travail, et je ne sais pas si Monsieur sera d'accord.

Mortifiée par la tournure qu'elle avait donné à cette rencontre inopinée, Isaline se maudissait intérieurement. Elle avança vers lui et elle le sentit reculer imperceptiblement. Elle tenta d'abattre une dernière carte

Je pourrais lui en parler, cela me ferait très plaisir, viendriez-vous ? 

Elle planta ses yeux dans le brun noisette de ceux du garde du corps et plaça sa main sur son bras, surprise elle-même de son audace.



Johnny resta muet un long moment.

Ce soir il sortait. Pour se changer les idées. Il l'avait vue arriver, volant littéralement au dessus des marches et n'avait pu s'empêcher de noter sa silhouette fine, son maintient, et ses cheveux qui sautaient en cadence au rythme des marches. Il eût peur qu'elle ne tombe mais elle l'avait remarqué. Elle était belle, avec cet air interdit et ses grands yeux attentifs. Son métier lui avait appris à ne jamais montrer ses émotions, il contrôlait donc parfaitement son expression, mais Johnny avait soudain eu chaud, les battements de son cœur étaient plus rapides. Il n'avait su comment répondre à sa demande. Il s'était retranché derrière son devoir, mais la petite n'avait pas l'air de vouloir s'arrêter là. Il l'avait pressenti, déformation professionnelle sans doute, il l'avait vu se mettre en mouvement pour s'approcher. Il avait reculé car il savait que c'était à éviter, il ne fallait pas, cela allait lui apporter des ennuis, il ne pouvait pas, il était au travail. Mais elle insistait, insufflant en lui un espoir qu'il refusait de s'octroyer. Elle était là, toute proche, il se sentit faible. Il la laissa poser la main sur son bras. Johnny tournait sa réponse dans tous les sens mais rien de raisonné ne lui vint à l'esprit. Johnny Cooper restait muet, Johnny Cooper ne savait comment agir. Une première ! Il la regarda encore. Ses yeux noirs semblaient perdus au loin mais lorsqu'ils croisèrent les siens, il vit son expression changer. Elle allait sonder son esprit tant elle semblait espérer sa réponse. Bien-sûr qu'il aimerait venir, et même lui tenir la main pour souffler ses bougies.... et davantage encore. Comment s'éloigner. Il fallait le lui dire, lui dire que non, rien de tout cela ne pouvait avoir lieu. Il détourna le regard. Il posa sa main sur celle d'Isaline pour la préparer au refus, mais aussitôt il la vit rayonner de joie, elle le regarda avec une intensité qui le transperça, il sentit son cœur se gonfler, ses membres fourmiller. Johnny laissa tomber un peu ses gardes et la regarda à nouveau dans les yeux et sentit ses dernières barrières céder. Il avait tellement, tellement envie, tellement besoin de la serrer contre lui qu'il ne sut lutter plus longtemps. Abandonnant sa main il lui effleura la joue, et comprit qu' il était perdu tant son corps s'emballait pour elle. Johnny lâcha prise et s'inclina vers son doux visage le cœur battant.



Isaline n'aurait su décrire le bonheur intense de la main de son beau garde du corps sur la sienne après le long et pesant silence qui avait régné. Elle ne voulait plus le quitter des yeux, même s'il détournait le regard, elle ne put cesser d'appeler par le sien à ce qu'il lui répondit. Elle comprit qu'il n'était pas dupe de sa question, sinon il n'aurait pas été si silencieux. Elle n'avait qu'une envie, qu'il la prenne dans ses bras et l'embrasse. Toute tendue vers lui, elle vit enfin le voile impassible se lever progressivement, elle sentit Johnny la regarder enfin comme une femme. Il lui effleura la joue. Elle cru défaillir de bonheur. Elle criait silencieusement son désir qu'enfin il se décide. Et elle fut exaucée.

Johnny se pencha vers elle et posa doucement ses lèvres sur les siennes, elle eu un léger gémissement qui encouragea son compagnon. L'enlaçant de sa main libre, il l'attira plus à lui et l'embrassa délicatement, puis passionnément. Isaline s'abandonna contre cet homme auquel elle avait tant rêvé ces dernières semaines, elle savoura son baiser et le lui rendit avec un bonheur qu'elle n'aurait pu décrire avec des mots. Il caressait ses cheveux et elle passa ses mains derrière lui malgré le harnais du holster, sentant son dos puissant frissonner sous ses doigts. Son propre sang battait violemment dans toutes les parties de son corps, elle n'aurait put dire dans quelle position ni où elle se trouvait. Elle ne vivait cet instant que dans le baiser de Johnny Cooper.



