CRITIQUE OU SANGLANTE, A VOUS DE CHOISIR !

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Un petit coup du sort et l'on se rend compte trop tard de sa chance! La vie est une suite d'interprétations plus ou moins bien venue pour être heureuse, alors ce texte dit : "Donnez vous le sourire"

Je m'appelle Odile, Odile Mallefort, c'est ma mère qui a choisi ce prénom ridicule ! Déjà ce jour là, j'ai pas franchement eu de chance. Mon père souhaitait m'appeler Carla ou Edwige, sûr que j'aurai eu un autre genre d'avenir à l'horizon avec ce genre de prénom tout à fait mystèrieux mais maman n'a jamais voulu. Elle a dit que se serait Odile ou rien ! ²Rien ² c'est dure à porter. Alors voilà cette idiote d'odile qui démarre fort mal dans la vie. C'est moi, rien que pour moi. "For me, FORMIDABLE", comme dirait Aznavour ! Si vous vous êtes plaint un jour de vos petits tracas quotidiens, arrêtez tout de suite, je vous bats haut la main, voir les deux mains levées en l'air. Je suis journaliste critique ou sanglante, question de journée et d'humeur. Je passe mon temps à auditionner des nombrils, j'aurais presque dû faire médecine. Mais tout ça, ce n'est rien, à côté de tout ce qui m'attend après, parce que moi je dois dire que dans la vie, je vais de surprises en surprises. A croire que chaque fois qu'un nuage se forme aux UNITED STATE OF AMERICA c'est au-dessus de ma tête qu'il vient se placer pour me foudroyer.

Après que ma vedette se soit enfin décidée à prendre le large, je me suis installée deux secondes dans l'idée de décompresser un peu, juste là à cette table qui se trouve dans le renfoncement de la salle arrière, derrière la plante verte qui fait pitié, tellement elle est flétrie. Vous n'allez pas le croire mais vous pouvez ! Voilà un type, baraqué, grand, brun, aux yeux vert larges comme des réverbères, sourire aux lèvres extra large et trempé de la tête au pied qui débarque là et qui s'assit juste en face de moi.

- Puis-je vous offrir un verre ?

Han, ça c'est ma chance ! Un homme qui paie sans rien demander en échange ?  JACQUOU LE CROQUANT?

— Je prendrais bien un Bruichladycrach s'il vous plait ?

Je me dis dans mon fort intérieur qu'il manque pas d'air pour un noyer. Et aussi sec il me propose de me dire la bonne aventure. Le coucou classique ! Il va me ressortir les mystères de mon au-delà du temps présent, les mêmes qu'il tire des cartes tous les quarts d'heure et à tout le monde forcément histoire de m'hypnotiser et de me soutirer un billet!

— Pas possible ? Non mais vous y croyiez deux secondes ? En fait Monsieur fait dans l'agent secret, il finit par m'avouer qu'il travaille, carrément et je vous le donne en mille, pour les renseignements généraux français, ²rien" que ça ! C'est bien connu, vous soulevez une plante verte dans un bistrot, il en sort cinq du pot. Sur le moment j'ai envie de lui rire au nez mais lui ; il joue la carte de l'ultra sérieux avec ses écouteurs sur les oreilles, alors je ne sais pas trop comment me poser. Je défais mon talon de ma chaussure pour me donner une contenance puisque j'ai vraiment pas de pot. A force de prétendre à des postes de mercenaire, ça finit par vous tomber sur le coin du nez ! Pendant ce temps-là l'agent secret cause à quelqu'un dans le micro. Je tente un peu bêtement de dire un truc :

— Eh bien, euh, si vous voulez, moi c'est pas "Rien", enfin Odile, je suis journaliste.

— Ok Odile, enchanté, je cherche une planque et on est pressé, va falloir décoller tout de suite, avec ce que vous venez de vous glisser sous le nez, ça devrait pas poser trop de problème ?

