A la branche, pendue.

hel

Ma mère est une meurtrière.

Je pense à ma mère et alors je pense au sang sur ses mains, sous ses ongles, au creux de ses paumes, le sang partout qui éclabousse et son odeur âcre qui me prend et me reste longtemps à la gorge.

Ma mère est une meurtrière, elle ne sait faire que ça, et moi dans mes songes, mes doux, mes jolis rêves,  je suis la meurtrière de ma mère. Je ne pense plus qu'à ça.

Je la tue indéfiniment chaque soir.

Je commence comme elle : un coup sec derrière la tête.

Je finis comme elle : de chaque meurtre je me lave les mains.

Vicieuse elle engraisse. Minaude des douceurs végétales. Aux poulets, aux lapins, mais quand elle a bien engraissé là voilà le maillet à la main, coup raide sur la nuque, mains dans les poils, les plumes, qui déshabillent les cadavres.

Et quand il n'y a plus rien à plumer, alors il lui faut encore abattre les arbres, les tronçonner et les scier, les hacher menu.

Je l'entends qui m'appelle, qui veut faire de moi sa complice. Mais sur la plus haute branche du chêne, mes pieds balancent et je résiste.

***

Mon chêne est le plus grand de tous les chênes, le plus robuste et ses branches caressent le ciel si joliment que même le vent n'ose les contrarier et se contente de passer au travers.

J'y passe le plus clair de mon temps. Sur la plus haute branche, les yeux rivés dans le loin du loin.

Je vois tout. Je sais tout.

C'est le chêne qui me dit. Le chêne qui me montre, m'abrite, me berce.

C'est lui ma vraie mère. Mon père, mon frère tout à la fois.

J'aimerais rester collée à son tronc, comme l'on s'accroche à quelque jupe.

Mais parfois je suis bien obligée d'aller à cause de ma meurtrière de mère qui a la main aussi rude que les mots et se contrarie pour trois fois rien.

Deux fois la semaine, il faut aller, écouler nos cadavres.

Au village personne ne nous parle et nous ne parlons à personne.

Ma meurtrière de mère se contente de disposer joliment ses cadavres sur de grands étals blancs, bien en chair, bien en vue, et les voilà tous qui se pressent, avides de saisir le meilleur morceau. Le juteux, le tendre, l'appâté empâté, le bien luisant. Le cadavre à l'œil clair, au bec bien rougeaud.

Tout se fait sans un mot.

Je tiens la caisse, bien droite comme l'exige ma mère, cheveux tressés, air affable, et si la main qui me tend le billet s'égare, un regard suffit à rectifier le compte.

On nous dit sorcières. On est bien sot.

Meurtrière est le mot.

Un jour je me sauverais loin bien loin pour de bon.

Je ne pense qu'à ça quand je ne tue pas ma mère.

Je donnerai mon corps à un homme et je lui volerai son âme.

C'est comme ça que je m'y prendrais, et pas besoin d'être sorcière, avec les hommes c'est encore plus facile qu'avec les poulets ou les lapins.

***

 

J'ai déjà volé des âmes. Vrai de vrai.

Rien de plus facile.

J'ai volé l'âme de Gladys pour commencer.

Gladys qui est plus bête que bête.

Son âme palpite encore sur le bout de ma langue.

Gladys le sait, qui se tortille les doigts, les mains.

Gladys qui a les joues empourprées et le regard baissé dès qu'elle m'aperçoit, mais qui ne peut s'empêcher d'y revenir.

Il ne fallait pas me mentir chère Gladys, et prétendre m'offrir ton amitié, quand je ne t'avais rien demandé, moi qui n'attend rien de rien du tout.

J'avais déjà cette conviction que les autres nous salissent, comme ma meurtrière de mère salie la vie et broie l'innocence entre ses paumes de main. Qu'il ne fallait plus quitter la plus haute branche du chêne sous aucun prétexte. J'avais l'idée de me suffire, que tout tenait dans le fil fragile de mes rêveries et dans le bleu, le gris, le mauve et l'ocre étendus devant moi. Que ces nuances et mes mains accrochées aux branches pouvaient suffire à faire un monde.

Qu'il ne fallait espérer plus que le chant du merle parfois, le rouge sucré de la cerise aux beaux jours, et le froid de l'hiver qui peut clouer les poumons de ma meurtrière de mère au lit pour quelques jours.

