T.C.

Ali'

Juste avant, la vie était belle. Juste après, on ne sait plus comment on s'appelle.
C'est ainsi que je l'ai ressentit.

A ce moment là, je vis dans un charmant petit deux pièces, en plein centre ville, et la vie est légère. Nous sommes fin juin. L'air est doux, la ville est fleurit, et j'aime les poires.
Je ne le sais pas encore, mais la fête de la musique que nous avons célébré il y a quelques jours deviendra un de mes plus chers souvenirs.

Je viens de rentrer. Le téléphone sonne et affiche «Maman Flo»

Avec Florian, nous avons emménagé en décembre dans ce qui devait être notre nid d'amour... Il s'en est envolé fin février... et moi ben, me suis trouvée une coloc' !
Florian et moi avons eu une histoire faite d'amour et de ruptures, à proportions égales. Et de l'amour, nous en avions eu beaucoup !
Il a tout juste 20 ans, les miens arriveront dans 1 ans. C'est avec ma coloc' et ses invités allumés du moment que je me suis rendu à la fête de la musique. Florian nous y a rejoint.
La soirée est douce, la musique forte, la glace rafraîchissante, la boisson alcoolisée, les gens heureux.

A la lecture du nom de mon appelant, mon cœur s'emballe et je décroche. Puis il s’arrête : «Allô?»

Florian se repend en regret depuis déjà trois mois. Je ne peux pas rayer la complicité qui nous unis. On tente l'approche amical mais il ne s'en contentera pas. L'unique chose, qui me retient de replonger encore, reste le souvenir des ruptures passées qui elles, sont loin d'être unique...
Je tiraille. Il a compris qu'il avait des problèmes à régler. Des choses qui ne me concerne pas. Qui nous empêchent d'être heureux. Il a arrêter de fumer, de boire... il donne une direction à sa vie.
Il m'appelle matin, midi et soir... au minimum et sans exception.

Je reprend : «Comment ça va ?»
A sa réponse, qu'elle me donne sans détour, mon souffle imite mon cœur, déjà à l'arrêt.
Je suis dans ma cuisine, debout en direction de l'évier. Je ne me sens même pas vaciller. Je m'adosse au mur mais il n'a pas su me soutenir.
Quand elle termine sa phrase, je suis à terre, en larme. La gorge serrée, l'air ne passe plus. Je suffoque mais je m'en fou, ça m'empêche de crier. La peine, la détresse, la révolte, l'impuissance... le tout se suit ou se mélange ou rien de tout ça... Je ne sais pas, et je m'en fou.

Florian n'avait pas appelé ce midi... ce matin non plus. Je m'en étais réjouis : Un peu d'air !
Florian n'est pas rentré cette nuit. Il a été trouvé au matin, accidenté.
Il a eu de la «chance» parce que c'est une route qui n'est pas fréquenté avant la fin de la matinée mais que ce matin là, les ambulanciers chronométraient le trajet. Il a eu de la «chance» parce que, l'hélicoptère, qui était son seul espoir, n'avait pas l'autorisation de décoller dans l’immédiat, mais que le pilote a pris sur lui.

Il a eu de la «chance». La chance l'a conduit en «réa». Il est dans le coma. Il le restera 3 mois.
Les soins intensifs suivront, encore deux mois. Puis la rééducation. Puis le reste de sa vie.

1

Pendant six mois, je me rendrais chaque jour sans exception à ces cotés.
Il n'était ni défoncé, ni alcoolisé.
Il était le «Sam» de la soirée. A six heures du mat', il était épuisé.
Plus tard, il racontera, que c'est parce qu''il a vu une biche qui lui souriait...
Plus tard, les infirmières diront qu'il a eu de la chance de se remettre aussi bien, aussi vite.
Plus tard, je garderais en moi cette fête de la musique. Nous avons eu de la chance de passer une si belle soirée, avant son «TC*».

*Trauma-crânien

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