Chronique enseignante : "tiens, pourquoi ne ferai-je pas grève !"

helenac

Alors bien entendu, d’aucuns jugeront ces quelques mots au mieux d’un brin démagogiques, au pire d’un ridicule touchant pour ne pas dire affligeant, mais ces maux sont que le reflet de sentiments, d’idées et de vagues à l’âme diffus …bien que dérisoires, n’en doutons pas.

Je fais parti des « jeunes » enseignants, vous savez de ceux qui se taisent, de ceux qui acceptent et se résignent en souriant quand ils le peuvent…bien heureux d’avoir un travail bien à eux et non des parts d’emploi à la temporalité pas vraiment définie ! Je fais donc parti de la majorité silencieuse comme on dit, du mou ventripotent et flasque de ceux qui n’ont rien à dire ou qui n’ont pas le courage de le dire, ce qui ne m’empêche pas d’ailleurs de jouer, de temps à autres et tant que cela existe, de mon « droit » presque honteux de manifester et de grèver quand il le faut…

Mais parfois le cœur n’y est plus…

« Cela ne sert à rien », « c’est inutile, faut pas rêver », « puis en plus j’vais perdre une journée de salaire »…comme si nous ne le savions pas. Toutes les excuses se valent, toutes les critiques sont possibles et parfois même acceptables pour ne pas prendre position contre les mesures qui menacent l’école publique et son fonctionnement pour les années futures, pour nos années futures, pour leur avenir, pour mon avenir d’enseignant sur le socle… le si fameux « socle commun » à transmettre…

Pourtant, comment réfuter l’influence plus que néfaste des fermetures de classe à venir et de l’augmentation évidente des effectifs de classe qui vont « naturellement et indubitablement » en découler ? Je ne sais pas trop en fait…il me semble tellement idiot de préciser qu’il est plus facile et diablement plus efficace de pratiquer des séances incluant du multimédia ou des séances de langue étrangère (domaines oh combien « soclesques » !) face à 24 gamins plutôt qu’une trentaine…mais bon, certains parviennent à le réfuter prétextant que les fermetures de classe s’accompagneront de redistribution de moyens plus importants pour les écoles ou futures pôles scolaires tant au niveau des infrastructures que du matériel scolaire alloué à ces dernières. Bon, apparemment je ne suis pas la seule naïve!!

Et comment ne pas voir dans le retour en grâce du transmissif une volonté évidente de justifier l’augmentation du nombre d’élèves par classe et de favoriser le retour à l’autoritarisme pédagogique à défaut de replacer l’enseignant dans un rôle de référent culturel et éducatif comme il peut encore le représenter dans la plupart des pays scandinaves dont le système scolaire a pris quelques années d’avance sur le notre (la formation étant devenue LA priorité de ces pays face à la montée du chômage et des divers extrémismes). Une manière détournée de jeter aux oubliettes plus de 50 ans d’expérimentation et d’avancée en pédagogie cognitive, en approche médiationnelle ou encore au niveau de la considération de l’enfant face à l’apprentissage. Comment sera t’il possible d’envisager une individuation de l’enseignement, une aide personnalisée, diverses approches face à une situation-problème, une construction par l’enfant du savoir en interaction avec les autres quand il faudra intervenir face à 30 élèves ?

Ah mais j’oubliais, tout cela n’est pas très important en somme, puisque il suffira de pratiquer une pédagogie transmissive, qui en parallèle sera, c’est certain, la meilleure solution qui soit pour lutter contre l’échec scolaire et pour aider les enfants en difficultés. Evidemment.

Qu’on trouve de bonnes raisons pour expliquer ces décisions politiques et ministérielles ne me semble pas une démarche choquante quand bien même on raisonne en terme de rentabilité et de coût d’amortissement vis à vis de l’investissement conséquent certes (…mais pas assez, d’ailleurs !) que suppose l’école et son personnel enseignant ou non, pour l’état, pour le ministère de l’éducation nationale, et à plus petite échelle pour les communautés de communes ou autres communautés urbaines…

Mais tenir ces raisonnements implique inévitablement de reléguer à un rang subalterne, ce qui, je le croyais (vraiment …pff…que je fus candide !), faisait priorité et presque jurisprudence dans mes utopies enseignantes et pédagogiques : le bien être des élèves et la volonté de leur offrir une égalité de chance face à l’école ou la vie en société, en prenant en compte une chose plus ou moins importante, me semblait t’il : l’enfant !

Tiens, si je faisais grève…

Ah non, les parents vont me détester…

  • La grève pour l'avenir des enfants ! Ca vaut le coup et toute ton analyse tend à le prouver...alors, tous dans la rue et qu'on arrête de nous parler de fric !!!

    · Il y a presque 13 ans ·
    Pascal 3 300

    Pascal Germanaud

  • Merci à tous... Ben oui, un peu désabusée déjà...
    Il manque un "ne" à "maux...sont que le" mais bon, vous avez compris...
    Merci encore.

    · Il y a presque 13 ans ·
    Bisou spiderman

    helenac

  • en saignante, tant que les parents ne prendront pas leurs responsabilités en assurant leur rôle d'éducateurs, aucun progrès possible (ex prof depuis 40 ans je ne rgrette rien)mais bon texte à méditer

    · Il y a presque 13 ans ·
    Mariage marie   laudin  585  orig

    franek

  • Franchement je préfère que vous perdiez une journée de boulot pour aller manifester plutôt que de devoir subir tous ces non remplacements de profs qui perturbent l'emploi du temps de nos enfants et gachent mes journées de boulot. Vous avez le sentiment que celà ne sert à rien ? De ne pas être entendu ?
    C'est parce que votre ministre n'en a rien à foutre des grevistes qui défilent en chantant.
    Refusez les évaluations, manifestez devant les lycées de bourges qui ne connaissent pas la crise, révoltez vous vraiment.

    · Il y a presque 13 ans ·
    Stamped 500

    Jean Louis Michel

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