Mais Gladys sans cesse tournait là, autour, tout autour et à côté.

Il y a notre ferme, notre cour, notre verger, nos bêtes et notre maisonnette de trois planches mais fleurie jusqu'au bord du bord. Et la même à gauche inhabitée. Et la même à droite qui est celle de la famille de Gladys.

Tous plus bêtes que bête.

Je l'ai crue un instant le mensonge de Gladys.

J'ai descendue la branche toute naïve et même un peu joyeuse.

Gabriel m'avait prévenue pourtant.

Mais j'ai laissée Gladys me prendre les mains, me faire courir et perdre mon temps à des jeux idiots de balle ou de cerceau. Je l'ai laissé me prendre mes secrets que seul le chêne sait, et me donner l'espoir d'autre chose que le silence.

Je l'ai même attendue, jour après jour, avec ce petit bond stupide du cœur qu'ont les gens plus bêtes que bête.

Tout cela n'a pas empêché Gladys de chuchoter avec les autres filles du village, me moquer, de cancaner, et de rire avec. Rire méchamment les yeux dans les yeux.

Les autres qui ne nous parlent pas mais s'en donne à cœur joie dans notre dos, quand nous passons deux fois la semaine.

Alors je lui ai volé son âme, et une fois fait, je lui ai signifié que plus jamais je ne lui parlerais.

Elle a dit pardon, plus bête que bête, a trépigné, pleuré, mais rien n'y fera. Elle peut continuer de tourner autour et à côté, à la branche je reste accrochée, et ses regrets je ne les entends même pas.

Qu'ils pourrissent avec elle, et la pourrissent toute entière. C'est tout ce qu'elle mérite.

***

Si je n'ai besoin de rien pareil qu'aux autres, c'est que tout m'absorbe.

Le bleu m'absorbe. Le bleu des rubans d'écolière m'absorbe, quand elles vont deux à deux, à cloche-pied sur le sentier avant de disparaitre dans le vert-noir du bois qui lui aussi m'absorbe. Je bois ce bleu, ses intentions, les mimiques et les mensonges qui s'y glissent, les combats qui se livrent. Je bois le vert-noir du bois et ses ombres qui ni ne m'inquiètent ni ne me tourmentent toute absorbée déjà que je suis.

Perdue déjà depuis trop longtemps pour être rattrapée.

Le bleu du ciel m'absorbe, qui dessine le loin du loin et la caresse des jours doux en promesse.

Le gris m'absorbe. Le gris et le vert mêlé de tout ce qui m'entoure m'absorbe et encore la mousse humide sur l'écorce, au pied des cèpes et des chanterelles. Les moisissures qui courent sur les planches, sur le tronc vert gris du grand chêne. Le gris des yeux clairs de Gabriel qui encore balance. Et là-haut la plus haute branche.

J'entends le bruit rouillé de la girouette sur le toit bringuebalé par les ailes du vent , et le vent le bruit et le mouvement tournoient et m'absorbent.

J'y entends l'écho lointain de la voix du père, et l'écho bourru et colère lui aussi m'absorbe.

Et je sais, que les bruits, les couleurs, et les formes, que tout ce qui vit, que tout ce qui est et fait entendre sa voix, que tout n'est que mirage et rien d'autre que le cri de la terre qui attend son heure, qui m'attend moi. C'est le sang que fait couler la mère qui rend la terre colère. Et tout ce qu'elle a poussé à la mort.

Et quand je ne tue pas la mère, que le sang ne coule pas, que Gladys n'est pas en train de pourrir quelque part autour ou à côté, quand rien ne chante, que je ne suis plus absorbée et rendue à moi, alors c'est un autre espace, un autre grand vide, qui est à la fois l'absence et la mort mais aussi quelque chose plus grand que je ne sais pas encore.

***

La mère ne voulait pas être mère. Jamais. Sous aucun prétexte.

Elle ne voulait pas y être pour quoi que se soit dans la vie et le cycle du cycle des choses.

Elle devait pressentir qu'elle irait mal cette histoire-là, qu'elle ne tournerait pas comme prévu et comme elle n'était surtout pas prévue qu'alors elle tournerait encore plus mal que mal.

On peut lui reconnaitre d'avoir su très tôt que rien de rien ne la changerait, et consciente de cette sécheresse qu'elle porte dans la voix et les geste que rien ne pourrait attendrir.

Cela se voit dans ses yeux devenus plus noir que noir, dans le gris bleuté de ces cheveux qui ont avorté la couleur avant l'heure.

