Zaza

aude-manadieu

RESUME

L’amour n’est pas l’apanage de la jeunesse.

Zaza et Teddy, la cinquantaine passée, forment un couple uni et aisé. Ils s’aiment tranquillement. Elle est provocatrice et souvent cynique, mais lui, ça lui plait ! Lui, est amoureux, généreux et fiable. Elle lui pardonne  son humour bien à lui souvent exaspérant.

Dans ce livre, Zaza raconte quelques mois de sa vie, denses en événements.

Entre parents de plus en plus dépendants, enfants inconséquents et petits enfants tyranniques, pas le temps de s’ennuyer. De plus, il lui faut gérer toutes ces choses folles qui arrivent, ces situations invraisemblables où elle se trouve piégée.

L’humour et l’auto dérision sont ses atouts, et la tendresse de son mari ne lui fait jamais défaut.

Surgit alors via internet un ancien amoureux qu’elle a connu adolescente. Il est toujours fou d’elle et est devenu richissime entre temps. Zaza hésite. De sa part, ce n’est pas de l’amour, ce serait être vénale. Mais l’aspiration à une vie différente est forte.

Elle n’aura pas besoin de décider : l’histoire d’amour se termine en queue de poisson avant même d’avoir commencé et l’amoureux est obligé de quitter la France. Teddy a sans doute tout deviné, et déjà pardonné. La vie continue.

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NB : Le début du roman est normalement précédé par un dessin représentant l’arbre généalogique qui précise les relations entre les personnages.

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PROLOGUE

Je m’appelle Lisa. Lisa Davril.

Déjà, à ma naissance, on a frôlé la catastrophe.

Je suis née à la maison. C'est-à-dire chez mes parents. A domicile, quoi.

       Dans les années 50, ce n’était pas trop la mode, l’accouchement à la maison : autant dire que ma mère ne l’a pas fait volontairement. Déjà qu’elle n’avait pas fait exprès de m’avoir un an tout juste après ma sœur aînée… Et surtout, ce qu’elle n’avait pas voulu, c’est accoucher toute seule.

Mon père était dans la rue à guetter l’ambulance qui n’est jamais arrivée. Cinquante ans après, ma mère le lui reproche encore (Qu’il ait été dans la rue, pas que l’ambulance ne soit jamais arrivée).

       Ma grand-mère a accouru, mais trop tard : j’étais déjà là.

-        Quel dommage ! a-t-elle dit. (Elle a cru que j’étais morte).

Je suis donc arrivée comme ça : toute seule, sans aucune aide. Et j’ai survécu.

Après, quand j’ai eu les miens, d’enfants, j’ai mieux mesuré l’exploit, et je me demande toujours comment on a pu y arriver, ma mère et moi.

Il parait qu’il n’y avait pas de chauffage à la maison. Pourquoi ? Mystère. C’était l’hiver, et  il faisait froid comme ça pouvait arriver en hiver à cette époque, quand le réchauffement de la planète n’avait pas encore frappé. Mes parents n’étaient quand même pas si pauvres, mais ma mère m’a toujours dit qu’il n’y avait pas de chauffage quand je suis née. C’est sans doute pour ça que je suis si frileuse.

       Y-a-t-il un rapport entre ma naissance chaotique et le fait qu’il m’arrive toujours des mini-catastrophes, le fait que je me mette toujours dans des situations invraisemblables, toutes ces choses dingues qui n’arrivent qu’à moi ?

Des exemples ?

Le jour où je me suis retrouvée seule à Paris (j’habite à Lyon) sans un sou ni carte bleue car je m’étais fait voler mon porte monnaie, et que j’ai dû mendier un ticket de métro à un passant. Ce qui d’ailleurs a été d’une facilité déconcertante.

Et la fois où ma chaussure (du genre babouche) est tombée sur la voie du métro ? Deux heures avant de la récupérer… Et je ne me suis pas fait féliciter !