Johnny avait senti le doux contact des lèvres d'Isaline l'embraser en un instant. Il l'avait embrassée et la réaction de la jeune fille l'avait enfiévré davantage. Il la tenait contre lui avec une intense sensation de félicitée. Leur baiser devenait passionnel. Il avait envie de la serrer encore, de la caresser, de la déshabiller là, tout de suite. «  My God ! » . Soudainement, il se raidit. NON ! Non, il ne fallait pas, non il n'avait pas le droit, elle n'avait que 20 ans, 12 de moins que lui, c'était bien trop, et elle était la fille de son patron.

Au prix d'un effort conséquent Johnny, se détacha d'Isaline. Il lui murmura « nous ne pouvons pas » . Elle le regarda hébétée, un peu essoufflée, les joues rouges. Elle était magnifique. Il ne put la laisser sur ses mots et il lui déposa un dernier baiser furtif sur les lèvres avant de s'éloigner et de sortir, la laissant seule dans le hall, chancelante, décoiffée et un vague sourire aux lèvres.


Quand Isaline bougea enfin, Johnny était parti depuis longtemps. Elle alla récupérer son téléphone et remonta jusqu'au salon dans un état un peu second, à mi chemin entre l'excitation et le désespoir. Dans le couloir, elle esquissa quelques pas de danse murmurant « il m'a embrassée ! » et arrivée au salon, elle l'entendait dire «  nous ne pouvons pas ». « Me voilà dans de beaux draps » pensa-t-elle en se dirigeant vers le canapé.

Elle aperçu le plateau que lui avait préparé Alberta. Cette chère Alberta ! Elle avait déposé des petits mets « doudous » qu'Isaline affectionnait comme ce hoummous avec du pain pita. Elle en raffolait ! Elle y plongea aussitôt un morceau de pain qu'elle ressorti généreusement garni et qu'elle engouffra sans autre cérémonie dans sa bouche. Elle regarda ensuite les petites tomates cerises garnies de fromage de chèvre et les mini croques monsieurs qui accompagnaient les feuilles d'endives et la sauce au fromage blancs et aux herbes et elle eût faim. Elle alluma la télévision, et arrêta son choix sur un reportage qu'elle regarda d'un œil distrait, et picora le plateau télé avec entrain. Elle ne cessa de se repasser les événements de ce soir. Elle revit le regard de Johnny s'adoucir et s'intensifier avant qu'il ne l'embrasse, elle revécu cent fois l'étreinte et le baiser qu'ils avaient échangé. Isaline savait en son fort intérieur qu'il partageait ses sentiments, il ne pouvait en être autrement. Elle le savait viscéralement. Alors elle ne savait que faire de cette phrase glaçante « nous ne pouvons pas » suivi de ce tout petit baiser. Qu'avait-il voulu lui dire. «  T'es sympa mais ça s'arrête là » ou «  je t'aime mais on ne sortira jamais ensembles » ou encore « J'ai trop peur de ton père » ? Isaline n'avait pas peur de son père, elle était certaine qu'il comprendrait. Il verrait bien la force de ce qu'elle éprouvait.

La soirée avançant, cependant, elle était de moins en moins sûre d'elle. Elle en vint à penser que Johnny s'était simplement senti mal à l'aise et contraint. L'aimait-il vraiment ou avait-elle inventé ce qu'elle souhaitait recevoir de lui ? En proie aux doutes, elle décida d'attendre qu'il rentre, il n'était pas question qu'elle reste sur ce type de doute, ça serait encore pire. Elle n'avait de souhait que de se retrouver au creux de ses bras. Elle entrouvrit la baie vitrée et se plaça dans son fauteuil favori près de la terrasse, espérant entendre Johnny rentrer. Elle ouvrit un livre dont elle ne lut que quelques pages sans en comprendre le sens.


Au pub « The Murrayfield », Johnny jaugeait les dernières boules du tapis. Il tournait autour du billard en scrutant les différents angles de vue et réfléchissait à la meilleure tactique. Il marchait à la manière d'un chat, sans faire de bruit, glissant presque autour des boiseries. Ses amis le regardaient un peu surpris. Johnny n'avait pas très bien joué, il avait loupé des coups dont il maîtrisait parfaitement la technique habituellement. Ils le taquinèrent mais il s'était contenté de hausser les épaules.