Sa silhouette est tassée, grande est la mère mais tassée quand même par le poids de toutes les choses qui lui pèsent dessus. Sa poitrine se perd qui n'a plus rien véritablement d'une poitrine, en bosses vagues, en tentatives floues, des fruits d'hier tout pétris de remous.

Son visage est marqué de regret, piqueté de tâches marronnasses qui font comme de grandes barbouillades d'amer étalées aux quatre coins.

Un visage pareil, un visage de personne.

On ne sait pas ce qui s'y passe sous ce masque de tous les mêmes jours, seule l'intonation de sa voix joue les variations et encore...

Les mêmes mots. Choses secs et froides.

Des ordres qu'elle aboie.

Et sinon le silence.

Nuit après nuit, j'imagine qu'elle me tue comme je la tue. Qu'elle prie pour ça, en y mettant tout le cœur qu'elle n'a pas.

Mais j'ai promis à Gabriel, que moi elle ne m'aurait pas.

Et elle le sait du fond de ces rengaines, de ces "que va-t-on faire de toi" à répétition, elle sait qu'elle ne peut rien faire de moi.

Et elle assomme plus de lapin encore, et plume à tout va, et le sang coule, le sang gicle, et sous ses paumes c'est Gabriel et moi qu'elle broie et rebroie à chaque fois.

Vieille, vieille ma mère.

Et triste. Et meurtrière.

***

Le dimanche la mère va à un autre marché, un marché de la ville d'à côté qui n'est pas un village comme celui-ci et pas si près que ça.

Cela lui prend deux heures à l'aller, et deux heures au retour, sans compter le temps à installer seule les étals aux grandes halles de la grande ville et le temps à vendre, emballer les cadavres dans du joli papier, et filocher encore par-dessus des sacs roses mignons.

Peut-être quitte-t-elle son visage pareil, qu'elle tord en quelque chose comme un sourire pour faire mignon et chaleureux par-dessus les cadavres.

Jamais elle ne m'y emmène ni ne me presse.

J'ai pensé à lui demander rien que pour voir sa tête, mais sa tête serait la même : visage pareil, visage de personne. Quand il s'agit de moi...tout au plus aurait-elle des intonations paniques et craintives, de ces intonation non de non qu'elle a sèches quand ses mots se courroucent. Je n'en ai jamais rien fait, de peur qu'elle m'y emmène pour de bon, sait-on jamais.

J'aime à la laisser croire que c'est un plaisir que je n'ose et que si je ne demande avec la grande évidence qu'il me plairait, c'est par dépit toute pétrifiée que je suis par son autorité.

Je n'ai vu la ville qu'en photographie et en reproduction, et quelques vieilles fois en image et en son de la bouche de Gladys, quand j'étais amie avec cette plus bête que bête.

Cette ville là, lointaine et proche à la fois, est une vraie ville avec assez de rues pour se perdre, et des façades hautes, pomponnées, lustrées. Je la sèmerais en deux minutes la mère, absorbée toute entière par les lumières, la couleur différente des pierres, les tenues belles des belles femmes. Je serais loin déjà. Elle veut me garder là, tout près, juste à côté, me garder là pour me voir faner, pourrir avec elle, pour savoir laquelle de nous deux tombera pomme ratatinée avant l'autre.

 

C'est un dimanche encore, il faut entasser, tasser, pattes, plumes, becs en cagettes, en farandoles tassées jusqu'au plafond de la vieille camionnette.

Il faut se tenir les mains serrées, entortillées, attendre les ordres aboyés. Tirer l'eau, couper le bois,...

Je n'écoute pas.

J'hoche la tête mécanique et je suis tout aussi machinalement les roues bringuebalantes s'éloigner par le chemin de terre, je la suis longtemps des yeux, point bleu disparaissant dans le néant vert-noir de la route.

Puis je cours au chêne, puis je grimpe à la plus haute branche, je rattrape le point bleu quelque part dans l'horizon jusqu'à ce que le néant l'avale. Que la mère soit loin de loin pour de bon. Avalée, fondue dans le paysage.

Comme le cœur cogne et que le souffle manque, je compte jusqu'à trois cents. Je compte cinq minutes et je descends. Je me laisse glisser le long du tronc, et dans la caissette de fer dissimulée quelque part par ici (mais peut-être est-ce par là ou ailleurs) je récupère la grande clef, et cours loin, plus vite encore qu'à l'aller, et le cœur qui cogne et le souffle qui manque, à grandes enjambées, comme une dératée vers la maisonnée.

