Transfert?
divina-bonitas
Avec mes meilleures pensées à Hervé Lénervé
J'ai arrêté de voir des psys après avoir constaté que c'était moi qui écoutait et entendait leurs soucis, analysé parfois qu'ils me faisaient des remarques qui auraient mieux valu pour eux-mêmes. Sentiment pénible de n'être pas à la bonne place.
J'en ai vu trois, trois femmes. La première réduisit le temps de ses consultations de façon drastique. Les 40 minutes étaient devenues progressivement 30 puis 20, temps pendant lequel elle regardait alternativement le bout de ses escarpins à talons aiguilles et sa montre, parfois un point dans le vide derrière moi ou les lames du parquet. Moi je regardais ses lèvres fines ornées de rides, son teint terne plâtré de fond de teint orange, ses cheveux permanentés décolorés censés faire croire à une blondeur qu'elle n'avait plus, ses joues creuses, son maintien rigide, ses bras et jambes croisés, son regard absent, ses quelques remarques dites d'une voix atone, toujours les mêmes, comme si le disque était rayé. Derrière son parfum trop sucré je sentais une odeur âcre désagréable qui actionna mon gyrophare intérieur. Âcreté sans doute due à son divorce, à ses enfants qui s'étaient tirés. Elle s'était toute repliée en-dedans d'elle-même et ça se percevait à mille lieues. Un jour j'entrais, sortit mon chéquier, la payais avant de repartir en lui disant que je ne reviendrais pas.
La seconde me proposait du thé vert dans un cabinet décoré de tentures violettes en velours et d'un divan cramoisi. Constamment vêtue de cuir noir ultra moulant et affichant des décolletés plongeant sans soutifs, une bouche dessinée aux pigments et des yeux charbonneux, des cuissardes ou des talons de 12 cm, je n'ai pas attendu longtemps pour qu'elle me dise que son mari s'était barré avec une autre avant d'entendre tous ses problèmes de grossesses, dans le détail, et toute sa frustration, sexuelle s'entend, toutes ses tentatives de séduction avortées malgré ses efforts multiples. Moi je me disais que les mecs devaient flipper en la voyant, ayant peur d'être bouffés tout crus par cette nana ou collés contre une porte sans avoir eu le temps de dire ouf, paniqués par cette quarantenaire ultra parfumée d'un truc capiteux qui m'asphyxiait les narines, exposant son anatomie et ses problèmes sur un plateau d'un seul coup d'un seul. J'avais envie de lui dire que les hommes peuvent aussi être romantiques, sont sensibles, aiment un peu de mystère, détestent se sentir pris au piège de mantes religieuses et encore plus devoir se supporter les litanies sur l'ex, ce salaud... Je me retins de lui dire que le naturel était sans doute la meilleure façon de trouver l'âme sœur, que montrer un(e) autre que soi au début d'une relation ne présageait généralement rien de bon, qu'elle aurait dû arrêter d'en faire des caisses pour espérer y arriver, qu'elle n'avait tout bonnement pas fait le deuil de son ex et qu'il eut fallu commencer par ça. Elle m'adorait parce que je la faisais rire et que nos séances lui redonnaient l'énergie d'affronter les autres dépressifs incurables de la journée. Tous ceux qui allaient vraiment mal, pas comme moi bien sûr. Les séances d'EMDR tournèrent court et je lui refis le coup de j'entre, je paye et je me tire.
La dernière m'annonça très vite son divorce en cours, ses problèmes de garde alternée, son père mort qu'elle adorait et dont elle contemplait la photo, yeux humides, posée sur son bureau. Je pensais donc immédiatement à un problème œdipien en stand by, eus de la compassion pour ses gosses. Impossible de dire quoi que ce soit sans qu'elle ramène la conversation à elle. Un jour elle me proposa de me recevoir avec mon mari. Nous nous y rendîmes donc. Je la vis fondre immédiatement à sa vue. Elle s'agita sur son siège, tout sourire et dents dehors, bras ouverts et cuisses avec. Elle buvait ses paroles tout en mouillant sa culotte. J'étais devenue transparente. Je décidais de m'éclipser sans bruit laissant mon mari faire le chèque. Je la revis par hasard plus tard, jupe ultra courte en cuir noir et talons vertigineux, haut moulant. Si ça c'est pas un suivez-moi jeune homme...ou moins jeune d'ailleurs. Elle cherchait clairement un substitut paternel dans son conjoint.
Puis c'est mon mari qui décida de consulter, une femme. Au bout de 2 séances elle demanda si elle pouvait squatter un salon de la maison pour y faire des conférences avec un collègue. Prudent mon époux lui dit qu'il fallait qu'il m'en parle. Sans attendre elle lui envoya un mail vif "alors, vous en avez parlé à votre femme? J'aimerais venir ce W.E". Du fait que mon avis était sollicité, je lui répondis que là tout de suite ça n'allait pas être possible, que je voulais discuter de son projet avec elle avant de prendre une décision. Pas de réponse directe. Elle me la fit passer par l'intermédiaire de mon mari qu'elle appela. Je lui écrivis donc que le code de déontologie auquel son statut de médecin la tenait, n'était pas favorable du tout à ce genre d'interactions, que sa façon de communiquer de manière indirecte était un défi à la communication non violente, que je m'étonnais qu'au mépris de toute courtoisie elle ne signe pas ses mails ni ne mette son numéro de téléphone, coupant court de ce fait à toute volonté d'échange direct. Je reçus un autre mail élusif me servant des menteries, comme quoi son projet urgent ne l'était plus et blabla. Elle s'en prit un en retour fort saignant, dans lequel je lui rappelai une fois de plus la nécessaire distance entre un médecin et l'intimité de son patient, avant de conclure que ce que j'attendais d'un toubib était qu'il soigne ses malades avec toute la diligence requise, que je n'étais pas là pour contribuer à son expansion professionnelle en lui prêtant gracieusement et sans savoir pourquoi mon propre cabinet de consultante, consultations où je rencontre beaucoup de gens qui voient des psys depuis 10 ou quinze ans sans aucune amélioration.
Parfois ce qui est rassurant et potentiellement thérapeutique quand on va voir un psy, est qu'on s'aperçoit qu'il est plus malade que le patient. Pas facile comme métier.
arreter de voir des psys, vous n'y pensez pas. qui va les soigner maintenant?
· Il y a plus de 6 ans ·Pas Humain
Essayez un homme!
· Il y a plus de 6 ans ·unrienlabime
Génial!
· Il y a plus de 6 ans ·Pas faux mais tous les psys sont pas fous!
unrienlabime
EMDR ???
· Il y a plus de 6 ans ·Belle brochette de dames psy pas claires du tout dans leur tête ! Celle qui fondait devant votre mari... Sigmund, au secours !
astrov
L'EMDR est une technique pour effacer si j'ai bien compris les traumas ou plutôt désactiver leur nocivité pour le futur. Ah oui Freud quand tu nous tient...
· Il y a plus de 6 ans ·divina-bonitas