Ces femmes dont on ne parle pas
veroniquethery
La douleur, je la connais. Je l'ai rencontrée quand j'avais 24 ans. Après m'être enfermée des années durant dans les bibliothèques municipales d'abord, puis universitaires, voilà que la maladie m'enfermait chez moi. Des douleurs à ne plus dormir. Des douleurs à ne plus savoir qui j'étais. Poignards labourant mes entrailles. Putain de souffrances !
Alors qu'enfin, j'avais vaincu les obstacles pour réussir mes études, voilà que la Nature venait me frapper. La Nature ? La vie ? Le destin ?
La vie s'échappait en même temps que les kilos. Le désespoir me lacérait mes rêves et ma vie. Marcher avec une canne. Marcher lentement. Un pas après l'autre. Examens médicaux. Regards navrés. Balance qui descend. Saleté de tumeur ! Putain de médocs qui me sauvent en me tuant !
Années qui s'écoulent. Regrets qui s'accumulent. Ne pas vivre. Pas vraiment. Survivre un jour de plus. Une année en plus. Oublier l'Ennemie. En faire une amie. Silencieuse. Qui attend. Qui peut frapper. Qui peut tuer. Sans ces médocs qui empoisonnent et font souffrir encore. Toujours ?
Ne pas vraiment vivre. Pas comme les autres. Pleurer le soir de sa solitude. Ces maux que les autres ne savent pas. Que les autres ne comprennent pas. N'imaginent pas.
Mettre des mots sur la vie. Créer des vies de papier. Ecrire pour se sauver. Pour oublier.
Et puis... La souffrance qui soudain revient. Plus forte que toutes ces années ! Qui va encore frapper ! Qui va plier. Me faire plier ?
Et soudain, un autre mot. Inconnu. Tabou. ENDOMETRIOSE.
Vais-je souffrir aussi de cela ? Je suis perdue. On n'en parle nulle part. Qu'ai-je fait à la vie pour me frapper encore ? Quelle est cette saloperie ? Médecins silencieux. Médecins qui ne savent pas. Quelle est donc cette maladie-là ? On la tait. On la cache. On l'occulte. Une maladie qui touche une femme sur 10. Mais, c'est sale, vous comprenez ! Une maladie liée au sang de la femme. Ce sang impur. Ce sang des menstruations. C'est la nature, mes bonnes dames ! Souffrez en silence !
Mais, non ! Je n'en suis pas atteinte. Petite tumeur tu me suffisais !
Mais, quoi ? Je n'y crois pas ! Petite tumeur, tu es partie toi aussi ! Ma pire amie. Mon ennemie silencieuse. Tu es partie.
Je suis là. Je n'y crois pas.
Vais-je enfin vivre ?
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J'ai découvert sur fb un groupe "endogirls". Des filles et des femmes de tous âges, de toutes nationalités, de tous les milieux sociaux. Des femmes qui sont des héroïnes. Parce que chaque jour qui passe est un combat. Contre une douleur que personne n'imagine. Dans une indifférence totale. Absolue. Opérée des dizaines de fois. L'endométriose est surnommée la "cancer qui ne tue pas". Les lésions peuvent s'infiltrer partout. L'utérus, les intestins, les poumons, les reins.
Elles souffrent dans une indifférence générale. Même les gynécologues sont peu informés de ce sujet. Les témoignages de ces femmes-courage sont incroyables.
Sur ce groupe, on s'en tape bien de la politique ! De la religion ! De la couleur de peau ! De la nationalité !
Sur ce groupe, il y a la souffrance. Physique évidemment. Mais, morales aussi. Les médecins, les politiques, les dieux, à quel saint se vouer ? Tous ou presque les ont abandonnées !
A titre personnel, j'ai envoyé un mot à tous les candidats aux présidentielles. Je ne m'attendais pas à la moindre réponse. Mais, si seulement, les pouvoirs publics pouvaient prendre cette maladie à bras le cœur ! Aider ces femmes qui sont souvent incapables de travailler et qui sont sans ressources. Qui dans le Nord de la France n'ont que deux spécialistes sur tout le département ! Qu'une prise en charge réelle ait lieu.
Si une telle maladie, une telle souffrance frappait les hommes, sans être particulièrement féministe acharnée, je pense, je suis convaincue que l'on parlerait de cette maladie. De ce "cancer qui ne tue pas". Mais, voilà, cette maladie-là frappe les nanas !
L'injustice du sort de certains d'entre nous est insupportable. Alors que des innocents sont fauchés ou frappés par la maladie, d'autres crevures expirent tranquilement ds leur lit a la fin de leur vie en toute impunité. C'est le cas semble t il notamment de Jack l'eventreur, celebre, helas pour des actes similaires aux degats causés par la maladie que vous decrivez.
· Il y a plus de 7 ans ·enzogrimaldi7
Pour la douleur je compatis. Et également pour ce que tu as traversé.
· Il y a plus de 7 ans ·L'endométriose je connais. Suis pas certain de ce que tu avances "si ça frappait les hommes" ; devant la douleur on est tous égaux, hommes, femmes, enfants, jeunes, vieux. Si les laboratoires pharmaceutiques n'ont encore rien trouvés il y a une raison, sinon t'inkiet dès qu'il y a du pognon à se faire... ils sont là. Pour en revenir à l’endo (et sans être spécialiste) puisque c'est lié à la menstruation, la pilule sans interruption ne serait pas une solution ? (je sais : pas la panacée, mais en attendant... ?)
Marcus Volk
Si c'était aussi simple ! Je pense que comme beaucoup, tu "crois" savoir ! Ce n'est pas une critique, juste un constat. Non, prendre la pilule, pour beaucoup de femmes, cela ne suffit pas. Déjà, il faudrait prendre ce mal en considération. En moyenne, il faut AU MINIMUM 7 ans pour la diagnostiquer ! Les dégâts sont déjà là : des lésions qui se propagent dans le corps.
· Il y a plus de 7 ans ·veroniquethery
Maladie terrible dont j'ignorais l'existence. Vrai ! Si les hommes étaient atteints, on en causerait fort. Et, d'après le nombre de femmes atteintes, on ne peut pas parler de "maladie orpheline". Et la Recherche ?
· Il y a plus de 7 ans ·Vous vivez, M'Dame ! Très cordialement de Edouard !
astrov
Je vis d'autant mieux, cher astrov, que je ne suis pas atteinte d' endométriose ! cf le texte : "Mais, non, je n'en suis pas atteinte"
· Il y a plus de 7 ans ·veroniquethery
Voui ! J'avais bien compris, M'Dame ! Vous vivez, je le dis juste en note positive, en général !
· Il y a plus de 7 ans ·astrov