***

J'aime ce moment où la gorge me brûle, où mes mains tremblantes tâtonnent la serrure du bout de la grande clef. Les jambes me tremblent aussi. Et les yeux, et le cœur, le bas du ventre.

Tout est fièvre, tremblements et tout est grand silence à la fois.

Seules les choses de l'intérieur existent encore.

Des frissons longs me courent de bas en haut et de haut en bas.

Je pourrais mourir à cet instant là.

Il m'arrive d'arrêter de respirer, jusqu'à sentir mon cœur à bout de souffle battre à mes tempes, vouloir s'extraire de par mes yeux et poursuivre bien au-delà. Comme un voyage lointain qui n'appartiendrait qu'à lui.

Je ne laisserais jamais la mère m'atteindre, ni au cœur ni ailleurs, jamais au grand jamais, sure de sure. Mais cet instant-là je pourrais me laisser glisser plus bas que bas, et sans regrets aucun.

Mais toujours je reste debout, les yeux piqués de sel, mes yeux de folle bien à moi, comme si quelque chose que je ne sais pas, dont je n'ai même pas l'idée, devait m'attendre quelque part.

Je referme la porte, je tourne la clef.

Je vérifie que les rideaux sont tirés bien tirés. Je m'allonge sur le lit aux vieux draps fanés, aux vieux draps momifiés qui portent l'empreinte au cœur du corps de Gabriel, l'odeur de Gabriel, et même au travers du traversin, si l'oreille se tend bien, son grand rire éployé tout du long.

Je compte jusqu'à trois. Je compte lentement. Entre les secondes d'autres espaces, j'ajoute des minutes, d'autres portions de temps, tout ce qu'il me faut, tout ce temps dont je sais avoir besoin puis j'aspire l'air, je laisse redescendre le cœur, doucement tout doucement, plume légère.

À trois j'ouvre les yeux.

À trois Gabriel est là, juste là au-dessus de moi.

Ses yeux gris clairs qui transpercent, son visage de toujours et d'unique à la fois, comme un grand soleil qui plane et s'allonge au-dessus des choses. Son souffle glaçon et brasier qui chatouille mon front, mon oreille horriblement.

À trois je meurs et revis un peu à la fois.

***

Puis le noir immense nous recouvre. Nous ne sommes plus.

 

Rien qu'une histoire chuchotée dans le gris-noir du secret aux craquements de plancher et où la bougie fragile vacille et danse ses hautes et ses basses lueurs sur le mur vieilli.

 

Dans le noir immense nous ne luttons pas, nous nous laissons glisser dans le bas du bas des choses.

Et plus bas ailleurs qui n'est pas et est intensément à la fois, voilà encore le bleu, le gris-vert, le vert-noir plus noir encore, et tout ce qui absorbe et élève au-dessus du dessus des choses.

 

Nous voilà partout et ailleurs, partout et nulle part ailleurs qu'à l'intérieur de l'intérieur des choses.

 Nous sommes serpents, peaux mues et écaillées, entortillés comme pantins des fils de nos instincts. 

Nous sommes indiens et tout autant guerriers. Barbouillés des plumes de mille cadavres, plongés entier dans le sang du sang qui est le nôtre. Ebouillantés l'un à l'autre. Et fruits du même fruit, depuis toujours sève du même noyau, et bras déjà sans dessus dessous.

 

Tout se rapproche et nous absorbe. La bougie brûle encore, vacille encore, et les lueurs se lamentent basses et hautes, et toujours  le sang s'écoule et se perd pour rejaillir geyser.

 

C'est le rouge qui nous absorbe surtout. Le rouge des paumes et celui du cœur à l'envers de l'envers de ce que les choses doivent être.

 

Puis le noir se retire et le sang afflue. Nous sommes à nouveau, comme la douleur.

 

Je voudrais cet arc-en-ciel éternel, et les mêmes gestes même souffles répétés à l'infini du temps. Et parfois je voudrais tout autre chose et son contraire et être délivrée du sang. Mais déjà le jour se fane, et le retour inévitable de la mère se profile. Peut-être que j'en mourrais de toutes ces couleurs si elles se rendaient possible.

