variation houellebecquienne

petisaintleu

Je préfère la femme mûre, dans la mesure où elle a passé l'âge de la parturition – terme bientôt éculé à l'heure où tout est bon pour fuir la naturalité, y compris la mise bas – et qu'elle ne se fait plus d'illusion sur l'âme masculine, à tel point que la majorité a lâché prise, abandonnant les fausses promesses à l'eau de rose pour dévier vers les chemins plus sulfureux et visuels du sexe sans tabou, de l'éjaculation faciale au fist fucking – j'entends déjà les railleurs monter au créneau, se moquant de mon classicisme sur ces pratiques depuis longtemps abandonnées. Que voulez-vous, je suis d'une nature old-school et orthodoxe – appuyée sur ses coudes pour ne pas en manquer une goutte.

Ce n'est pas que je rejette les seins et les cuisses fermes d'une jeune femme. Mais il lui manque le moteur essentiel, le seul qui soit capable de faire bander mon vit de quinquagénaire : le vice.

Elle dispose pourtant de tout le bagage théorique par le biais d'internet et c'est cela qui est dramatique.

Elle est incapable d'apprécier toute la finesse d'une double pénétration ou d'une gorge profonde.

Elle n'est que l'objet d'un mécanisme mimétique. Elle s'empiffre de foutre comme elle le fait pour une série sur Netflix. Elle pompe ou se fait enculer comme elle tchatte ou surfe sur un site marchand, pour meubler le temps dénué de toute perspective face aux enjeux écologiques et aux perspectives économiques, politiques et sociétales.

Pour y remédier, je ne vois qu'une solution, remonter à la source avant qu'elle ne croupisse dans l'ignorance, l'hypocrisie et les faux-semblants de notre monde occidental.

C'est lors d'un repas chez des amis que j'eus la révélation. Ils avaient invité des connaissances professionnelles de madame, de parfaits inconnus pour moi, accompagnés de leur fille, Sidonie, 18 ans.

La conversation tourna rapidement autour de mon travail d'écriture qui, je dois l'avouer, flatte tout autant mon ego que ma queue, grâce aux bouches expertes de lectrices conquises par ma plume.

Ce n'est que plus tard que je réalisai comme elle buvait mes paroles, signe avant-coureur d'une inéluctable séance de baise dans le studio que j'avais expressément acheté rue des Vignoles.

Sidonie rougit, créant un contraste avec la blancheur de son corsage, quand sa mère vanta qu'elle aussi aimait écrire. Elle avait remporté en seconde le premier prix de la nouvelle de l'académie de Versailles.

Après deux verres de vin blanc, j'étais un peu gris et ma prostate m'imposa une pause urinaire. Comme à mon habitude de célibataire, j'omis de tirer le verrou.

Je ne prêtai pas attention que l'on ouvrît la porte, tout aussi discrètement refermée, jusqu'à ce que je ressentisse une main posée sur ma bite. Il me fallut cinq bonnes secondes pour réaliser ô combien elle était douce, encore vierge des agressions quotidiennes du Paic citron.

Je ne sais pas si c'est le gémissement ou l'érection qui survint en premier, détournant mon jet de pisse de la cuvette.

Quand elle me susurra « Ne me dites pas que vous n'appréciez pas ça », je saisis son autre poigne pour la poser sur mes couilles.

À un « Il faut faire vite Monsieur, pour ne pas attirer l'attention, mais je vous promets que l'on se reverra très bientôt » répondit la plus longue et exquise décharge que je n'eusse plus connue depuis des lustres.

L'été passa. J'errai comme une âme en peine dans la capitale. J'avais refusé de me joindre à une croisière en Sardaigne. Mon éditeur s'inquiétait que je ne rendisse pas à temps une série de nouvelles qui devait paraître en novembre dans une prestigieuse revue littéraire. Je repoussai même une séance de jambes en l'air avec une Japonaise qui me reconnut alors que j'étais plongé au Louvre dans une piéta de Rosso Fiorentino. C'est dire, car je n'ai jamais éclipsé une partenaire du Soleil-levant, la quintessence de la sainte-nitouche. Pris de remords pour ma pine en peine, j'optai pour la prophylaxie en me déchargeant dans une Allemande insipide le soir-même.

