Veni, vidi, Perdi

Hervé Lénervé

C’est la première fois que je monte au salon de l’agriculture. Je sais, vous, vous dites aller, moi j’y monte, car je viens de mon hameau de Bourgogne.

C'est d'ailleurs la première fois que je monte à Paris aussi et ça tombe bien, car ils ont mis le salon de l'agriculture à Paris. Quand ils feront le salon de la branchitude parisienne, ils le feront chez moi à Pernesiau. Donc, nous les pecnos, on vient avec notre troupeau de toute la France pour les exposer. C'est pas la porte à côté, de plus à Paris, il y a plein d'hôtels qui refusent les animaux domestiques. Essayer de trouver une chambre en disant que vous avez quarante chèvres. Ils nous forcent à mentir et après ils se plaignent que leur déco a été broutée.

Remarquez, moi, je vous dis ça, mais je n'ai rien amené, même pa   s une petite vache laitière, j'ai voyagé léger. En fait, je ne viens pas pour vendre, je viens pour acheter. A cause de la désertification des compagnes à la campagne, je suis obligé de monter à Paris pour chercher une femme, car les nôtres, elles se sont toutes barrées ici, chez vous. Je pense que j'ai toutes mes chances de revenir avec l'élue de la foire de mon cœur agricole.

1er jour de salon.

J'ai déjà dragué toutes les hôtesses, jeunes, belles, elles me vont bien, pour l'instant, j'en ai fait dix, pris quinze râteaux, il doit encore m'en manquer cinq ou six, après je passe aux serveuses des stands alimentaires. Elles sont moins triées sur le volet, mais y en a des biens quand même. Remarquez, moi je ne suis pas exigeant, je prends n'importe quoi, même un top model qui a raté ses exams.

2ème jour de salon. Putain ! Toujours bredouille et j'en ai plein les bottes d'arpenter leur herbe synthétique. J'avais bien accroché avec une, mais elle m'avait prévenu qu'elle était sans papier, moi je m'en fous de l'emballage, un cadeau c'est un cadeau avec ou sans ruban. Ça ne s'est pas fait, car comme toujours les flics s'en sont mêlés. Je les comprends, eux aussi, ils ont du mal à en trouver, ils sont autant méprisés que nous.

3ème jour de salon. J'ai lâché prise et fait tous les stands de produits régionaux en liquide. Bourré une heure après l'ouverture, j'ai fait la fermeture à quatre pattes, dormi dans la paille avec une vache, sympa la laitière, mais j'en ai déjà dix à la ferme, dit, je ne vais pas monter un harem, non plus.

Bon, entre nous, le salon c'est de l'arnaque, n'y montez pas, à c't'heure, si vous voulez trouver l'âme sœur. A Paris il n'y a que de la pimbêche.

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