Counting Stars.

C'était une jeune fille, quelque peu dépravé, elle venait juste de passer la majorité. Elle vivait ou plutôt survivait tant bien que mal, enchaînant les boulots minables. Sa vie était régie par deux passions l'alcool et les mots… Elle aimait manier ceux-ci, mais elle aimait particulièrement chanter. Elle aurait voulu être chanteuse mais elle n'était pas assez audacieuse. Pas assez audacieuse, pour se lancer, essayer.

Bref, c'était une de ses nuits d'hiver où la lumière est absente à partir de cinq heures,  où les gens aiment bien mettre leurs affaires sur le radiateur pour ensuite enfiler un pull tout chaud. La chanteuse attendait le métro. Elle était montée, n'avait pas validé son titre de transport car elle n'avait pas assez d'argent pour ça ou du moins cet argent servait à acheter une bouteille de vodka à la fin du mois. Elle s'était assise sur un de ces trois sièges conjoints. La chanteuse avait lâché un gros soupir de soulagement d'avoir trouvé une place assise.

Et ce fut un de ces moments décisifs dans la vie. Ce genre de moment où tout change, ce genre de moment où un regard relève d'un processus particulier qui donne suite à des événements inespérés. La chanteuse était assise à côté d'un homme qui devait avoir à peu près son âge et à côté de lui il y avait une jeune fille. L'homme avait ce qui semblait être un sac qui contient un appareil photo à la vue de l'énorme trépied qui était accroché dans son dos. Il avait les cheveux bruns, semblait plutôt grand. Il semblait déjà obnubilé par la jeune fille blonde assise à côté de lui. Cette jeune fille était radieuse, souriante,  accueillante d'ailleurs celle-ci avait souri à la chanteuse.  Puis celle-ci lui avait demandé si elle n'avait pas froid avec le peu de vêtements qu'elle portait. La chanteuse lui répondit que si effectivement elle avait un peu froid. La jeune fille blonde lui proposa alors un pull rose et pailleté et même si ce n'était pas tout à fait le style de la chanteuse celle-ci accepta et la remercia.

La chanteuse remarqua alors que la jeune fille devait partir en voyage à la vue de cette énorme valise rose. Elle lui demanda où elle allait, où elle partait, la jeune fille bonde répondit tout naturellement qu'elle partait n'importe où, qu'elle ne pouvait plus attendre, qu'elle devait partir, elle n'avait même pas pris la peine d'avertir ses parents.

Le reste du trajet se passa sans encombre, sans parole, la chanteuse habitait près de la gare, les deux filles et le photographe descendirent à l'arrêt de la gare.  La chanteuse voulut redonner le pull à la jeune fille blonde mais celle-ci refusa, elle la remercia comme elle le devait. Puis prit la direction de son appartement minable, trop petit, trop moche, trop froid, pas accueillant, il ne lui convenait pas. Sa vie non plus ne lui convenait pas alors dans un élan d'audace elle rejoignit la jeune fille blonde. Elle lui demanda de l'attendre, elle lui dit qu'elle allait chercher ses affaires, qu'elle partait avec elle. La chanteuse revint deux minutes plus tard avec une petite valise qui contenait ses vêtements et ses affaires personnelles. Elles montèrent toutes les deux dans le train, elles s'assirent l'une en face l'une de l'autre. Et elles furent rejoins par le photographe du métro. Ils commencèrent à se parler tous les trois, racontant leur projet. Comme l'indiquait son appareil le jeune homme voulait devenir photographe, la jeune fille voulait devenir danseuse depuis son plus jeune âge. Et quand ce fut au tour de la jeune fille aux cheveux noirs elle déclara pour la première fois qu'elle voulait être une chanteuse. On demanda au photographe pourquoi il prenait le train, il déclara que lui aussi, il avait voulu partir à l'aventure, tout quittait. Mais quelque mois plus tard on apprit qu'il avait juste suivis la jeune fille blonde, audacieuse du métro. Il avait déclaré qu'il avait trouvé sa muse. Il l'avait suivi pour la photographier, il était tombé amoureux d'elle à travers son objectif.

