Château de cartes

J'ai construit avec toi un grand château de cartes
Qui grandit peu à peu et presque malgré moi.
Chaque pièce ajoutée rend la pile moins forte,
Chaque mot que tu dis me rapproche de toi.

Plus elle prend de place et plus elle est fragile
Et plus je me demande à quoi rime tout ça,
et le voudrais souffler pour être enfin tranquille
Pour voir tout s'effondrer… je ne le ferai pas.

Je voudrais bien savoir ce qui me lie à toi :
On ne se comprend pas, on est si différents.
Tu es trop réaliste et moi je suis sans loi
Tu vis au jour le jour moi en dehors du temps.

Je cache un grand domaine avec un mur de pierres.
Tu es devant la porte, il te manque la clé.
Tu n'entends pas ma voix qui résonne derrière,
Tu ne la cherches pas, tu ne veux pas entrer.

J'ai bâti de mes mains un rempart de silence
pour cacher la tristesse de mes nuits sans sommeil
qui hurlent dans ma tête quand le chagrin commence
Des questions sans réponse, des étés sans soleil.

Je ne suis avec toi que l'entête d'un livre
Sur laquelle on ne lit qu'un titre, qu'un auteur,
Pour connaître l'histoire, et peut-être la vivre,
Il faut tourner les pages du roman de mon cœur.

Comment peux-tu garder un livre dans tes mains,
Le regarder, parfois, en ne lisant jamais,
Refuser de connaître ce que sera demain,
Et en ignorer tout, même le résumé ?

Un titre peut tromper, peut cacher un espoir
Peut cacher une image sur la dernière page.
Mon nom est noir et sec mais il voile une histoire
De rires et d'étoiles, mon nom est triste et sage

Mais mon cœur est soleil, symboles et fantaisie,
Mais ma tête est palais de lumières et de fêtes,
Mon sang est une lave de couleur et de vie,
Mes yeux sont océans d'amour et de tempêtes.

J'ai construit avec toi un grand château de cartes
Qui grandit peu à peu et presque malgré moi
Mais ma main me trahit, elle tremble et s'agite
Et la dernière carte dans un souffle de vent…