 

Gabriel m'observe, inspecte, questionne. N'ai-je trop profité du soleil, ne me suis-je pas éloignée dans le loin du loin, hasardée de quelque mots à l'inconnu, ai-je revu cette plus bête que bête ou retenu mes leçons.

 

Gabriel a des colères parfois, des colères hautes et même tempêtes qu'il faut calmer.

 

Alors je rassure, et parfois je mens un peu mais d'un mensonge de rien, puisqu'à la branche vrai de vrai je reste accrochée, et que rien ni personne ne peut se mettre en travers.

 

Il faut souffler sur ses yeux, à son oreille horriblement, au sommeil le rendre et pas à pas à reculons, ouvrir et refermer la porte à double tour.

 

Courir encore, courir à perdre le souffle et se brûler la gorge. Remettre la clef dans sa caissette de fer, par ici (mais peut-être est-ce par là ou ailleurs), et grimper dans les dernières bases lueurs du jour à la plus haute des hautes branches, où tout commence et fini à la fois.

 

Et là dans la saleté des choses du sang, il m'arrive de fixer le loin du loin et de prier pour qu'il m'absorbe. Pour que je perde la mémoire et l'envers des choses à la fois, tout en me sachant déjà faible et incapable de résister à moins de scier la plus haute des branches où tout balance et repose à la fois.

***

Je voudrais tirer de grands traits, j'y reviens toujours et j'y réussis.

Dans le détachement du détachement des choses.

Comme si j'avais cette faculté-là, de nier ce qui est et me gêne.

Agir de la même façon qu'agissent les survivants, car c'est bien de cela et de cela seulement dont il s'agit : ma survie.

***

Sur l'écorce je peins des mots. Je grave des phrases, des lettres pour Gabriel.

Des gestes du langage qui ne sont que des articulations d'amour, des tentatives contre l'oubli.

La mère me regarde du bas du bas, d'en dessous.

Elle crie folie. Elle qui n'a que des gestes de sang, des gestes de mort.

Elle qui a poussé Gabriel au bord du bord de cette même branche où mes pieds balancent.

Encore je résiste et laisse s'échapper sa voix dans les hauteurs, sa voix qui insiste.

Mais je peux faire cela, faire en sorte de ne pas entendre sa voix, de faire même comme si elle n'existait pas, n'avait jamais existé.

Garder vivant le souvenir tant que je le peux, en attendant ce jour où je me sauverais loin bien loin pour de bon.

Et alors tout sera neuf, et rien de rien n'aura jamais existé, pas même le chêne, pas même Gabriel , rien de rien que ce qui vient devant.

Et je serais libre sûrement, et loin derrière moi couleront les choses du sang.

 

 

  • Je suis soufflée ! La poétique des mots, la cruauté et la beauté des choses…

    · Il y a environ 7 ans ·
    Avatar

    nyckie-alause

  • Comment dire?
    Je lis rarement les longs textes (faute de temps, pas par préférence) et là, tes mots m'entortillonnent et m'aspirent en spirale et je te lis, jusqu'au bout du bout, jusqu'à cette fin où surnage l'espoir, fragile. J'adore ton écriture Hel, vraiment. Il y a du palpitant, du coloré, du chaud, du glacial. J'adore.

    · Il y a environ 7 ans ·
    D9c7802e0eae80da795440eabd05ae17

    lyselotte

    • Merci, merci, ça me fait très plaisir !
      J'essaie de découper souvent, ou de livrer par petits bouts au fil de l'écriture, mais comme ce qui est livré souvent s'échappe, alors des fois je me dis aller on va mettre quelque chose qui a un point final, ça cachera un peu tout ce qui s'échappe ^^
      Merci beaucoup en tout cas, ravie de t'avoir entortillonée hé hé

      · Il y a environ 7 ans ·
      Avat

      hel

  • Un univers plus noir, que ce que tu écris habituellement, mais les émotions sont toujours là ... très inventive Mamz'Hel !

    · Il y a environ 7 ans ·
    W

    marielesmots

    • Les effets de la lumière de janvier sans doute ...
      Merci pour ta lecture Marie.

      · Il y a environ 7 ans ·
      Avat

      hel

  • Belles couleurs, belles douleurs...
    Je suis fan. Bravo !

    · Il y a environ 7 ans ·
    15032535 10211077483957173 1293610909 n

    224g

    • Un grand merci de petit coléoptère ;)

      · Il y a environ 7 ans ·
      Avat

      hel

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