Les trois étaient arrivés le soir même dans une ville totalement inconnu, ils avaient réussi à se trouver une auberge de jeunesse, ils auraient bien dormi dehors mais ils faisaient vraiment trop froid pour ça. Ils s'étaient retrouvés dans une petite chambre et avaient parlé des heures durant. Ce genre de nuit, ce genre de discussion passée à refaire le monde, à ce raconter leurs espoirs, leurs secrets, ce qu'ils aimaient, leurs peurs, leurs espoirs, leurs talents. Le photographe avait passé la  nuit à capturer ses moments imperceptibles de joies, de peines sur le visage de la danseuse. Celle-ci avait dansée toute la nuit, montrant ce qu'elle avait appris au cours de ses dix-huit années passées, montrant qu'elle ne pouvait faire que ça, danser, encore et encore. C'était vital. Et la chanteuse elle, avait continué à manier les mots, elle avait chanté quelques-unes de ses chansons, chanter ses chansons préférées. Mais en vérité elle était seulement jalouse, jalouse de ces deux-là, si bien qui ne paraissait pas douter de la situation. Qui ne semblait pas angoissait à l'idée d'être dans une ville inconnue avec deux inconnues, qui semblaient croire fermement que leurs rêves vont se réaliser. Il y a quelque chose d'irritant dans ces gens qui ne doutent jamais, qui semblent s'assumer complètement. Oui il y a quelque chose d'irritant quand on se fixe sois même des limites et c'était le cas pour la chanteuse.

Au bout d'une semaine, la chanteuse finit par trouver un emploi, puis ce fut au tour du photographe, ils purent assez vite loué une colocation. La danseuse vivait sur ses économies tout en passant le plus d'audition possible en espérant être vite repéré. Quant aux deux autres,  le photographe avait du mal à avoir de la visibilité, il avait du mal à percer. La chanteuse, elle, était serveuse dans un bar, alors parfois pour l'animer un peu, elle et un chantait dans celui-ci.

Au fur et à mesure des mois la danseuse devenait connus, elle était rentrée dans un ballet prestigieux. Tout le monde la voulait, elle était courtisée, vénérée, jalousé de part et d'autre. Entre temps le photographe c'était mis en couple avec la danseuse et on va dire qu'il vivait la situation plutôt mal. Elle commençait à percer et lui continuer à stagner, il l'accompagnait dans les soirées mondaines et il n'était là que pour servir de faire-valoir,  quand on lui demandait qui il était ce qu'il faisait il restait évasif. Trop honteux de ne pas avoir un talent à la hauteur de sa compagne, mais celle-ci était très enthousiasme au sujet du photographe. Elle avait pris l'habitude de mettre les photos qu'il avait prises d'elle sur son portable et elle les montrait à tout le monde. Après de nombreuses publicités de la part de celle-ci la compagnie de ballet prêta attention à son travail, il put ainsi devenir leur photographe attitré. Il était un peu gêné de s'être fait connaitre grâce à sa compagne mais ce fut de très courte durée, il était payé pour prendre en photo la personne qu'il aimait le plus au monde. C'était plus un rêve, qu'une réalité. Il adorait son travail, il était épanoui et réjouit. Quant à la chanteuse elle était restée dans son bar, néanmoins elle chantait tous les vendredis et sa prestation était devenue payante, elle avait un petit revenu en plus ce qui l'aidait bien. Elle continuait à travailler sur ses chansons. C'était une époque calme et paisible, où chacun avait plus ou moins trouvé sa place.

Cela avait le calme avant la tempête, cela c'était passé par une nuit sombre. Ce genre de nuit où on a l'impression d'être éternelle, ce genre de nuit où on pense que rien au monde ne pourrait nous atteindre. Mais c'était juste une impression. Nos trois personnages rentraient d'une soirée un peu alcoolisé, ils avaient été à une fête d'anniversaire ou du moins ce genre d'événement qui demande plus de boisson que de nourriture. Vous devez penser qu'un des trois est mort après avoir conduit en état d'ivresse. Mais c'était faux le trio était rentrée en taxi, ce genre de choses qui était raisonnable de faire dans ce genre de moment. Mais cela n'avait pas suffi, le taxi c'était fait percutée par un chauffard, qui s'était enfui. On ne l'avait jamais retrouvée. Personne ne mourut cette nuit-là. Mais la danseuse perdit ses deux jambes, boum, elle était amputée, condamné à rester en fauteuil roulant jusqu'à la fin de ces jours.

