Tu seras au pied du lit à nous attendre

zembra

Hongqiao aéroport, je me dépêche de cracher les mots. Shanghai-Pékin, trois heures de vol pour trois jours de tango. Ce n’était pas prévu. Mes chaussures de danse s’étaient résignées à rester dans les rêves ratés et moi à chiquer le temps partout où tu n’es pas, à décompter les jours avant Paris et les douze étages jusqu’à la mort. Il fait trop lourd pour vouloir mourir, je veux juste m’écraser dans un cri lyrique et pouvoir me relever, parce qu’il me faut défier le vide et remplir celui du frigo.

Du noir sur du blanc, tu m’as donc quittée cordialement. Et c’est la douleur devant mon grand-père qui ressuscite sous mes yeux pour mourir de nouveau. Toutes les dix minutes. A chaque relecture. A chacun de tes mots. De Sade peut se crever les yeux avec sa chandelle, je lui laisse les lettres orphelines et le souvenir de mon encre t'innondant la bouche.

En partant, j’ai fait tomber tes cahiers. Je les ai laissés par terre, au pied du lit. Je ne les ramasserai pas. Je ne nous ramasserai pas. Quand je reviendrai de Pékin et plus tard à Paris, quand les oiseaux se mettront à roter sur la jouissance des morues, tu seras comme tes cahiers, par terre, au pied du lit, à m’attendre. Par terre, au pied du lit, à nous attendre.

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