En 1971, le Bangladesh gagnait son indépendance. En 1971, Apollo XIV s'élançait vers la lune pour la première fois. Oui, il se passa beaucoup de choses en 1971. Seulement, s'il ne fallait retenir qu'un fait, s'il ne fallait retenir qu'un jour sur 365, ce serait probablement celui de la sortie de sticky fingers. Imaginez un peu : Les Rolling Stones, déjà mythiques, débarquent à nouveau avec un album tout neuf, sorti tout droit de l'Alabama. Un nouvel album, certes, mais avant tout, une innovation. Une bombe à retardement. Un bâton de dynamite. Déjà, la pochette plante le décor. On sait où l'on met les pieds. C'est déjà ça. Puis, dès que Brown sugar démarre, le titre s'impose comme hymne, pur et simple. On se demande à peine pourquoi il fut n°1 aux Etats Unis. D'accord, les paroles à tendance sexuelles rappellent que c'est bien du groupe de Jagger qu'il s'agit, d'accord. Mais au delà de ça, c'est un titre détonnant qui nous saute aux tympans. Insolent. Atomique, à tendance jazzy. Les « whou » résonnent encore. Enchainez sur Sway et là, c'est la guitare électrique qui vous revient en pleine figure. Et Bam! D'un coup, d'un seul, on se souvient que l'on écoute l'un des groupes les plus emblématiques des 60's. Sur wild horse, le groupe montre qu'il sait parfois arrêter d'être sexiste. On n'y croyait plus et pourtant, ils l'ont fait. Ils l'ont fait et on se laisse emporter par la ballade. On ne sait pas où l' on va mais, on suit, c'est tout. Une furieuse envie de feu de camp ? Sortez les chamallows et lancez yotou gotta move. Après tout, Un brin de folk n'a jamais fait de mal à personne. Puis, les cuivres annoncent Bitch. Les cordes suivent et on n'a qu'une envie, en être une, bitch. Juste pour se dire que cette chanson entrainante, elle est pour nous. Pour changer de registre, I got blues s'avère être à l'opposé . La chanson porte plutôt bien son nom, il faut l'avouer. A écouter la nuit, seul comme un con, une cigarette à la main de préférence. A éviter chez les âmes suicidaires, bien sûr. Mais rien que pour la justesse de Jagger, on veut bien se prendre au jeu. On ne va pas se mentir, Sticky fingers déborde de surprises. Déjà, parce qu'on a affaire à un équilibre parfait entre chansons rythmées et ballades posées mais surtout, parce qu'on y découvre Sister Morphine. Sister Morphine, c'est l'histoire d'une chanson enregistrée en 70 que le groupe a gardée bien chaud, spécialement pour cet album. Sister Morphine, c'est l'histoire d'une frustration. C'est vrai, pourquoi ont-ils attendu si longtemps pour la sortir ? C'est vrai, pourquoi ? Mais on ne leur en veut pas. On ne leur en veut pas parce que Sister Morphine, c'est les Stones en toute intimité. C'est seulement Jagger et une guitare, en tête à tête. Que demander de plus ? Et puis arrive la fin. La fin de l'album, la fin du voyage. On en pleurerait presque. Sauf qu'on se lève du canapé pour relancer le disque. En 1971, pendant que la jeunesse américaine se rebellait contre la guerre du viet-nam, les Stones sortaient un album indispensable et intemporel. En 1971, Louis Armstrong s'éteignait et les Stones, eux, se repointaient, plus vivants que jamais. Alors voilà, joyeux anniversaire Sticky Fingers. Quarante ans et pas une ride. Chapeau.