Un coin du voile s'est levé

ake

Lentement la voilà qui s'avance, la tête haute, un léger sourire sur les lèvres, elle dépose des baisers sur les joues amicales qui se tendent à sa rencontre, serre des mains, se présente auprès des jeunes comme des moins jeunes avant de se diriger vers la maîtresse de maison celle-ci l'accompagne auprès du bar et l'abandonne, d'autres l'attendent.

Elle se sert un whisky coca, beaucoup de whisky et peu de coca c'est comme ça qu'elle l'aime, se dépêche de verser le liquide de couleur noire comme si elle avait quelque chose à cacher.

La soirée commence, une soirée jeux pour être exacte. Elle hèle les jeunes et les ramène en direction des tables prévues pour l'occasion sur la terrasse, s'inquiète de leur confort avant de retourner vers ceux de son âge, mais pas pour longtemps rapidement elle s'isole, se cache à l'abri des regards savourant le goût du tabac. Quelqu'un la rejoint, ils semblent discuter du moins de là où je suis mais il est appelé et la voici qui revient vers les lumières, reprend place mais alors qu'elle semble s'intéresser à ce qui se passe sur la table elle ne joue cependant pas.

Après un certain temps que je juge assez court, elle se lève et se dirige vers les « jeunes » faisant la conversation, glissant une blague par ci, par là, chose qu'elle ne faisait pas sur sa table là bas...cette table dédiée au scrabble à sa demande et auquel elle ne jouera pas. Non. Elle jouera ce soir mais pas à créer des mots, non elle essaiera de faire revivre une image tirée du passé ; naviguant entre les jeunes et la cuisine, participant aux préparatifs, poussant les jeunes à manger, boire, intervenant dans leurs jeux, mais jamais aux adultes elle ne parlera, ni même ne sourira.

L'heure passe, l'excitation descend, tout est plus calme d'un coup, mon regard se pose sur elle assise un peu à l'écart, les yeux dans le vague, elle semble si seule....

Rêveuse solitaire, quel secret veux-tu cacher pour qu'aux autres tu ne veuilles te mêler ?

La tête s'abaisse, le menton touche la poitrine on dirait qu'elle dort, son corps se redresse et elle se lève toujours aussi altière et disparaît.

J'apprends quelques minutes plus tard qu'elle est en train de « mourir » dans le salon.

« Mourir »

Sans le savoir ce jeune homme que je connais peu à réussi à te cerner. Cette soirée tu voulais y aller, tu m'y as même forcée et pas un seul moment tu n'as semblé l'intégrer, te contentant de parler aux plus jeunes et d'aider en cuisine comme si le fait de te rendre utile te permettait de te cacher.

Je me souviens d'autres soirées où tu étais belle, le sourire éclatant, le verbe précis, les plaisanteries spirituelles. Souvent à cause de cela tu passais pour une femme hautaine mais j'étais si fière, tu étais ma Reine, la femme forte que personne n'osait houspiller, celle qui par son seul regard faisait taire le plus impertinent.

Le temps a passé je sais, tu as connu des coups durs, des hauts et des bas, je t'ai vue descendre, t'ai aidée à remonter, t'ai vu rechuter, me suis éloignée pour protéger ce moi en construction qui se perdait à vouloir te sauver.

Ce soir je t'ai vu si faible, si triste, personnage éthéré d'une soirée animée...

Oh Maman que t'est-il donc arrivé...

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