Cabaret

Suite de "Bouteille à la mer" by Bryan Verdesi

Je suis trempé, elle est en retard et j’ai mal aux couilles. En même temps pas étonnant que je me perde encore dans ces rêves à vous faire dresser la queue… Pour arriver jusqu’ici, je me suis perdu dans le dédale des rues de Pigalle, avec tous ces néons on en perdrait notre vision. Tous ces bas résilles sur le trottoir, ces bars qui affichent des filles et enfin des prix. Ici, un regard n’est pas toujours gratuit. J’ai enfilé une chemise, me suis rasé, et coupé les ongles. Faut pas non plus être maso et se taper sur les doigts. J’ai une seconde chance de faire bonne impression…

Je me recentre sur l’ambiance du cabaret. C’est clair qu’on est loin de la grande enseigne rouge. Dans l’obscurité je n’avais pas prêtre attention à certains détails. Disons que la Barmaid et ses obus anéantissent tous vos sens dès l’entrée. Plus loin dans la salle se dessine des corps agréables. Les filles enlacent les barres de lapdance, leurs tenues minimalistes pleines de strass et paillettes feraient rougir blanche-neige, cendrillon et les 7 nains. Je remarque une scène. Le rideau rouge velours se retire et une voix suave légèrement enraillé prononce les premiers mots d’une mélodie Jazzy. La scène dévoile une blonde au costume burlesque et aux rondeurs douces. On est loin de la vulgarité de l’autre connasse qui essuie les verres. Sa peau est recouverte de tatouage en tout genre. Elle se déhanche sur les notes du piano que quelqu’un balance du fond de la salle.

-          Vous allez vous asseoir sur une banquette ou vous poirotez accoudé au comptoir jusqu’à demain ? me lance la blonde.

-          Je vais prendre çà pour une invitation…

Je ris en mon for intérieur… Je lui collerais bien ma queue en travers de la gorge pour lui couper l’air. La lumière se fait bleutée, il est 19h25. La blonde a disparue, laissant place à une immense coupe de champagne pleine de bulles… de savon. Je ferme une fraction de secondes mes yeux et lorsque je les ouvre… je déglutis. Elle est là, dans le plus simple appareil, comme dans un rêve. Mais voilà, c’est bien elle. Ma joueuse de Poker. Pile ou face, en train de se la jouer Diva Von Teese dans un verre géant, et de m’en mettre plein la vue. Je me saoûle de ses courbes… j’en perdrais la raison. Elle finit son show. Etant le seul client de la salle, j’applaudis et vient lui tendre ma main pour la guider jusqu’au sofa rouge. Où une nouvelle bouteille de champagne a discrètement atterri. Beaucoup plus chère celle-ci.

-          Tu ne t’attendais pas à çà ?

-          Tu m’enlèves le goût de la bouche… ou les mots, je ne sais plus trop. 

Eclats de rires, on était là, on était bien. Un peignoir sur sa peau ruisselante. Elle m’explique qu’elle aime bien venir faire la burlesque ici. Çà la change de sa vie. Dans ses moulures du 11^ème ou du 15^ème çà  dépend des semaines. Je lui demande si elle a faim… elle me répond que son appétit viendra en mangeant. Elle disparaît dans les coulisses pour se changer. Je termine la dernière gorgée de notre bouteille... Et elle ressort avec une des danseuses au poignet.

-          Çà ne t’embête pas si elle nous accompagne ?

-          T’as peur d’être kidnappée par un pervers.

-          La seule pervers ici c’est moi, j’aime bien me faire mater. Juste que ma copine a envie de rigolé… et mes petits nippies me disent qu’on va bien se marrer…

-          Alors en avant, mesdemoiselles !

Je le regarde, il est surpris. Et hésitant, il doute de l’issue, ses désirs d’hommes reprennent le dessus. Il se voit déjà entre nous, nos langues et nos chattes humides, minaudant des caresses. Mais sous ses airs rustres c’est un gentleman. Pommé mais courtois… et çà me plaît. La blonde c’est juste ma caméra de surveillance. Faut toujours prévoir une amie. Pour s’éclipser en toutes circonstances… mais une amie qui vous veut du bien, pour ne pas finir la soirée seule dans son lit. L’utile à l’agréable…

On entre dans un japonais, de quoi allumer nos sens. J’aime bien venir ici, c’est coloré et parfumé. Je me recentre sur mes sensations, les effets des anxiolytiques s’évanouissent doucement et pour une fois je vais me laisser mener… par le bout de la queue. Je sais bien ce qu’elle a en tête. Elle veut m’émousser. Elle veut que mes instincts bestiaux reprennent le dessus. Elle veut que j’enfile sa copine pendra qu’elle se fera bouffer… mais je ne lui donnerais pas ce qu’elle veut. Sa petite pause loin des moulures frigides de son loft. Je vais prendre sa copine et la laisser sur le trottoir de la partie. Jusqu’à notre prochaine rencontre… parce que maintenant rien n’est plus sûr. La partie est lancée…

Qui sera le prochain à jeter les dés ?