Elle déprimait, elle avait frôlé du doigt son but, failli réaliser ses rêves. C'était la fatalité, fatal, la vie lui avait pris les choses auxquels elle tenait le plus au monde. Alors, elle s'était suicidée, un jour d'été, canicule, 35 degrés. Elle avait pris un couteau, s'était éventré, on l'avait retrouvé à même le sol, elle était pleine d'espoir mais elle avait fini par broyait du noir. C'était la chanteuse qui l'avait retrouvé morte, éventrée dans la salle de bain, elle n'avait rien entendu, rien pu faire, elle s'en voulait. Un peu. Quand elle l'avait aperçu elle n'avait pas tout de suite réagis, tétanisée par la peur, elle était restée là dix minutes, sans bouger, ne disant rien, retenant son souffle en espérant que celle-ci ouvrirait les yeux, lui sourirait et lui dirait que ce n'était qu'une blague. Mais ce n'était jamais arrivé, le photographe était parti s'acheter des cigarettes et quand il était rentré il avait trouvé la danseuse éventrée et la chanteuse tétanisée. Celui-ci avait tout de suite réagit, il avait poussé la chanteuse en lui hurlant d'appeler le SAMU. Elle s'exécuta, réveillé par la voix hurlante du photographe, une ambulance était venue. On l'enterait deux jours plus tard,  la chanteuse n'était pas allée à l'enterrement, les parents de la morte était là et elle ne voulait pas leur parler, elle ne voulait pas se remémorer à quel point c'était une fille intelligente, gentille, passionné, doué. Elle l'avait toujours admiré, elle voulait faire aussi bien qu'elle, être aussi audacieuse qu'elle, sauf que maintenant elle était morte, maintenant elle voulait faire aussi bien qu'une morte.

Peu de temps après le photographe était parti sans laisser de nouvelle. Elles s'était réveillée un jour et toutes les affaires du photographe étaient envolées, disparus, comme si l'année passée n'était jamais arrivée. Elle s'était retrouvée seule, elle avait vite déménagé voulant s'éloigné le plus possible du lieu où le drame c'était déroulé. De nouveaux elle avait sombré dans l'alcool, pendant un temps du moins. Les deux anciens colocataires c'étaient retrouvés sur la tombe de celle-ci un an plus tard. Ils avaient eu une de ses conversations complètement futiles, ils s'étaient posés des questions de politesse comment chacun aller, ce qu'ils devenaient. Et ils étaient repartis chacun de leur cotés.

Au final, de ce trio maudit il ne restait que la chanteuse, vous vous demandez surement si elle a percé, si elle est devenue connue. La réponse est oui, la chanteuse c'est moi, je vous parle en ce moment même, je voulais juste raconter l'histoire des gens qui m'ont poussé à être sur scène aujourd'hui. Sans cette danseuse je n'aurai jamais essayé de réaliser mes rêves, elle m'a prouvé qu'il fallait se montrer ambitieux pour réussir, même si c'est juste pour un court instant. Car même si le rêve ne dure pas, savoir qu'on l'a accompli ne serait-ce que pour un temps, c'est quelque chose d'exceptionnel. Quant au photographe il m'a appris à aller de l'avant, avancer, sans se retourner, ça n'a pas été facile pour lui, ça n'a pas été facile pour moi. Je ne crois pas qu'il soit devenus connu, je pense même qu'il a arrêté la photographie quand elle est morte.  Mais ça reste la personne la plus courageuse que j'ai jamais rencontrée. On dit souvent que parfois on rencontre certaine personne, qu'on devient ami avec elles juste pour un très cours instant, car à ce moment-là on en avait besoin. Et j'avais besoin d'elles à ce moment-là, comme elles avaient besoin de moi.