Il se concentra, se positionna sur le bord du billard, détermina minutieusement son angle de tir. Après avoir une dernière fois évalué la force nécessaire, il tapa la boule noire et plaça les deux autres restantes dans les trous. Bingo ! Son équipier siffla et les autres le félicitèrent. L'équipe perdante offrit une tournée et tous les joyeux lurons se retrouvèrent autour d'une bière et d'anecdotes sur leur semaine de travail. Si Johnny donnait le change, il n'en était pas moins pensif. Il n'avait pas vraiment pu cesser de penser au baiser avec Isaline, ni au désordre que cela avait provoqué en lui. Il ne remarqua d'ailleurs pas la jolie blonde au bar, qui le regardait avec convoitise depuis qu'il jouait ce soir. Il était en prise avec des sentiments contradictoires, et il détestait ça. Il était toujours en capacité de réagir et de prendre des décisions, mais là, c'était le chaos total. Il se fit violence pour participer à la conversation générale jusqu'à ce qu'un premier joueur s'en aille. Il prit alors congé lui aussi et regagna sa moto, une Kawasaki noire mat au carénage stylé. Il enfourcha l'engin, fixa son casque et décida de rouler un peu pour réfléchir.

Au fil des kilomètres, Johnny s'apaisa. Il ne voyait pas beaucoup de possibilité. Soit il luttait, soit il se laissait porter et il aviserait. Cette dernière possibilité lui laissait entrevoir d'énormes changements qu'il n'avait jamais eu à envisager. Une dernière inconnue devait cependant se résoudre. Isaline était-elle vraiment éprise de lui, ou tout cela n'était-il qu'une passade, un caprice ? Il décida qu'il valait mieux prendre ses distances. Il verrait bien ce qui se passerait, si la jeune fille le vivait bien, il continuerait ainsi. Dans le cas contraire... cela serait fort compliqué...

Il s'arrêta au stop et prit la direction de Cassis pour rentrer. Il avait pris sa décision. Arrivé devant la propriété, il passa son badge à la borne et le portail s'ouvrit. Pour ne pas faire de bruit, il décida de stationner devant son jardin et coupa rapidement le moteur pour glisser en roue libre jusqu'à son appartement.


Isaline l'entendit. Elle reconnu le vrombissement caractéristique de la moto et se jeta sur le plaid qui se trouvait là pour sortir sur la terrasse. La nuit était fraîche encore et elle frissonna en se dirigea vers la rambarde qui surplombait le jardin de Johnny. Elle savait qu'il préférait ne pas ouvrir le garage la nuit, et elle le vit arriver. L'ennui c'est que de la terrasse elle ne percevait pas grand chose si ce n'était une minuscule partie de pelouse derrière la haie qui séparait le jardin de la propriété. Bientôt, elle ne vit plus rien. Elle l'entendit mettre la béquille et se pencha pour espérer le voir. Il ouvrit le portillon et retira son casque. Elle vit sa chevelure châtain claire ébouriffée briller sous le halo de lumière de la lampe extérieure qui venait de s'allumer à son passage. Son cœur se serra, elle avait envie de l'appeler. Elle avait envie de courir le rejoindre, mais elle ne bougea pas, couvant du regard la silhouette qui se découpait entre pénombre et lumière. Il avança d'un pas et s'arrêta, hésitant. Le cœur d'Isaline sembla s'arrêter. Johnny leva la tête et la fixa quelques secondes. Elle se redressa et le fixa à son tour, immobile. Puis elle le vit sourire. Il lui fit un signe de la main auquel elle répondit, mal à l'aise, ne sachant ce qu'elle devait en penser. Il avança encore d'un pas et leva à nouveau les yeux vers elle. Un sourire flottant sur ses lèvres, Johnny lui fit un clin d'œil et lui envoya un baiser de sa main qu'il souffla vers elle, puis disparut. Isaline s'assit, sur une chaise et resta pantoise quelques minutes. Elle se leva et se dirigea rêveuse vers sa chambre, sans prendre la peine de refermer la baie vitrée. Elle se sentait enfin heureuse et comblée, après la confusion de ses derniers jours. Elle se laissa choir sur son lit les bras en croix, elle fixait le plafond en souriant.


