alice était un homme

Tu t’avances dans cette nuit trop sombre mais tu avances dans l’indélicatesse des monuments aux morts dressés dans le cœur des villages tu penses la pluie en continu qui te tombe dessus tu penses à l’ivresse de l’amour à la déferlante passion qui habillait ton corps tu n’as pas de regret pas de nostalgie tu vis au présent avec pour conjugaison les mots à la craie qui se perdent sous les gouttes tu voudrais bien en parler rejoindre le monde des vivants et jouer encore mais tu es enfermé dans ta tête il ne te reste plus que les gestes une allusion pénible offensive dans la saison des floraisons tu t’étais dis « je vais en rire » mais ton sourire est scellé cousu de pourquoi les gens marchent harnachés de parapluie toi tu te laisses délaver par le temps tu balances quelques pierres dans une flaque énorme pensant que si le ricoché arrive à trois cela voudra dire que tu dois partir un deux trois quatre la combinaison est  mauvaise tu restes là figé dans le temps statue de chair inusable l’âme aux aboies paquebot de souvenirs sous l’empire défroqué de ta vie rude une mélancolie se colle à ta joue et arrache quelques larmes de tristesse invisible se mêlant aux larmes du ciel tu te vides sans sanglot ils sont déjà tous partis dans la mélodie funeste paralysie passagère l’errance aux bout de la plume se disloquent les lettres puis s’effacent comme un chant d’oiseaux qui disparait dans le ventre du matin qui se lève tu voulais tout retenir en toi entre tes mains pour posséder un peu comme si on voulait emprisonner le sentiment dans une boule de neige à secouer tes mains sont vides ton cœur aussi une voix derrière toi ton prénom fuse et se plante dans tes tympans tu te réveilles doucement de cet engourdissement printanier tu n’étais qu’une alice aux pays des mauvais rêves une main de femme vient caresser ton front d’homme tu lui souris son ventre est rond de vie métamorphose de l’amour