Tout contre soie

Vincent Z

Prenons le temps de fantasmer...

Le vent soufflait fort sur le bord de la plage Da Catarina, une plage de sable gris. Angelo, assis les pieds dans la mer, tenait une pieuvre. Un pêcheur, cet Angelo, un pêcheur de mollusques, avec dans ses mains, ces bras tentaculaires.


Jane, guidée par son intendante, se rendit sur la plage et derrière un drap transparent se dévêtit, laissant le regard d'Angelo divaguer jusqu'à elle. Jane, l'épouse d'un diplomate anglais, passait, depuis six mois, toutes ses journées assise au même endroit, dominant la plage. Toujours accompagnée de son intendante, une vieille femme laide, elle lisait ou écrivait sous le regard des hommes. Jane avait la poitrine opulente d'une Jane Mansfield et la chevelure noire d'une Sophia Loren.


Angelo, tenant l'animal, perdait son regard près du drap blanc, devinant le corps de Jane, enfilant son maillot de bain. Comme dans un fruit défendu, il mordit dans la pieuvre. Il s'imagina, telle cette pieuvre, enlaçant Jane de ses multiples bras, la caressant, la prenant de toutes parts. Les seins, le corps tout entier, recouvert de ses ventouses fantasmagoriques. Elle était son fantasme, son envie, tous les jours son rendez-vous. Jusqu'au jour où Jane oublia malencontreusement son soutien- gorge en soie noire à même le sol. Oubli ou appel ?

Angelo prit le tissu dans sa poche et attendit que le soir vienne pour se rendre devant la maison du diplomate. Il se faufila devant la maison, et patienta sous la chaleur de la nuit tombante. Il observa la fenêtre de la chambre et déshabilla du regard les formes de la jeune femme. Elle se dévêtit lentement, comme sûre qu'on la regardait. Le jeune homme fut pris d'une soudaine envie de la posséder tout entière. Ses mains sortirent le sous-vêtement de soie de sa poche et il se caressa le visage, sentant cette douce odeur de femme au parfum de rose.

De nombreux soirs, il revint comme aimanté d'un désir inaccessible de la regarder nue sans jamais pouvoir la toucher. Rouvrant les yeux et rangeant le morceau de tissu dans sa poche avant de partir, il se répétait qu'elle resterait à jamais son fantasme, ses courbes, ses seins, ses longues jambes, son âme inconnue.

Une nuit pourtant, Angelo entra dans la demeure bourgeoise, ne surprenant pas sa douce occupante. Elle l'attendait depuis tant de nuits ! Jane s'endormit, son prétendant enfin contre son corps, le soutien-gorge noir au pied du lit.


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