"Sale rat", c'est vraiment tout ce qui me vient quand je repense à cet instant précis ! En matière d'agent secret, j'ai franchement pas l'impression d'avoir croisé le prince des gentlemans ! C'est clair j'ai encore pas tiré la fève, c'est tout moi ! Le vlà qui attrape mon sac à main tout neuf, mon poignet et qui me traîne un paquet de linge sale à sa suite sans me demander mon reste, ce que j'en pense quoi, des fois que… Pas besoin d'être médium pour deviner le trajet à suivre, la cour intérieure de derrière, le couloir de l'immeuble, 5 rue du quatre septembre, éviter le grand boulevard et le métro bien sûr, sauf qu'un agent secret ça croit toujours tout savoir et tout deviner sauf L'INEVITABLE. Je suis plutôt connue dans ce quartier, je rédige mes articles pour madame tout le monde et c'est pas n'importe qui madame tout le monde, ça va de la secrétaire de RINGSTAFF en passant par la concierge du 3 Ter, la femme du boulanger, la femme du pharmacien, la caissière de GENIALLISSIMEMARKET, Yoyolanda la baby-sitter, Mme Déborah DEVRALGIE, l'avocate du tour de force, Mme DOREMONT-PARNASSIEN qui va pas être loin d'atteindre son centenaire avec tout ça, et puis faudrait pas oublier non plus Louloutre la superbe fille du 5ème étage de la rue Marthe. Si elle a pas couché à coup de pare-choc 9 singes et 1/2, elle en a pas couché un seul !  Sûr comme quatre et deux et un, font 421. Il m'arrive de jouer au poker voyez-vous monsieur l'agent secret, alors vous allez pas me la faire à moi, je sais de quoi je parle. Je vais sûrement pas parier ma propre vie. Regardez moi ça, monsieur "qui loue tout, qui trouve tout, je vais me faire percer de plein de petits trous, oui !". Agent secret  de profession, tu m'en diras tant! Tu parles d'un agent secret d'eau douce ! Et tout le long du chemin je m'entraîne à lui dire, quand on arrivera devant mon immeuble que j'ai jamais été à cheval sur les principes moi, que je m'en fiche carrément que les hommes m'ouvrent pas les portes devant-moi. Peut-être qu'une formule comme « Je n'en ferai rien, on se connaît pas assez, je vous en prie passez devant, ça me fait plaisir. ». Mais là je craque, un tout petit peu et je lui dis quand même ses quatre vérités maintenant que je lui ai quand même épargné tout ce qui m'a traversé l'esprit de lui dire juste avant et que j'ai pas dit parce que  je suis une personne qui a reçu une excellente éducation, poli et courtoise, ce qui n'est pas donné à tout le monde et lui le premier. Alors je voudrais pas le dire, mais je le dis quand même :

— Allez-y courrez devant, jetez-vous dans la gueule du loup tout seul ! Ces types que vous  avez aux trousses, j'ai l'intuition d'Odile qu'ils ont déjà mon adresse et qu'ils nous ont même précédé. D'ailleurs c'est tout à fait ce que je pensais quand on se pointe au troisième étage, la porte est reconnaissable, c'est la seule qui a un gros trou à hauteur d'homme entre le gond et la poignée. Ça ne l'a justement pas raté, pour le compte ce pauvre Ronald. A deux centimètres près, il évitait la balle dans le cœur mais là c'est raté. J'ai failli hurler mais pour ce genre de question de sang froid j'avoue qu'un agent secret c'est assez doué pour vous étouffer d'une paume, abattre le tueur qui planquait dans l'appart en bouffant des chips croquantes qui lui ont filé la soif mortelle et aviser des précautions à prendre dans le quart d'heure. Tout cela sans même prendre le temps de penser à vous laisser respirer. Un extra lucide ce type, il avait pas tellement menti au fond, rien ne le désarme, en un centième de seconde il a imaginé votre scène et en moins que rien de plus, il vous a balancé sur les planches. Même pas question d'aller lui refuser, c'est bien dit poliment mais ça ne souffre pas la discussion. Je ne l'ai pas vu poser une seule fois son calibre pendant toute la scène. Je pleurniche, je mouchotte un peu c'est compréhensible, je suis quand même pas Marianne moi, j'ai pas fait les commandos armées. Et ce pauvre Ronald MARCDOUGLAS tombé d'Ecosse à Paris, il va finir où au fait ? Au Père la chaise, roulé dans son tapis de bain ? Il relevait mon courrier pour ne pas alerter les cambrioleurs pendant que j'étais absente et il nourrissait mon chat quand je faisais un déplacement à l'étranger, c'est quand même pas de bol, il venait juste de finir le paquet de croquettes. Et eux, ils se sont imaginés que c'était chez moi, chez lui, parce que je me faisais livrer mes colis à son adresse. Nous vlà maintenant avec deux paquets sur les bras et l'autre qui m'explique que maintenant on va les ramener tout les deux chez moi, l'appartement juste en face. Alors on les traîne par les pieds tous les deux et on a à peine claqué la porte et fourré le matériel dans deux malles que quelqu'un se met à sonner comme un malade à la porte. Ce serait pas les tueurs qui reviennent des fois ? Ben non forcément, y'en avait qu'un et il entame sa décomposition dans mon panier à linge sale au milieu du salon, dixit XXX. Il fait de l'humour monsieur l'agent secret :

