Tombé pas de bourrée glissade grand jeté.

odeanox

ορχούμαι ζώσα και αγία / Καθι, Σιριελ, Ραχαελ - et alii.

Il y a deux ans je n'étais rien.

Qu'une ode à la souffrance, une plaie perpétuelle.

Réclamant amour désespérément.

Honte du corps, haine de soi, mur de briques sans fondations.

Écroulement.

Il n'y avait rien.

Du tout.

Que l'éternel recommencement, celui qui vise à tout détruire, tout le temps.


Un jour j'ai vu sur le papier cours de danse classique et je me suis dit : pourquoi pas. Il y avait eu Black Swan, et puis des choses inconscientes je me rappelle même pas.

Alors j'y suis allée.

La première année fut galères entremêlées d'émerveillements. J'étais vraiment capable de faire ça. Puis au bout de trois mois, commencer à maîtriser, le truc inimaginable. Et cet amour, cet amour fou qui me prit, qui ne me quitta plus.

La prof, ça n'allait pas, alors j'ai fini par partir après avoir hurlé. Passons.

Mais je bénis cette engueulade. Je la bénis tellement. De ces moments qui paraissent horribles sur le coup mais se révèlent peu après nécessaires à tout fondement. Du chaos qui fait naître les étoiles, les étoiles les plus brillantes de toutes les galaxies réunies.

Cours de deuxième année. Le rythme est différent. Je suis passée d'un petit studio magnifique pouvant accueillir quinze personnes à une salle gigantesque complètement défoncée où parfois nous nous entassons à soixante. La prof a les yeux partout. Connaît tout le monde. N'a de cesse d'étaler son énergie. Rit. Râle. Se révolte, sans cesse. M'intrigue. Et le miracle apparaît : une rencontre.


Il y eut cette rencontre. Elle fut suivie d'autres. Quelques-unes, mais suffisamment. De sublimes personnes. Les cours de danse classique accueillent une faune beaucoup plus éclectique qu'on ne croit. Des personnalités plus qu'extravagantes. Des meufs qui ont morflé. Des gens qui sont revenus d'on ne sait où. Loin de tous les clichés de la bonne petite fille pétée de thunes droite dans ses bottes et dans son bulletin de vote. Loin aussi de la nana torturée qui n'a plus ses règles et s'automutile. Au contraire.

Nous avons morflé, mais la danse classique nous a aligné la posture et consolidé l'estime de soi.

Nous sommes devenues fortes. Nous sommes devenues grandes. Plus jamais personne ne nous marchera dessus. Notre port de tête est plus qu'élégant, et nous tenons encore et encore parce que depuis qu'on a commencé on a pris un centimètre au moins de plus et c'est un sacré vertige que de tout voir de plus haut.



Je n'ai toujours pas trouvé l'amour.

Je rigole toujours aussi fort, je suis épuisante, je ne suis pas d'accord, j'aime aussi bien avoir raison, je m'engueule avec les gens, je suis bordélique, je m'étale partout.

Mais je n'ai plus honte.

Je ne me demande plus ce que je fais sur terre et si je gêne. Je m'oppose catégoriquement désormais à ce qui quiconque me dise : tu dois changer telle ou telle chose. Je réponds désormais : je te prends comme tu es, alors prends-moi comme je suis, sinon tu connais la sortie.


J'ai ma place ici. Peu importe si je gêne. Je suis qui je suis. J'ai ma place ici.


Je vais bien.

C'est vrai, cette fois.

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