Le téléphone fixe sonna à la mi-septembre. Je fus à deux doigts de ne pas décrocher, tant il me parût incongru que l'on m'appelât sur cette antiquité.

C'était la mère de Sidonie qui avait obtenu mes coordonnées par mon ami. Elle se confondit en excuses. Elle me confia que sa fille était paniquée par son entrée en hypokhâgne. Je bandai en un quart de tour.

Je la laissai mariner dix minutes avant d'accepter de la recevoir les mercredis et samedis après-midi.

Le jean et le caleçon sur les chevilles, excitant mon manche, mon éditeur reçut mon travail deux jours plus tard. J'étais libre pour les trois à quatre prochains mois.

Je n'ai pas cherché à faire le vieux beau en m'inscrivant dans un club de gym ou en me faisant blanchir les dents. Je devinai qu'elle s'en foutait, nul besoin d'être un devin pour saisir que la motivation dépassait les apparences.

Quand j'ouvris, je dus me retenir au chambranle de la porte. Comment pouvait-elle maîtriser les codes à ce point, affublée d'un T-shirt moulant transcendé par l'absence évidente de soutien-gorge et d'un short en jean qui ne servait que d'alibi pour ne pas finir au poste ? Elle comprit et me sourit en précisant « Il fait chaud, j'ai souhaité me mettre à l'aise ».

Oui, je sais ce que vous imaginez. Eh bien non. Je lui montrai ma bibliothèque, en sortis deux ou trois ouvrages de grammaire grecque et latine et je l'invitai à réfléchir sur la pensée d'Aristote. Je confesse une turgescence quand elle sirota un Coca à la paille, son regard plongé dans le mien.

Elle ne réapparut plus pendant trois semaines. Il faut savoir se faire désirer.

J'allais consulter mon médecin qui me prescrit un anti-inflammatoire.

Enfin, on sonna.

Elle ne me la joua pas dans le registre de la petite conne boudeuse. C'eut été trop facile. Elle prit la direction de la cuisine et, dans un silence monacal, s'allongea sur le plan de travail, la jupe relevée au-dessus des hanches, sans culotte, ses pieds posés en appui tout au bord.

La suite ne vous regarde pas.

Tous les soirs, je pleure et je prie.

Mon Dieu, pourquoi me laissez-vous entrer en Tentation, le joli sobriquet que je lui ai trouvé ?

  • Waouh, une seconde lecture, moins épidermique, m'a permis de prendre conscience du double effet kiss ccool et de votre cynisme désabusé...
    J'aime votre peinture au vitriol à peine dissimulée d'une certaine frange de la société, décérébrée, boostéee aux followers, incapable de penser par elle-même, déifiant des connards incultes accédant à une certaine notoriété aussi éphémère qu’instantanée et érigeant en mode de vie tout ce que j'exècre, à savoir les faux-semblants, hypocrisie et l'égocentrisme, oubliant que l'hédonisme ne mène à rien.....

    · Il y a presque 6 ans ·
    20180820 215246

    caza

    • Merci Caza pour ce commentaire. Cynisme désabusé, bien vu. Au-delà des mots, l'indécence de notre époque...

      · Il y a presque 6 ans ·
      Cpetitphoto

      petisaintleu

  • Le vice, tout comme la gourmandise, dépend du point de vue que l'on adopte et ne vaut que s'il est partagé et assumé en pleine conscience.
    Apanage des esprits libres et des épicuriens du sexe, il permet de repousser les limites du possible jusqu'à celles de l'imaginaire.
    Heureux celui (ou celle) qui trouve son alter ego.....

    · Il y a presque 6 ans ·
    20180820 215246

    caza

  • Le Vice... est l'atout des romantiques! Car ils ont les sens en effervescence!
    Régalez vous bien avec une femme mûre!

    · Il y a presque 6 ans ·
    00

    gone

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