—Je les ai à l'œil tous les deux comme ça, dès fois qu'ils se mettraient à courir comme des morts vivants!

— Les deux ? Mais on vous apprend quoi dans les services secrets, à terroriser les pauvres femmes qui ne savent pas se défendre ?

— Parait qu'il y en a une proportion grandissante qui savent très bien, chère mademoiselle !

Oh le…. SALE TYPE… J'écoute même pas, enfin si, j'ai quand même entendu chaque mot de ce qu'il m'a raconté, question d'instinct de survie. Je crois que j'en peux plus de cette histoire, je vais craquer.

Vous verrez quand cela vous arrivera, quand un agent des forces secrètes françaises se plantera devant vous avec son regard perçant de "taupe" alors que vous êtes tranquillement installé sur le fauteuil d'attente de votre coiffeuse, à siroter un café-crème tout en repassant votre pile de linge, vous repenserez à ce que j'écris là : D'un seul coup quand il se met à décliner ses titres de service, on perd tout à fait l'envie de rire ou de mater son postérieur et on se met à chercher un bandana dans la pile pour partir en opération. Et Ronald et moi on va aussi devoir signer un contrat de coloc maintenant, plutôt que de continuer à payer son loyer pour rien, vaut mieux qu'il mette ses quartiers chez moi…

—Mais qu'est-ce que je raconte maintenant !

— Eh ! Vous foutez quoi là, la Miss, allez ouvrir cette putain de porte bon Dieu, vous voulez alerter tout l'immeuble ?

— Oui, oui bien sûr, j'y vais, j'y vais !

"Tais-toi et compte", c'est toujours ce que je me dis dans ma tête quand j'ai vraiment la trouille. Y'a aucune raison de s'inquiéter d'ailleurs, ce n'est que Sophia, la locataire du 5ème. Elle m'a vue arriver dans la cour par sa fenêtre et elle vient toujours prendre un petit verre lorsque je reviens pour que je lui raconte un peu mes péripéties de voyage. Elle est retoucheuse mais je me garderai bien de le dire au Français, dès fois que l'idée lui traverse l'esprit d'aller découper les deux ambassadeurs pour mieux passer les frontières. Une heure après, Sophia est toujours là accrochée à la table du salon comme une sangsue. Elle va sûrement pas décoller tant qu'il restera un gâteau dans la boite en fer et du café dans la cafetière. Moi je me cramponne sur une malle contenant un cadavre face au français qui campe sur l'autre. Lui, il a l'air d'avoir l'habitude du camping, on dirait bien en tout cas. Avant aujourd'hui j'avais jamais vraiment réalisé à quel point on prend du temps pour se dire les choses importantes Sophia et moi. Je l'observe se pâmer devant le Français, pas nouveau comme réaction, surtout quand il lui révèle très finement qu'il est mon Officiel.

— Ah d'accord !! Je comprends mieux ! qu'elle répond.

Et là-dessus, Sophia se met à glousser comme une poule, c'est ce qu'elle fait quand elle est contente de quelque chose. Ensuite elle se met à marcher les pieds en canard, une manière d'applaudir comme une autre.

