Stromae te fait ta fête, avec fromage et dessert

"Les chiennes de garde", "François Hollande", "Kate Moss". On les entend filer, sans même trop s'arrêter sur chacun. Pourtant Stromae sème dans son album des noms que vous avez forcément entendus cette année. Du lecteur de Télérama au fan de Vice, récupérant au passage monsieur JT de 20h. "Racine carrée" est avant tout un brillant album d'actu. Qui a la malice de foncer cornes dehors dans des thématiques à vif, en habillant son assaut d'une poignée de main. En pleine polémique sur le gender, Stromae, visionnaire cynique, performe d'ailleurs en prime-time sur Tous les mêmes. Il fusille les machos, vanne les féministes. Il se fait le mégaphone du ras le bol des électeurs, dresse un tableau consumériste de Twitter (qui fait sa gloire de surcroît) et refait le portrait à tous les pères démissionnaires. Libre. Au milieu, posé sur les braises, un hommage sensuel à Césaria Evora. Au milieu encore, enfouie bien plus loin, Formidable, une non-chanson d'amour, un fragile et craintif hymne à l'espoir vulgairement enroulé dans un phrasé pathétique. Partout, Stromae parle à des égarés ordinaires sans prétendre en faire des héros extraordinaires. Hipster mais pas snob, fin mais accessible, véhément sans jamais être agressif, touchant sans tomber une seule fois dans le misérabilisme. Révolté. Révoltant. Stromae donne une leçon d'humilité dans 13 titres de génie. Et emballe le tout dans une nonchalance rafraîchissante. "Allez vous faire foutre, j'ai un match de foot". (10/10)