Je pourrais continuer longtemps l’énumération.

Depuis que je suis toute petite, on m’appelle «Zaza». Mes parents, ma sœur, m’ont toujours appelée comme ça. Moi, une fois ado, évidemment, ça m’a paru ridicule, et du coup je me suis employée à faire oublier «Zaza» pendant presque quarante ans.

Et puis, Maxence, mon fils, est devenu papa. Du coup, comment me faire appeler ?

1)     Mammy : pas très original.

2)     Mémé : bonjour le coup de vieux !

3)     Maminette, Manimou, et autre mièvreries : pas pour moi.

4)     Mémère ? Oui, oui, j’ai une copine qui se fait appeler Mémère, elle trouve que c’est classe, que ça fait rétro, mais non merci.

5)     Mère-grand : là, ça fait carrément grand-mère du petit chaperon rouge !

Rien ne me convenant là-dedans, j’ai décidé de revenir à Zaza. Les enfants, ça leur a plu moyennement, mais finalement ça a été adopté.

Edouard c’est mon mari. Attention, ce n’est pas pour autant le père de mes enfants. Lui, vu que tout le monde l’appelle Teddy, y compris les enfants, il n’a pas eu besoin d’y réfléchir : c’est venu tout seul : dès qu’elle a su articuler quelques sons, Margot l’a appelé d’autorité Tidi. Alors c’est Tidi. Teddy est content de Tidi.

Ce n’est pas Stéphane qui le contrariera. Stéphane, c’est son fils, à Teddy. Attention, ce n’est pas le mien, Dieu merci. Stéphane, lui, les histoires d’enfant, ils s’en contrefout, il n’est pas près de faire Teddy grand-père.

CHAPITRE 1 : Suis-je une mère normale ?

        Est-ce que je suis une mère normale ? C’est la question que je me pose souvent. Et particulièrement aujourd’hui.

        Ce matin je reçois un mail de Caroline : « On refait un essai demain, croisons les doigts ! ».

Si j’étais une mère normale, je lui téléphonerais pour l’encourager ? (Au lieu de trouver ça glauque).

            De quel genre d’essai s’agit-il ? Tout le monde le sait : tentative de fécondation par insémination artificielle. Caroline n’arrivait pas à tomber enceinte « par la voie normale ». Ca a été étalé, pesé et discuté tant et plus sur Internet : la terre entière le sait. Moi, ça me choque plutôt. Les jeunes femmes, elles sont comme ça : elles s’accrochent à leur soutien-gorge sur la plage (bien que montrant éventuellement la raie des fesses, en ville, si elles se penchent en avant avec un pantalon taille basse), mais n’ont aucune pudeur concernant leurs ovaires.

            Elle attend peut-être de moi que je les accompagne ? Si j’étais une mère normale, je devrais faire ça ? Et pourquoi pas acheter des magazines porno pour Bastien, pour lui faciliter l’opération, pendant qu’on y est !  Bastien c’est le futur Papa. Enfin, en tout cas désireux de l’être. Caroline me fait toujours reproche que ses malheurs n’ont pas l’air de m’intéresser. (Mais si, mais si, ma chérie, bien sûr ça m’intéresse).

Ca se passe comment, d’abord, ce truc : dans une petite cabine où il est tout seul ? Vachement romantique ! Quand même pas sur la cuvette des WC, j’espère. Il y aurait de quoi traumatiser le jeune quand il l’apprendrait vers quatorze ans.

Ou alors peut-être qu’ils vont à deux dans la cabine? Je n’ai pas posé la question. Je l’aurais sûrement posée si je m’intéressais vraiment à eux, si j’étais une mère normale. Et dans la cabine, il y a quoi : deux méchantes chaises pliantes ? Ou plutôt un grand lit rond avec des draps en satin et des miroirs au plafond ?

Bref… Demain : nouvel essai.

     

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