L'agent secret me sourit, ces gens-là ils apprennent à être affectueux sur commande, il aurait presque l'air sincère avec ça et il est plutôt patient quand il ne me gueule pas dessus. C'est sûr, y'a le mot corde dans cordial, c'est forcément un spécialiste et madame DOREMONT avait bien raison de me dire tout le temps, "ma fille te marie jamais sinon tu vas connaître ce que c'est qu'un rasoir !" Décidément Sophia nous passe tout en revue. Tout, tout droits d'auteurs réservés. Ah t'es comme ça toi ? Dites-voir ? Je vais probablement me faire rectifier pour vos beaux yeux de lectrice dans le quart d'heure, je ne vais pas en plus me faire refaire de mes dividendes ! Elle ne va rien nous épargner celle-là. Tout pour revenir à nos moutons c'est son collant qui s'est retrouvé filé dans le bus en allant au marché, la maîtresse de son patron, une gondole à Venise qui va pas tarder à couler et qui s'est achetée un nouveau caniche, la concierge de l'immeuble qui lui a parlé d'aller et venue suspectes dans l'immeuble qui salissent ses marches après qu'elle les a lavé et puis quelques petites nouvelles de son furet qui sent le fauve. Oui, Sophia ne fait rien comme tout le monde, elle n'a pas pris un chat, elle a acheté un magnifique furet comme animal de compagnie. Elle l'amène des fois chez moi dans sa boite rouge de transport, il est rouquin avec des petites mains et des petits yeux opaques de tueur. Et pourquoi dites donc qu'elle emmènerait pas aussi l'agent secret voyager dans sa boite ? Tant qu'à pas rester seule, être mal accompagné c'est pas plus mal et en tout cas ça fait nettement la différence, non? Finalement elle a manqué de s'évanouir quand XXX le magnétique lui a pris gentiment le bras pour la reconduire à la porte. Il aurait pu faire ce qu'il voulait d'elle, ça se voyait comme le nez au milieu de la figure de Sophia. Il lui a simplement dit :

—Lèves-toi et marches vers la porte

Et Sophia s'est levée et elle s'est dirigée tout droit vers la sortie. Moi, j'avoue que j'ai cru qu'elle finirait jamais et qu'il allait devoir la raccourcir mais c'est sûrement pas le plus beau de l'histoire. C'est juste un début. Il me dit qu'on va attendre la tombée de la nuit ensemble et qu'on descendra les malles dans MA voiture.

— Non mais attendez là, moi je n'ai absolument rien fait, je mange pas de ce pain là ! Je suis désolée de vous contrariez un tout petit peu dans vos projets, vous décidez tout, tout seul depuis le début que vous m'avez rencontré, mais moi je vous ai jamais demandé de venir au bar, ni ici, et puis je suis pas une criminelle et puis j'ai pas l'intention une minute de plus de devenir votre complice pour meurtre et me retrouver sans vous au quartier des femmes de Fleury Mérogis.

Mon père et ma mère vont venir m'apporter des oranges grosses comme deux poings, tant que vous y êtes ? Mon père, passe encore ! Mais ma mère, elle va m'éplucher mes oranges au parloir devant tout le monde en évoquant la larme à l'œil la période où je faisais encore pipi au lit ! C'est ça que vous croyez que je vais vous laisser faire de moi, la risée de toute une unité et peut-être même de toute l'humanité parce que vous le savez bien, on est toujours rattrapé par son passé!

— Eh bien ma petite demoiselle, de deux choses l'une, et réfléchissez y bien avant de répondre, car je vous le garantie sur facture, malheur est bon à tout ! C'est ou vous enquillez avec moi la descente de ces deux malles dans votre carrosse ce soir à 22h30, ou vous me prêté assistance pour les découper en petits bouts au couteau à viande et je les descends tout seul dans votre voiture en autant de sacs qu'il faudra avant qu'on puisse partir tous les deux ensemble.

Eh bien voilà, ça y est, on y est, finalement ça lui est monté tout seul à l'esprit l'idée de faire du découpage. Je manque de glisser sur mon talon au milieu de nulle part, je sais pas, j'ai comme qui dirait le vertige d'un seul coup à l'idée qu'il a décidé comme ça, de plus me quitter.

— Ah oui c'est comme ça que vous vous représenté les choses, vous en fait ?

— Oui, exactement. La raison d'état n'a pas les moyens d'avoir des scrupules, et vous aussi je suppose ?

— Euh oui, exactement comme vous, en fait je pense comme vous, je suis plutôt partante pour descendre les deux malles d'un coup, on ira plus vite pour arriver en bas dans la rue avec notre chargement, comme vous disiez tout à l'heure.

