A la recherche du bonheur (11)
chloe-n
Aujourd'hui, c'est un grand jour pour moi. Je vais faire ma première échographie. C'est la première fois que je vais faire cet examen. C'est bizarre, ça va être la première fois que je vais voir mon enfant alors qu'il est encore dans mon ventre. La doctoresse m'a dit que ça ne fait pas mal, que c'est juste très froid au début. Tu parles ! C'est tellement glacé que j'ai l'impression que mon ventre s'engourdit ! J'entends son petit cœur battre, la doctoresse me montre ses petites mains. J'aurais voulu le partager avec mon mari, mais il travaille. Et puis pour lui, c'est des trucs de femmes, ça ne l'intéresse pas.
Connaissant mes antécédents, le docteur m'annonce que c'est une fille. Tout d'un coup, je ressens un énorme soulagement.
Je commence petit à petit à acheter des choses pour l'arrivée du bébé mais mes patronnes qui ont gardé landau, couffin,... pour leurs enfants quand ils seront grands, m'ont prêtées ce dont je vais avoir le plus besoin. Et puis, elles continuent à me donner des vêtements pour les enfants. Ça me fait un peu de sous en plus. Mais ici, je dois acheter des couches. Pour mes aînés, je me servais de langes. Enfin, je me débrouillais avec un bout de tissu, un vieux drap faisait très bien l'affaire. Je les lavais quand j'allais chercher de l'eau à la rivière le matin, et puis ça séchait rapidement au soleil mais ici, je ne peux pas faire ça. La doctoresse m'a parlé de lait en poudre, mais je veux donner le sein à mon bébé. Je veux la nourrir moi-même, du moins les premiers temps, tant que je serai en congé maternité. Tout ça, ça n'existait pas chez moi, les congés pour les parents, la sécurité sociale, les mutuelles, les allocations familiales. Le seul congé auquel on avait droit, c'était le dimanche, le jour du Seigneur. Et les jours fériés, bien sûr.
Un samedi soir, après le dîner, la vaisselle nettoyée, j'ai enfin pu m'asseoir sur le canapé pour me reposer un peu. Le terme de ma grossesse est imminent, mais aucun signe d'arrivée du bébé. Elle est très calme. L'émission de variétés est sur le point de commencer, quand une terrible contraction se fait ressentir, puis d'autres suivent, ainsi que les eaux. Mon mari m'amène rapidement à la clinique où la doctoresse qui me suit, pratique les accouchements. Puis ça se calme, enfin les contractions sont moins violentes que les premières. On m'installe dans une chambre. Tout est prêt, tout le personnel pour m'assister est là, on attend plus que ma fille, qui n'est plus tout à fait décidée à arriver. Comme d'habitude, je m'inquiète. La nurse me rassure qu'il n'y a aucun problème, mais à peine a-t-elle refermer la porte de ma chambre, que je me remets à cogiter. Je n'arrive pas à dormir un peu. Je regarde ce mur blanc en face de moi. Je repense à mes précédentes grossesses et accouchements.
Alors que dehors, j'entends quelques jeunes rentrer de leur fête du samedi soir, ma fille décide enfin à sortir un petit bout de sa tête. Cette fois, c'est parti me dit la sage-femme. La gynécologue m'avait dit lors de ma dernière échographie que c'est un gros bébé. Le travail dure plusieurs heures. Et au petit matin de ce dimanche de printemps, je mets au monde mon quatrième enfant. Une petite fille de 3,5 kilos, avec une chevelure très fournie.
Ma famille est venue voir ma fille. Quand je parle de ma famille, c'est uniquement mes enfants et mon mari. Ma sœur, qui habite à quelques pas de là, n'est pas là. J'aurais aimé qu'elle soit présente mais les histoires de familles, les rancunes persistent. Je me rends compte au fils des années que j'ai épousé une famille qui ne fait que mettre le bazar dans la vie de toutes les personnes qui les approchent. Et rien ne les arrête, pas même un océan. Alors ma sœur et mon beau-frère vivent tous les deux, loin de tous ces commérages, ne fréquentant que très peu de monde.
Mais dès que j'ai un petit moment de libre entre mes deux travails, même quinze minutes, je passe la voir, sans rien dire à mon mari.
Quand elle a appris ma grossesse et que je lui ai dit (car je lui raconte tout à ma grande sœur) que c'est une fille, elle s'est tout de suite mise à sa machine à coudre. Des petites robes, des couvertures qu'elle a tricotées, tout ça c'est elle. C'est elle aussi qui me fait mes jupes et mes robes. Mon mari croit que c'est qu'on m'a donné mais en fait, c'est elle. C'est ma grande sœur. C'est la seule personne qu'il me reste de mon père. Lui aussi, j'aurais aimé qu'il soit là pour voir ses petits-enfants. Ça me rend, à la fois triste et heureuse cette naissance. Je repense à toutes ces personnes que j'ai aimées et qui me manque tellement.
Mon bébé me sort de mes rêveries en me faisant savoir qu'il est temps que je l'allaite. Mais c'est un petit glouton, et je n'ai pas assez de lait pour la rassasier. La voilà qu'elle me fait une vilaine grimace et se met à hurler. La nurse arrive très vite avec un biberon, que ma petite fille avale en un rien de temps tout en me souriant. Je me dis, que ce soit ici ou là-bas, je ne suis pas capable de nourrir moi-même mes propres enfants.
Repue, elle s'endort dans mes bras. Je caresse ses cheveux sur sa petite tête, sur laquelle je dépose délicatement un baiser pour ne pas la réveiller. Elle sourit dans son sommeil. Elle a dû voir passer un ange. Peut-être que son oncle et son grand-père sont venus lui souhaiter la bienvenue dans ce monde ?! (©)
Pas facile de se frayer un chemin dans tout ça pour trouver le bonheur. Mais la petite dernière va y contribuer.
· Il y a plus de 9 ans ·erge
Tu crois ça ???
· Il y a plus de 9 ans ·chloe-n
Une héroïne bien courageuse ...
· Il y a plus de 9 ans ·marielesmots
Oui, et elle va en avoir besoin du courage...
· Il y a plus de 9 ans ·chloe-n
Je rejoins l'avis de Carouille. (Ps: on ne se gave pas avec le chocolat c'est une gourmandise vivifiante ;-) )
· Il y a plus de 9 ans ·ade
Je dirais plutôt... apaisante
· Il y a plus de 9 ans ·chloe-n
Aussi. .en fonction des moments ce peut être apaisant :-)
· Il y a plus de 9 ans ·ade
ça fait du bien de voir cette femme connaître un peu de douceur au milieu de toute cette douleur. Et même si elle est teintée d'amertume, elle est bien là.
· Il y a plus de 9 ans ·carouille