Dès qu'il arriva à proximité de la maison, Johnny avait repéré la silhouette de la jeune fille surplombant le jardin. Il avait décidé de ne pas lui montrer qu'il l'avait vue, il lui fallait encore du temps. Il gara donc sa moto et retira la clé. Il franchit l'entrée du jardin. Il sentait son regard posé sur lui, il sentait une force inconnue l'immobiliser, il sentait une pulsion irrésistible lui commander de lever la tête. Se pourrait-il qu'il soit vraiment amoureux d'elle ? Il la regarda malgré tout, elle était magnifique, emmitouflée dans sa couverture, droite, grave, digne. L'inquiétude se lisait sur son visage. Elle l'avait attendu exprès pour savoir. Johnny lui sourit, puis hésita, il avança d'un pas mais ne pu en rester là. Comme lui elle devait connaître le doute. Elle voulait savoir dans quelle direction aller. Elle ne s'en fichait pas le moins du monde. Il leva à nouveau le visage vers elle, il voulu la rassurer, il lui fit un clin d'œil qui eu pour effet de décrisper ses traits. Heureux, Johnny Cooper s'enhardit et lui envoya un baiser silencieux , satisfait de sa pirouette, il rentra chez lui pour éviter de se laisser emporter davantage.

Il se cala dans son canapé et se mit à chantonner une version personnelle de « Take my Breath away »3 , aucun membre de son entourage n'aurait pu imaginer cette scène qui ne lui ressemblait, a priori, pas le moins du monde. Mais ce soir, il ne voulait plus contrôler, il voulait juste savourer la douceur de se sentir désiré comme il l'avait perçu dans les yeux de la belle Isaline. Désiré par une personne intelligente, cultivée et magnifique. Ce qui se passerait ensuite était sans doute impossible à éviter, et Johnny prit le parti de ne pas aller à contre courant.

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La suite ici

http://welovewords.com/documents/solitaires-ch-4

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Si vous avez quelques minutes, laissez moi vos impressions en commentaires, cela m'aidera sans aucun doute


1Aller en piste mon garçon

2Mon pauvre garçon, tu deviens

fou !

3Chanson d'amour B.O.F. « Top Gun » interprétée par Berlin.

  • j aime beaucoup et persso je ne trouve pas ça "lent"..Juste ce qu'il faut ! attention aux rares fautes d 'ortho ou ponctuation, mais j ai hâte de lire la suite

    · Il y a presque 9 ans ·
    Default user

    karinette

    • Merci, je vais relire!

      · Il y a presque 9 ans ·
      F%c3%a9e 1

      rainette

  • C'est bien comme l'a dit Patrick un peu lent. Pas dans le style mais dans l'action. L'écriture est très bien c'est dans le déroulement. Mais je suis avec attention en tout cas =)

    · Il y a presque 9 ans ·
    29101241 968969949927957 7769918596666359808 n

    Sergueï Bonal

    • Ok, je vais revoir ça (quand ce sera terminé, j'ai déjà essayé, je n'y arrive pas très bien encore. En réalité, j'ai plus de chapitre en magasin que de publié mais je les revois déjà avant de les mettre ici). Dites moi quels sont les passages qui vous ont semblé les plus molassons?

      · Il y a presque 9 ans ·
      F%c3%a9e 1

      rainette

  • tout est bien installé,,, un peu lent à mon gout ,,les nombreuses descriptions ralentissent l'action...un peu trop rose, ou lisse à mon gout pour l'instant,,,mais rien à dire pour le style et l'écriture... ;-) à bientot ;-)

    · Il y a presque 9 ans ·
    Img

    Patrick Gonzalez

    • Merci. Il est probable que cette impression persiste si la romance ne te plait pas beaucoup. Pour les descriptions, je note. Pourtant je ne suis pas très portée sur le descriptif en détail ( traumatisée par Zola!) Donc je vais voir ça de plus près

      · Il y a presque 9 ans ·
      F%c3%a9e 1

      rainette

    • fais à ton idée, c'est juste mon ressenti pour l'instant, rien de plus... ;-)

      · Il y a presque 9 ans ·
      Img

      Patrick Gonzalez

    • Mais si je demande des avis c'est bien pour en prendre note. Si ce sentiment revient plusieurs fois, je verrais pour reprendre certains passage. Sinon, rien ne sert de demander les avis de lecteurs. ;) Merci de me donner le tien

      · Il y a presque 9 ans ·
      F%c3%a9e 1

      rainette

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