Et vous voyez bien là, quand je vous disais plus haut que vos problèmes de factures de téléphone et de panne de congélateur, vos engeulades avec votre chéri-biz-biz qui s'est laissé ferré sans le vouloir sur le net par une parfaite inconnue qui avait pourtant tout du boudin blanc grillé, l'exercice du thé avec votre belle-mère à qui vous avez hésité dix fois cette semaine de lui filer une tasse frôlaté de laxatifs pour qu'elle ait plus une minute pour ouvrir sa délicieuse grande bouche, la convocation de l'institutrice pour renvoyer votre fils de son établissement scolaire, quand je vous disais plus haut que tout ça c'était de la niognotte, à côté de ce qui m'arrive à moi sans arrêt de manière intempestive ! Allez lui dire un peu à lui l'Agent secret de la boucler, ou essayez ne serait-ce que deux secondes d'imaginer le moyen que vous pourriez employer pour la lui faire fermer. Eh bien je vous souhaite bien du plaisir pour y arriver et dans votre vie aussi puisque vous avez décidément trop de chance ! Vous voyez, je parie tout ce que je n'ai pas de plus que vous, que vous auriez fait exactement comme moi, que vous vous seriez écrasé, exécutée direct. Mais vous, vous vous êtes une de ces filles chanceuses à qui ça n'arrive jamais ce genre de plan bancal. Ben rigolé pas trop fort quand même, parce que c'est pas le premier, ni le dernier type qu'on assassine à la plume sur un sous-mains et ça pourrait bien vous tomber sur le coin du nez un jour et au moment où vous vous y attendrez le moins. Et ce jour-là croyez-moi, j'y serais sûrement pas, mais m'est avis que vous allez nettement moins rigoler ! Si vous rêvé de déchanter, vous allez être servi au dessus de vos attentes! Vous allez même peut-être les regretter vos petits déboires dérisoires de ménagères qui fait tranquillement parti du panel. PARCE QUE DITES-VOUS BIEN ! que quand c'est la nation qui va venir vous chercher des noises sur le terrain, vous allez pleurer votre belle-mère !

Moi et l'agent secret quand on est redescendu dans la rue avec la deuxième malle au bout des bras, un gars en avait profité pour tirer ma voiture qui était restée ouverte sur le parking. Là-dessus voilà le français qui entreprend d'en ouvrir une qui n'est ni à lui ni à moi. Il me sort que c'est pas plus mal, qu'on en aura finalement qu'un seul à enterrer. C'est tout à fait le genre de chose à me dire pour me rassurer moi, j'ai l'habitude que les hommes me parlent brut de décoffrage, du genre :

— ça vous dérangerait de nous apporter un petit café Odile ?

et puis faut dire que ça m'arrive régulièrement d'aller creuser des trous dans les forêts des alentours pour aller enterrer des hamsters ou des tortues crevées. Si, si, je l'ai déjà fait je me rappelle maintenant, du temps de ma grand-mère mais c'était une poule, elle ressemblait un peu à Sophia d'ailleurs maintenant que j'y repense et ma grand-mère l'a fourré sous le tas de fumier bien au milieu. Ensuite elle m'a dit que ça ferait des vers pour les autres poules et du fumier pour les courges. J'aime pas trop ça les courges mais depuis le temps qu'on nous rabâche qu'il faut respecter la nature pour une fois que j'ai l'occasion de bien faire, j'aurais eu tort de refuser l'invitation.

J'étais à peine descendu de la voiture avec ma pelle et mon sceau qu'XXX était déjà derrière mon dos entrain de scruter sa carte géographique, une boussole à la main. A croire qu'il vient toutes les semaines enterrer quelqu'un ici. Il m'a juste dit que c'était tout droit. Tout droit, tout droit, il en a de bonnes ce type, il me prend pour un collègue du GIGN, j'ai pas l'option infrarouge montée de série. D'ailleurs j'ai même pas eu le temps de retirer mes talons, c'est lui qui me les a viré sous la voiture. On voit que c'est pas lui qui les a payé mes chaussures, il aurait moins joué au malin. Au bout de deux heures de marche forcée, il s'est enfin décidé pour une bordure de clairière, il m'a expliqué que c'était là qu'on allait planter le cimetière. Je vous le cacherais pas, j'ai répondu tant mieux, en fait j'étais tellement épuisée que je savais plus lequel des deux était resté dans la malle ni où était mes pieds. Il m'a dit que se serait la surprise du chef pour le mort. Chouette, ça tombe bien, j'ai pas l'habitude qu'on me fasse des surprises ! Enfin j'avais quand même du mal à cacher ma joie d'autant que j'arrivais pas tellement à me concentrer sur l'opération. Premièrement faut bien voir que s'improvise pas soldat d'élite qui veut, et puis ensuite vous ne pouvez pas vous imaginer ce que c'est que tous ces bruits de bêtes suspectes qui sont là dans le noir à gratter, à pousser des petits cris. Elles gravitent autours de vous, elles vous épient sans se montrer comme si elles se préparaient à vous attaquer. On a beau se trimballer dans la forêt la nuit sans talon haut avec un cadavre et un militaire de carrière armé, on n'en reste pas moins femme. Je peux dire sans me vanter que j'ai toujours été de bonne composition, je suis pas compliquée pour un euro, j'étais franchement toute disposée à agrandir le cimetière si le français s'était proposé de leur faire leur fête comme au tueur de l'appart de Ronald. Seulement tout ce que monsieur l'agent des forces secrètes françaises a trouvé à me dire, c'est :

