Âme en papier

La nuit est tombée. Le brouhaha et le tumulte de la journée s'en sont allés à dos de soleil. Quelques chants de grillons. Quelques voitures lointaines. Un vent frais qui vient murmurer contre ma peau. Les étoiles sont timides ce soir. Les quelques lumières visibles par dessus les clôtures du jardin m'agressent. Assise sur le rebord de la marche du perron, je fume une clope. Puis deux. Puis trois.

Je fuis les gens, j'embrasse mes moments de solitude. Ce sont ces petits instants de grâce où même mon cher et tendre ne me manque pas. Où même ma famille ne me manque pas. Personne ne me manque si ce n'est moi même. Car à force de m'être trop pliée pour arranger les autres et ne pas être source de déception, je peine à me déplier sans risquer de m'en déchirer l'âme à chaque plissure. C'est un travail de fourmi. Et c'est un travail difficile à faire lorsque l'autour nous alpague constamment. J'aime me sentir utile. Je déteste me sentir utilisée.

Mais ce sont là des considérations fouillies d'une femme assise au clair de lune savourant quelques minutes de calme après des jours, des semaines, des années de présences constantes. Deviendrais-je associale ? Je souris moi même de ma bêtise. Bien sûr que non.

Mais s'il vous plait, laissez moi juste seule. Juste un peu. N'ayez pas peur que je m'enterre, il n'en est rien. Je n'ai besoin que de silence pour entendre le bruissement de mon âme de papier qui se defroisse...