Concert d’anges

Les écoles de musiques, conservatoires et consorts organisent des représentations avec le public pour habituer les virtuoses en culottes courtes à la scène et pour habituer les parents à relativiser sur les emmerdes de leur quotidien.

Le public, pour être honnête, est déjà conquis, ce sont les parents et les amis des parents qui n'ont pas réussi à trouver une excuse imparable avant. Faute de réparti on ne peut s'en départir !

Donc, bien… on est bien assis, c'est déjà ça. Le premier chérubin à monter sur scène est une chérubine. Attention, plus les enfants sont jeunes, plus ils sont mignons, empêtrés dans leur gros instrument. C'est véritablement craquant, mais ils devraient s'en tenir à cette bonne impression, ne surtout pas essayer d'en jouer. Car après, putain, le musicien qui les écoute est obligé de rester trois jours dans un caisson isobare insonorisé pour réaccorder toute sa tête au La 440.

Bon, le premier à monter sur scène est présenté par le prof de sisique. On apprend qu'il joue du cor depuis trois mois. Moi, ce n'est pas pour critiquer, mais je trouve que, pour un enfant, opter pour le cor comme instrument, me semble déjà assez douteux, mais bon, pourquoi pas. De là, à choisir le cor de chasse accordé en Fa bémol pour le gros gibier, il y a une marge. Je ne sais pas si votre, (vos, pour les téméraires) enfant (enfants, pour les kamikazes) joue (jouent, pour les masochistes) du cor en Fa bémol ? Non ! Heureux parents que vous êtes !

Sinon, pour les autres, toutes mes condoléances !

Même séquestré dans sa chambre, porte barricadée, les murs de la maison en tremblent de frayeur.

Une fois, où notre trésor jouait de son cor de chasse en Fa bémol, on sonna à la porte. Il y avait trois cerfs, pattes en l'air, qui venaient se constituer prisonniers, pour peu que la musique sismique s'arrête sur-le-champ de bataille, instantanément.

Alors, imaginez, quand vous avez entendu s'époumoner votre maestro, deux heures par soir, sept jours sur sept, recevoir une invitation à un concert. Cela demande une préparation psychologique, car là, il va falloir écouter les enfants, des autres aussi. Et quoi qu'on en dise, sans parti pris aucun, nous sommes, quand même, plus indulgents avec nos propres enfants qu'avec les sales garnements des autres. Heureusement qu'avec le plan Vigipirate tous les parents sont fouillés avant et leurs armes confisquées, autrement ce serait un véritable carnage. Remarquez, on achève bien les chevaux et là, visiblement, ces petits « coristes » souffrent le martyre. Il y en a même eu un, que l'on a dû désincarcérer à la tronçonneuse, il aurait été étouffé par son cor constrictor.

Souvent, ce sont les plus petits qui y passent  en premier, je ne dirai pas ce sont toujours les meilleurs qui s'en vont les premiers, ce serait exagéré et mensonger.

Avec les grands, on se dit que l'on va pouvoir se retirer les chewing-gums des oreilles. C'est vrai, c'est un peu mieux, mais vous allez vite déchanter, car les pièces sont beaucoup plus longues. Elles n'en finissent pas et là vos considérations sur le génie de Mozart commencent à s'effriter sérieusement. Trop long, trop de notes, même si les solistes n'en jouent qu'une sur quatre.

Voilà vous sortez ravi de sortir de ces concerts avec la satisfaction d'avoir un enfant musicien et comme chacun le sait, tandis que les autres ne l'ignorent pas davantage :

« La musique adoucit les meurtres ! »