— Fermez-là un peu et donnez moi un coup de main pour creuser.

En fait plus le temps passe, mieux on arrive à se comprendre entre hommes quand on est dans la même galère même si à part moi, je me suis quand même demandé deux secondes, s'il était vraiment Agent secret de classe exceptionnelle comme il avait prétendu l'être parce que tout de même ça me parait pas si compliqué que ça d'abattre un moustique en vol avec une arme de poing. Même moi je pourrais le faire.

Ça nous a pris pas plus d'un quart d'heure pour creuser le trou assez profond, basculer la malle au-dessus et tout reboucher. Ensuite on est reparti vers la voiture, j'étais entrain de récupérer mes talons quand il a reçu ses ordres et là j'ai pas franchement tout compris tout de suite quand il a dit qu'on repartait parce qu'on avait une livraison de dernière minute.

 

Et là, Vous pensez que je vais en prendre pour combien de temps si la police nous met la main au collet ?

—Eh bien Odile 30 ans, un taux fixe ça me parait très raisonnable.

—Ah oui tant que ça quand même, vous pensez vraiment que ça les vaut ?

— Ma chère Odile, imaginez maintenant que nous sommes tous les deux assis au fond d'un grand étang très calme, à cette table que vous voyez dans le renforcement. Vous voyez cette plante, Odile ? Ca va lui faire du bien un petit rafraîchissement, vous voyez ses feuilles qui reprennent une belle couleur verte ? Vous la trouvez somptueuse cette plante Odile, n'est-ce pas ? Elle est somptueuse, hein ? Et là on va nous apporter un énorme plat de fruits de mer, vous sentez ? Sentez comme ils sont salés Odile ? Ca voilà, vous sentez ce sel, ça ne vous fait pas venir toute suite l'eau à la bouche ? Allez-y Odile, vous pouvez manger  de tout. Prenez un gros morceau de citron maintenant, allez-y, vous allez voir, c'est délicieux avec les crustacés ? Vous sentez le goût acide du citron dans votre bouche odile ? Dites-moi, Odile, vous aimez les avocats ?

— Eh ! vous ! Beau brun d'acier, vous avez fini de jouer au crétin avec moi ? Il faut être deux pour jouer à ce petit jeu et je vous promets que ce n'est pas vous qui allez gagner, c'est moi. Je vais vous en coller un au derrière d'avocat si vous n'arrêtez pas de vous payer ma tête toutes les trentes secondes. Non mais c'est quoi ce type ? Un MESSMER-RIEN, oui ou quoi?

OUI, toute cette histoire est vraisemblable et des fois, c'est pas du bluff, avec tout ce qu'il faut que je me coltine tous les jours que Dieu me fait, j'ai parfois l'impression que je vais exploser ou faire se volatiliser quelqu'un ! Je me sens l'âme d'étriper un type qui ressemblerait à James Bond ou étrangler une de ces nanas super belle mais qui à sa langue tellement trop sortie de sa poche qu'on dirait une trompe d'éléphant. Heureusement que dans la vie je sais toujours rester PRO-COOL, c'est carrément ma botte secrète d'Agente des forces spéciales françaises. Mesdames, mesdemoiselles, monsieur XXX et tous ses adorables congénères, pour vous servir ! Enfin pensez-y de temps en temps Messieurs, un sourire ne vous coûte rien et cela vous rend mille fois plus charmant !


Le Gallicaire Fantaisiste





Ps/ Texte soumis pour participation au concours "FEEL GOOD"

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