A mon père

A MON PERE   

17 Décembre 1935, quelque part en Tunisie

Naît enfin celui qu’on attend comme le Messie.

Emmitouflé dans son couffin d’osier défraîchi

Dort sereinement l’enfant-Roi chéri.

Un commandement déjà pèse et l’appelle

Sur ses jeunes épaules brunes et frêles.

Survivant d’une famille déjà bien trop nombreuse

Il est, c’est vrai, l’ainé de fausses couches désastreuses.

Tout-petit déjà investi d’une mission périlleuse :

Quitter sa terre natale pour une vie plus heureuse

Extirper sa famille et lui de cette existence douloureuse

A lui seul , il peut changer le cours des choses

Confiant, il sait qu’ailleurs existe l’apothéose

Où seront absents pauvreté, famine et maladies innommables

Qui règnent là et s’abattent telle la foudre sur les misérables.

Doté et paré de ce caractère que tout le monde connaît

Cet esprit aiguisé, rusé et naturellement très envié 

Ce don légué par les fées qui, dès le berceau, se sont penchées.

Et c'est à force de courage, de dur labeur et de détermination

Qu’il va métamorphoser sa vie et celle de ses proches, forçant l’admiration.

Bercé par les eaux qui le transportent vers la France

Terre d’asile qui lui tend les bras et lui fait déjà confiance.

C'est alors qu' il prend conscience que les misères vécues jadis

Sombreront à jamais dans un profond précipice.

Il y découvre les joies et les plaisirs de Paris, ville maîtresse

Dans un moment de fête, il y rencontre sa princesse.

Très vite éperdument amoureux de cette Beauté- Déesse

Avec qui il conçoit filles et garçons toujours avec prouesse.

Je suis, Moi-même, le cinquième fruit de cet amour passionnel

Je crois être solide et enjouée comme mon père l’Éternel.

Qui a su me transmettre par le sang et l’esprit

Tout ce que je représente de sa nouvelle vie.

Mon père est l’incarnation même de l’idéal humain

Générosité, tolérance et bonté débordent de ses mains

Partout où je suis avec lui je m’y sens bien

Comme enroulée dans un drap de soie embaumant le jasmin

Je sais que rien ici-bas ne peut m’arriver

Avec celui qui m’a donné la vie, celui qui m’a créée.

Il m’emmène avec lui partout en pèlerinage

Me fait découvrir Tunis ou les vestiges de Carthage.

Ne se lamente jamais sur le Mur en question

L'a mille autres richesses à transmettre que des lamentations.

Ensemble, nous parcourons la Belle Tozeur

Ville de lumière bleue et pleine de chaleur.

Je l’accompagne jusqu’à l'Eglise de la Nativité à Bethléem

ou encore le port de Sousse : El Kantaoui

Ces lieux qui furent si chers à son cœur

et où quelques souvenirs se ravivent.

Il me transporte et me présente à tous ceux qui l’aiment

De sa Sousse natale jusqu’à la Grande Jérusalem.

Sfax, Gabès, Kairouan et puis Bizerte

Haïfa, Netanya ou encore Nazareth.

Dès le lever du soleil, les croissants chauds à la main

Puis le soir danse du ventre jusqu’au petit matin.

Je ne peux imaginer que notre planète bleue

Ait porté d’autre père tel ce mi-homme mi-Dieu

Tous les jours je ne cesse de penser à lui

Chaque jour vide de sa compagnie, son aura me manque à l’infini.

Sandra.