Concours Wannabes SALON DU LIVRE OU SALON DU GIVRE
fabricerose-pierre
Pour tout dire, mon éditeur m’a appelé tout-à-l’heure ; il s’inquiétait pour l’avancement des travaux. Parce que c’en sont, comme dirait Dahlila ! Il n’est pas évident de pondre un pavé pareil ! Imaginez ! La reproduction, par croisement, de l’humour de comptoir et de la poésie du dix-huitième ! Ardu non ?
A mes débuts, avec mes traits d’humour, je touchais bien l’aide ménagère de moins de cinquante ans, mais là, le défi est de taille : toucher l’ado post-pubère nourri aux jeux vidéo et aux rêves de gloire.
Bien évidemment, avec aplomb comme tous les lâches, je lui ai assuré que le délai serait respecté, et ai fondu en larmes dès que j’eus raccroché.
Un peu courroucé quand même, mon boss en devenir ! Il voulait détailler, moi je faisais en gros ; il voulait de la paraphrase, je lui donnais du succint.
Déjà, pour mon avance, il avait pris beaucoup de recul..... avant de stagner sur un refus. « Dites donc » mon vieux, avait-il dit ! « Là vous ne publiez pas à compte d’auteur mais à compte doteur », estimez-vous heureux !
Enfin ! Encore un mauvais moment de passé !
Qu’est-ce qui m’avait pris de vouloir écrire en grand ?
D’abord sans doute,quelques petits textes ici et là sur le net, avec des commentaires encourageants ; des demandes équivoques de devenir « ami » avec des gens qui voulaient rallonger leur curriculum vitae sans se mouiller en appréciations ; et puis la grosse tête ! Je venais finalement de décider, en les ressortant et en les relisant toutes, que mes petites chansons étaient des chefs d’oeuvre !
Et aussi, on m’avait présenté Jean Dupont. Lui venait de gagner le Goncourt et moi de gagner le concours ; forcément, ça rapproche ! Donc on s’était un peu fréquentés. En fait.... le temps qu’il me dédicace son ouvrage.
Mais ça m’avait donné une pêche !
Alors, pour ce nouveau boulot, j’avais frappé fort d’entrée: clavier à détection rétinienne, écran de cinéma, égérie rémunérée en nature....
Et c’est justement là que ça avait commencé à mal tourner :
J’avais mis un temps très court à convaincre cette blonde nymphomane de poser nue pendant que j’écrivais, vus sa connaissance opaque du mot modèle et le mode de paiement envisagé.
Mais au bout d’une semaine, après un énorme épaulé-jeté de trois phrases sur feuille blanche, la bougresse avait réclamé son dû. Et moi, déploré avoir négligé le stage de découverte spéléologique des méandres circonvolutionnaires du cerveau de blonde.
Donc me voilà déshabillé, prêt à l’emploi, et elle les mains à la taille :
« Alors, où il est le mec ? T’avais pourtant dit que je s’rais payée au black ! Ton outil i’vient d’ chez Casto, moi j’ veux du matériel de pro ! »
Etait-ce le signe avant-coureur de l’échec ? L’évènement pas d’équerre qui confirme la règle ?
C’était en tout cas une ouverture au doute et à la désolation. L’âme humaine me paraissait devenir inaccessible.
Quant à mon tapuscrit, il n’était pas question de faire appel à un nègre. La furie, pouvant se sentir entourloupée m’aurait, de déconfiture dénoncé aux instances littéraires, ou par bêtise à la police des moeurs.
Là, ça fait dix minutes que je me regarde dans la glace, et je me dis qu’avec une tête pareille, en plus, j’ai intérêt à me trouver un pseudonyme en or massif, qui fera oublier ces traits grossiers que même le tain du miroir a du mal à renvoyer. C’est bien beau de briguer une place sur les présentoirs de librairies, mais il y a un minimum à assurer.
Je me triture les neurones et en dégote un qui me sied. Il fera l’affaire, avec sa consonnance de mariage arrangé entre rupins à particules : Jean-loup Alané-Des Friches.
Je le prononce tout haut à plusieurs reprises, pour me faire la gorge et entendre ce que ça donne, et est-ce un signe, ma dalmatienne se met la patte sur l’oreille. C’est pas gagné mais je m’obstine, ce sera celui-là.
Maintenant, il va me falloir rameuter tous les syndicalistes pour faire cesser la grève des muses, et qu’enfin mon opus prenne du volume.
Et cet hiver, ce sera ou le salon du livre à la capitale, ou le salon du givre dans mon jardin !
Merci à tous les deux, un d'avoir lu mes élucubrations, deux de me dire que ça vous a plu.
· Il y a presque 13 ans ·Mon cher Matthieu, là il fallait du régime Weight Watcher mdr
fabricerose-pierre
Chapeau bas Môssieur Alané-des-Friches!!! mdrrrrrrrrrr
· Il y a presque 13 ans ·Je viens de passer un délicieux moment de rigolitude à vous lire!!!
Là.... je calme mes zygomatiques........ pour vous offrir une standing ovation très méritée...et un coup de cœur.
chatonjoli